Indicateurs du G15+: les entreprises doivent être efficaces tous azimuts

Publié le 08/02/2024 à 17:50

Indicateurs du G15+: les entreprises doivent être efficaces tous azimuts

Publié le 08/02/2024 à 17:50

Par François Normand

«Une entreprise augmente aussi sa compétitivité en réduisant son empreinte sur l’environnement», insiste Daniel Charron, vice-président chez Fondaction. (Photo: Markus Spiske pour Unsplash)

Miser uniquement sur la productivité du travail est insuffisant pour qu’une entreprise soit compétitive et attrayante aux yeux des investisseurs. Elle doit aussi être plus efficace dans toutes ses activités, et ce, de sa consommation d’énergie et d’eau à son utilisation des matières premières en passant par le contrôle de ses émissions de gaz à effet de serre (GES).

Voici l’un des constats forts qui ressort d’un entretien réalisé par Les Affaires avec trois membres du G15+. Le collectif vient de publier avec ses partenaires son troisième rapport sur les Indicateurs du bien-être du Québec.

Sur le même sujet — Endettement, santé mentale et autos: le bien être menacé au Québec?

Il s’agit de Camille Lajoie, étudiante à la maîtrise à la London School of Economics, Daniel Charron, vice-président chez Fondaction, et Denis Bolduc, secrétaire général de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ).

Fondé en mars 2020, le G15+ est composé de leaders économiques, syndicaux, sociaux et environnementaux. Il a dévoilé ses indicateurs du bien-être pour la première fois en janvier 2022, ces derniers visant à aller au-delà de la simple croissance du PIB et de la création d’emplois pour évaluer le bien-être de la population.

«Une entreprise augmente aussi sa compétitivité en réduisant son empreinte sur l’environnement», insiste Daniel Charron.

Ce dernier souligne que les capitaux-risqueurs, comme Fondaction, s’intéressent de plus en plus aux sociétés qui font partie de la solution pour atténuer l’incidence de la crise écologique sur la société québécoise.

On parle bien entendu de la réduction des gaz à effet de serre (GES), mais aussi d’autres aspects de la crise écologique tels que la surconsommation d’eau et d’autres ressources naturelles, sans parler de la destruction de la biodiversité.

«Dans chaque dossier que le Fonds de solidarité FTQ analyse, il y a un volet qui touche aux critères ESG, pour environnement, société, gouvernance», souligne Denis Bolduc.

La question est cruciale.

Selon les indicateurs du G15+, le Québec affiche par exemple un retard en matière de productivité du travail (PIB/heures travaillées) et de productivité énergétique (PIB/énergie consommée en gigajoules) comparativement à 11 autres juridictions.

Il s’agit de l’Ontario, du Canada, de l’Allemagne, de la France, de l’Italie, du Royaume-Uni, du Japon, des États-Unis, de la Finlande, de l’Islande et de la Nouvelle-Zélande.

 

Les champions de la productivité du travail

En fait, en 2022, le Québec arrive en 11e position sur 12 juridictions avec une productivité du travail de 100$ par heure travaillée, juste devant la Nouvelle-Zélande à 92,13$.

Les trois juridictions affichant les plus fortes productivités sont les États-Unis (155,89$), l’Allemagne (144,40$) et l’Islande (138,61$).

La productivité du travail du Canada et de l’Ontario s’élève respectivement à 112,32$ et 108,27$.

Plusieurs facteurs expliquent le retard du Québec, et du reste du Canada, souligne Camille Lajoie.

Le sous-investissement dans les nouvelles technologies et les équipements de production à la fine pointe (incluant les robots) est souvent pointé du doigt par la plupart des économistes.

Au sujet de la productivité énergétique, le Québec (203$/GJ) se classe au 9e rang sur les 12 juridictions, devant la Finlande (194,92$/GJ), le Canada (193$/GJ) et l’Islande (120,85$/GJ).

Les années de comparaisons internationales les plus récentes sont 2015-2016.

Selon le rapport du G15+, le retard du Québec pourrait tenir au fait que la province produit beaucoup d’énergie (l’hydroélectricité), ce qui «affecte négativement» sa situation par rapport aux autres juridictions.

«En utilisant, la quantité de gigajoules d’énergie produite comme dénominateur, cela réduit les chances du Québec de bien se positionner», écrivent les auteurs de l’analyse.

Cela dit, cette hypothèse a ses limites.

Un pays comme la France (3e rang), qui produit aussi beaucoup d’énergie (le nucléaire), affiche une productivité presque deux fois supérieure à la nôtre à 390,48$/GJ.

 

Énergie: les Britanniques consomment peu

Le Royaume-Uni affiche quant à lui la meilleure productivité énergétique à 473,79$/GJ.

Camille Lajoie pense que la façon de consommer l’énergie dans certains pays d’Europe explique sans doute cet écart de productivité avec le Québec.

«En France et au Royaume-Uni, on ne consomme pas l’énergie comme au Québec, dit celle qui vit actuellement à Londres pour ses études. Les maisons sont plus petites et souvent mal isolées. Comme les prix de l’électricité sont plus élevés, les gens chauffent aussi un peu moins leur résidence.»

Questionné à savoir si le Québec devrait augmenter ses tarifs d’électricité pour optimiser sa consommation d’énergie, Denis Bolduc a indiqué qu’il y avait un risque de pénaliser les personnes défavorisées, qui peinent déjà à boucler les fins de mois en raison de l’inflation.

En ce qui a trait à la consommation d’eau potable, les Québécois en consomment davantage qu’en Ontario et dans l’ensemble du Canada.

Les indicateurs du G15+ ne documentent pas la consommation des autres juridictions à l’international.

Ainsi, même si le volume d’eau quotidien consommé par personne a diminué de plus de 15% entre 2011 et 2019 au Québec, la province affiche en moyenne une consommation de 527 litres comparativement à 343 litres, en Ontario, et à 411 litres, au Canada.

En matière de GES, le Québec figure au 5e rang sur les 12 juridictions analysées par le G15+.

En 2021, un Québécois produisait en moyenne 9 tonnes de GES par année. Les Français sont les champions avec 6,2 tonnes, alors que les Américains terminent au dernier rang à 19,1 tonnes.

Les Canadiens finissent quant à eux avant-derniers avec 17,5 tonnes.

En revanche, pour ce qui est de circularité de notre économie, le Québec fait moins bien que la moyenne canadienne.

En 2020, seulement 3,5% de la matière circulait de manière circulaire dans la province comparativement à 6,1% au Canada.

 

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