Le plan Marchand va échouer

Publié le 04/10/2023 à 16:04

Le plan Marchand va échouer

Publié le 04/10/2023 à 16:04

Il se construit de 2500 à 3000 logements annuellement à Québec. On vise d’en bâtir 5000 par année. Ce plan comporte 20 actions structurantes qui auront un impact à court terme et dont les effets se feront sentir jusqu’en 2040. (Photo: 123RF)

EXPERT INVITÉ. Je salue le plan élaboré par le maire de Québec, Bruno Marchand. Néanmoins les mesures pour augmenter la densité me semblent trop timides et l’aide des gouvernements supérieurs est incertaine. Je ne pense pas que la ville de Québec va réussir à atteindre ses objectifs pour les prochaines années.

Il se construit de 2500 à 3000 logements. On vise d’en bâtir 5000 par année. Ce plan comporte 20 actions structurantes qui auront un impact à court terme et dont les effets se feront sentir jusqu’en 2040.

 

Moins de stationnements

Les exigences minimales de stationnement pour les constructions neuves seront abolies. C’est un exemple d’une mesure qui va avoir un impact important et qui ne coûte rien à une ville.

Cette mesure encourage non seulement l’utilisation des transports en commun, mais aussi du vélo et de la marche à pied.

Moins de stationnements seront construits. Je suis stupéfait. La Ville de Québec met en place cette mesure audacieuse avant Montréal.

 

Densification trop douce

L’ajout de logements accessoires sera permis. Je comprends que le maire fasse attention à ne pas déformer l’âme des quartiers et provoquer un mouvement de protestation. De plus, la législation provinciale, avec la possibilité de référendum, n’encourage pas d’aller plus loin.

C’est un pas dans la bonne direction, mais cette mesure timorée entraînera peu de constructions.

 

Gare à ne pas freiner la densification autour du tramway

Une des raisons de bâtir un tramway, c’est de densifier. Cependant, les promoteurs vont probablement devoir payer des redevances, ce qui ralentira le développement.

La Ville va mettre à jour leur règlement de zonage pour augmenter les hauteurs permises à certains endroits.

La Ville a pour objectif de raccourcir les délais de livraison des permis. La réduction du nombre de décisions discrétionnaires va aider.

 

Pas assez de logements sociaux

Elle vise à construire 80 000 nouveaux logements d’ici 2040, dont 10% seront réservés au logement social et abordable. Elle souhaite aussi retirer du marché spéculatif 50 logements par an.

La pression est forte pour qu’il y ait plus de logements sociaux de construits. C’est légitime.

Les fonds gouvernementaux étant limités, il est réaliste d’encourager la construction par des promoteurs privés.

 

La construction neuve aide l’abordabilité

La construction neuve, parce qu’elle coûte cher, n’affecte qu’indirectement le stock de logements abordables.

Ces effets indirects sont difficiles à observer. Mais il est crucial de bien comprendre leur impact pour juger les mérites relatifs des deux approches et formuler une politique de logement optimale.

Une étude américaine établit un ensemble d’estimations par simulation de l’impact des nouvelles constructions haut de gamme sur les marchés immobiliers à revenus faibles et moyens. Elle documente les séquences de déménagements déclenchées par la construction de nouveaux logements. Elle comptabilise jusqu’à six séries de déménagements.

À la fin du cycle de déménagements, la construction de 100 nouveaux logements a réduit la demande de 70 pour les quartiers à revenu inférieur à la médiane. Pour les quartiers du quintile inférieur de revenu, la demande est réduite de 17. L’effet se produit dans un délai de cinq ans.

Pour améliorer la disponibilité et l’abordabilité des logements, la bonne nouvelle est que tout nouveau logement construit est utile.

 

Tributaire d’Ottawa et de Québec

Pour les trois prochaines années, la Ville prévoit dépenser 147M$, beaucoup plus qu’avant.

Le fédéral a créé un fonds pour accélérer la construction de logements. La Ville de Québec demande 110M$.

Hors Québec, Ottawa négocie directement avec les villes. Ces villes doivent accepter de prendre certaines mesures.

London a changé son zonage pour permettre partout des triplex et elle a été la première à signer une entente avec le ministre Fraser. Calgary et Halifax vont probablement faire de même sous peu.

Au Québec, Ottawa ne peut pas négocier avec les villes et Québec ne permet pas que l’on lui impose des conditions. Québec défend bec et ongles que l’habitation est de compétence provinciale. Ottawa et Québec affirment être confiants de s’entendre rapidement.

La dernière négociation entre Québec et Ottawa en matière d’habitation, sur la Stratégie nationale sur le logement, a mis trois ans avant de se conclure. Tant qu’il n’y a pas d’entente, je resterai soucieux.

Je pense que le gouvernement Legault devrait profiter de l’occasion pour obliger les villes à permettre des triplex partout. C’est une des meilleures mesures qui donne des résultats concrets pour augmenter l’offre. C’est ce qu’ont fait récemment la Colombie-Britannique et l’Ontario.

La capitale nationale souhaite que le gouvernement Legault allonge la part du lion, soit 348M$. Ce n’est pas acquis.

La Ville de Québec a le courage de proposer plusieurs solutions avant-gardistes. Est-ce suffisant? L’avenir le dira.

Comme toutes les autres villes, la capitale nationale dépend des gouvernements provincial et fédéral pour financer son plan en habitation.

Souhaitons que d’autres villes s’inspirent du plan Marchand. Je suis impatient de voir si le plan du gouvernement Legault, à être dévoilé dans les prochains mois, sera musclé et visionnaire.

 

Je vous invite à consulter mes articles précédents.

À propos de ce blogue

Étudier, expliquer et proposer. Passionné d'immobilier, fier montréalais, actuaire de formation et courtier immobilier chez KW Urbain, Jean Sasseville vous aide à prendre des décisions plus judicieuses en utilisant des faits. Il n'est pas facile de naviguer dans le marché immobilier et le futur est par définition incertain. Il partage avec vous son interprétation du marché immobilier et des tendances.

Jean Sasseville

Sur le même sujet

2M$ en sous-traitance pour la SHQ en 2023-2024

La SHQ a dû donner pour 2M$ de contrats externes pour l’exercice financier 2023-2024.

Gain en capital: ne paniquez pas!

25/04/2024 | Charles Poulin

IL ÉTAIT UNE FOIS... VOS FINANCES. Faut-il agir rapidement pour éviter une facture d'impôt plus salée?

Blogues similaires

Jusqu'à quel point faut-il être patient avec un titre perdant?

26/04/2024 | Philippe Leblanc

EXPERT INVITÉ. Je n'aime pas appliquer de recette toute faite.

La fin d’année approche, pensez à votre CELI

14/12/2023 | Ian Gascon

EXPERT INVITÉ. La fin d’année est un moment propice pour réfléchir à la gestion de son CELI.

Gains en capital: le chaos

24/04/2024 | Dany Provost

EXPERT INVITÉ. La confusion règne depuis l'annonce de la hausse des impôts sur les gains en capital. Ne paniquez pas.