François Pouliot: Les Nordiques, quel impact pour le contribuable et Quebecor?

Publié le 05/10/2010 à 08:17, mis à jour le 05/10/2010 à 08:40

François Pouliot: Les Nordiques, quel impact pour le contribuable et Quebecor?

Publié le 05/10/2010 à 08:17, mis à jour le 05/10/2010 à 08:40

Voici les résultats d'une récente étude de Pitney Bowes sur l'état de richesse de différentes agglomérations canadiennes. Les données datent de 2007 et concernent la valeur moyenne nette des ménages:

- Vancouver, 592 851$

- Toronto, 562 173$

- Calgary, 560 332$

- Ottawa-Gatineau, 376 630$

- Edmonton, 325 341$

- Winnipeg, 273 094 $

- Montréal, 245 722$

- Québec, 169 202 $

Pas très riche Québec. Vrai cependant, il y a de l'immobilier dans tout ça, avec une possible bulle plus on va vers l'Ouest. Excluons les valeurs immobilières et ne conservons que les actifs financiers. Le portrait se lit ainsi:

- Calgary, 287 016$

- Toronto, 284 530$

- Ottawa-Gatineau, 259 993$

- Vancouver, 238 257$

- Winnipeg 214 605$

- Edmonton, 213 212$

- Montréal, 159 980$

- Québec, 138 620$

Toujours bon dernier.

Oui, mais l'écart avec Montréal n'est pas si important et le Centre Bell a beaucoup de spectacles, dîtes-vous. Pourquoi pas Québec? Ce qui sauve Montréal et le Centre Bell c'est la dimension de la métropole. Une région de 3,6 millions de personnes contre 715 500 individus pour Québec. Le nombre des riches qui font monter la moyenne est cinq fois plus élevé.

Pas sûr de la capacité de Québec à soutenir beaucoup plus de spectacles à grands déploiement que ce qu'elle soutient actuellement. Pas impossible, mais peu réaliste.

Parlons maintenant du vrai niveau d'équilibre

Pour le contribuable, le constat apparaît donc pour l'instant le suivant: le Colisée est neutre avec les Nordiques et déficitaire sans équipe.

Oups, on a oublié quelque chose. Lorsque l'on parle d'un équipement au budget en équilibre opérationnel, on n'inclut pas les intérêts et le remboursement de l'édifice.

Chacun des gouvernements qui financent le projet (municipal, provincial et fédéral) devra cependant emprunter pour payer l'infrastructure. Prenez 400 M$, mettez la chose sur 40 ans, à 6%, et vous obtenez des paiements mensuels de plus de 2 M$, ce qui veut dire 25 M$ par année d'intérêts et de remboursement.

Tel est en réalité le coût minimal du projet pour les finances publiques.

Certains avanceront qu'il peut être en partie épongé par l'impôt que paieront les joueurs de hockey. Très discutable comme argument. L'argent qui va aux joueurs vient du milieu. Il serait en bonne partie différemment dépensé dans le milieu et tout de même récupéré en impôt. Aucun gain, et probablement même une perte puisque la plupart des joueurs résident généralement à l'extérieur de la province et se trouvent à drainer ailleurs l'argent qu'ils perçoivent ici.

Certains parleront aussi d'une récupération par le développement immobilier. Très discutable encore ici. Une revitalisation sectorielle, si elle n'est pas accompagnée d'une demande en locaux supplémentaire, veut généralement dire déshabiller Jacques pour habiller Pierre. Ce qui gagne en valeur, descend ailleurs et ne fait pas rentrer plus dans les coffres.

ET QUEBECOR PENDANT CE TEMPS?

L'impact sur le contribuable discuté, passons maintenant à celui sur Quebecor.

D'abord le modèle traditionnel

La masse salariale des Nordiques était réputée se situer autour de 16,5 M$ US lorsque le club quitta, en 1995. Au taux de change de l'époque, c'était 22,5 M$ CAN. Le plancher salarial fut introduit et est aujourd'hui à 42 M$ CAN.

Au cours de la période, les dépenses ont donc progressé de 87% (un minimum, si on va au plafond salarial, qui est à 57 M$ US, c'est 150%!). Pendant ce temps, le revenu moyens des Québécois progressaient grosso modo de 50%. Si le club était à peine rentable à l'époque, on voit mal comment cette position a pu s'améliorer, du moins en termes de capacité d'accès de la clientèle.

Voyons cependant maintenant la rentabilité d'autres équipes canadiennes évoluant dans des agglomérations comparables à Québec.

 Selon Forbes, les formations de Vancouver et Edmonton s'en tirent assez bien avec un bénéfice moyen de 17,3 M$ et 10 M$ dans les trois dernières années (avant intérêts, impôt et amortissement). C'est beaucoup moins bon pour Ottawa et Calgary qui, avec des bénéfices de 3,66 M$ et 1,66 M$, ne sont pas vraiment rentables une fois les intérêts passés.

Quelque chose à retenir?

La performance de Vancouver et Edmonton est étonnante, et semble démontrer qu'il y a possibilité d'exploiter des franchises avec une bonne rentabilité même dans de petits marchés. On notera cependant aussi que ces villes affichent toujours des niveaux de richesse financière de 50% et 72% plus élevés que Québec (voir plus haut le classement Pitney Bowes).

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

Blogues similaires

Encore trop tôt pour sauter dans l’arène

Édition du 14 Juin 2023 | Dominique Beauchamp

ANALYSE. Les banques canadiennes pourraient rester sur le banc des pénalités quelque temps encore.

Shopify: prochaine victime de la malédiction boursière canadienne?

BLOGUE INVITE. Shopify est-elle différente des Nortel, Research in Motion, Valeant, Barrick Gold et autres?