
Un simple doute peut miner un projet... Photo: DR
BLOGUE. Vous avez une idée géniale, ou un projet formidable, mais voilà, les autres ne vous prêtent jamais l'oreille attentive que vous désirez. Et votre beau rêve ne se concrétise pas, en dépit de vos efforts démesurés, faute d'appuis suffisants. Pourquoi? Oui, pourquoi ne parvenez-vous pas à vaincre les doutes des autres?
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La réponse est simple : parce que vous ne savez rien, ou presque, du doute. De ce qui fait qu'une personne ne croit pas à ce qu'on lui dit, même si on lui met sous le nez tous les arguments qui devraient logiquement la convaincre et lui faire changer d'idée. C'est ce que j'ai découvert dans une étude intitulée Are there really foxes: Where does the doubt emerge?, signée par Deborah Blackman, professeure de gestion des ressources humaines à l'Université de Canberra (Australie), assistée de son étudiante Amy Corcoran, et par Stephen Sarre, professeur de génétique des animaux sauvages à la même université.
Les trois chercheurs sont partis d'un constat particulier : malgré de nombreuses preuves scientifiques quant à l'arrivée récente de renards en Tasmanie – un animal jugé là-bas comme nuisible, car prédateur de différentes espèces rares, spécifiques à l'île – nombre de résidents refusent d'y croire, et dénoncent donc vivement les opérations d'éradication menées à l'égard du "fléau" à poils roux. L'opposition est si virulente que la lutte contre les renards est mise à mal, et pourrait être prochainement abandonnée. D'où l'intérêt de savoir comment on a pu en arriver à une telle situation.
En 1998, un renard a été aperçu en train de sortir précipitamment d'un traversier qui venait d'accoster en Tasmanie. L'alerte a aussitôt été donnée, mais en vain : on n'a pas pu lui mettre la main dessus. On aurait pu se dire que ce n'était pas trop grave, car tout seul de son espèce sur l'île, il ne représentait pas un grand danger pour l'équilibre de l'écosystème. Mais dans les années qui suivirent, les signalements de renards ont décuplé et des crottes – attribuées au renard par analyse de l'ADN – ont été retrouvées. Il y avait bel et bien péril en la demeure.
En 2001, une équipe d'experts a été mise sur pied, dénommée la Fox Free Tasmania Taskforce, pour évaluer le danger et proposer des solutions s'il fallait vraiment s'attaquer à celui-ci. Cinq années plus tard, un vaste programme d'éradication a été lancé dans des zones ciblées, qui consistait essentiellement à déployer dans la nature des boulettes de viande empoisonnées. Enfin, en 2009, un rapport a recommandé d'étendre le programme d'éradication à l'ensemble de l'île, sans aucune exception.