Des stratégies pour attirer de nouvelles clientèles

Publié le 29/10/2011 à 00:00

Des stratégies pour attirer de nouvelles clientèles

Publié le 29/10/2011 à 00:00

Baisse du nombre d'étudiants dès la rentrée 2015, concurrence internationale accrue, sous-financement chronique... Les défis des universités québécoises sont de taille. Pour assurer leur pérennité et augmenter leur rayonnement, elles préparent l'avenir. Tour d'horizon.

Le manque de moyens reste un des principaux freins au développement des universités québécoises. Les ressources financières manquent cruellement. «Nous sommes toujours à l'affût de nouveaux budgets à trouver», affirme Yves Beauchamp, directeur général de l'École de technologie supérieure (ÉTS). Actuellement, il manque une cinquantaine de professeurs à l'établissement, ce qui représente un coût d'environ cinq millions de dollars (M$) par an. «Conséquence : 60 % des cours sont assurés par des chargés de cours, alors que l'idéal, c'est qu'ils soient le plus possible donnés par des professeurs.»

Une situation particulière au Québec. Une étude de la CREPUQ (Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec) a chiffré à 620 M$ (en 2007-2008) la différence entre les montants destinés à l'aide financière des universités au Québec et dans les autres provinces. «Je dispose de 16 000 $ par étudiant quand le reste du Canada a 20 000 $ pour le mener aux mêmes diplômes», s'insurge Guy Breton, recteur de l'Université de Montréal (UdeM).

La décision du gouvernement provincial d'augmenter les droits de scolarité à partir de la prochaine rentrée et pendant cinq ans est, de ce point de vue, bien accueillie par les établissements. «Cela va permettre une amélioration sensible de la situation financière des universités», estime Daniel Zizian, président-directeur général de la CREPUQ.

Les frais assumés par les étudiants s'élèveront à 3 793 $ à la rentrée 2016-2017, soit une hausse de 325 $ par an. «Les étudiants ne paient que 12 % du coût de leur formation. À terme, ils en paieront 15 %», remarque Guy Breton.

Toutefois, cette hausse ne résoudra pas tous les problèmes. Le ministère de l'Éducation prévoit en effet une baisse démographique des 20-24 ans, et donc des effectifs à temps plein, dès la rentrée 2015-2016. La diminution pourrait aller «jusqu'à se retrouver au niveau actuel», soit une perte d'environ 19 500 étudiants sur l'ensemble des trois cycles de formation.

Cette prévision à la baisse est d'autant plus préoccupante que la concurrence internationale des universités fait rage. Le Québec tire son épingle du jeu en attirant un nombre croissant d'étudiants étrangers. Mais cela ne suffira pas. La province devra maintenir la qualité de l'enseignement, mais aussi développer les activités de recherche pour pouvoir se mesurer aux universités européennes, américaines, australiennes et japonaises, qui luttent pour attirer les étudiants étrangers sur leurs campus.

Toutefois, Daniel Zizian est confiant : «Je ne suis pas trop préoccupé par l'avenir, car je sais que les universités québécoises s'y préparent.» En effet, elles développent des stratégies qui visent à assurer leur avenir. Lesquelles ?

1. Augmenter le nombre de programmes

Pour attirer les étudiants, les universités élargissent leur offre en proposant régulièrement de nouveaux programmes. «Ouvrir de nouvelles formations nous permet de satisfaire les besoins du marché et de rester en contact avec les employeurs», explique Lucie Laflamme, vice-rectrice aux études de l'Université de Sherbrooke.

À l'UQAM, entre huit et dix nouveaux programmes sont proposés à chaque rentrée. Cette année, un programme en design et un autre sur les systèmes informatiques embarqués ont vu le jour. «On se prépare à une éventuelle baisse du nombre d'étudiants surtout par le développement de nouveaux programmes qui vont attirer une nouvelle clientèle», explique Diane Demers, vice-rectrice au soutien académique et à la vie étudiante.

2. Développer la formation continue

L'autre voie explorée par les universités québécoises pour augmenter le nombre d'inscriptions tout en répondant à un besoin passe par la formation continue. L'apprentissage tout au long de la vie devient un incontournable. «Toutes les universités approfondissent la voie de la formation continue pour augmenter durablement leur clientèle», affirme Jean-Pierre Ouellet, vice- recteur à la formation et à la recherche de l'UQAR. Le campus de Longueuil de l'Université de Sherbrooke compte 6 000 personnes inscrites (sur 37 000 au total) et ne dispense que de la formation continue.

Les établissements répondent bien souvent aux besoins en formation continue du marché du travail par des programmes sur mesure financés par les entreprises ou organismes bénéficiaires. C'est le cas, entre autres, du Centre de perfectionnement de l'École de gestion John Molson de l'Université Concordia, qui offre notamment des formations sur mesure à des coûts oscillant entre 5 000 et 50 000 $ - pour trois jours de formation sur mesure pour une quarantaine de personnes.

Cette voie de développement est une façon pour les universités de diversifier une clientèle qui, elle, ne risque pas de diminuer au cours des prochaines années, de diversifier les sources de financement et de rester en contact avec le milieu du travail en général, et le secteur privé en particulier. À l'UQAM, la formation continue participe à hauteur d'environ 800 000 $ au budget de l'université, qui s'élève à environ 300 M$.

3. Délocaliser

Certaines universités choisissent la délocalisation pour aller au-devant des étudiants. L'objectif : garantir l'accessibilité géographique aux études supérieures et accroître les inscriptions. C'est le cas de l'UQAR, qui compte plus d'étudiants à son antenne de Lévis (2 943) que sur son campus originel à Rimouski (2 454) ! Elle a également des satellites en Beauce, sur la Côte-Nord, en Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent. L'UQAM est présente dans Lanaudière, à Laval et à Longueuil, où l'Université de Sherbrooke a également construit un campus il y a moins de deux ans. L'Université du Québec en Outaouais est, pour sa part, présente à Saint-Jérôme depuis 2004.

L'Université de Montréal a inauguré un campus moderne à Laval en septembre dernier. «Nous nous concentrons sur certains points de service ciblés pour répondre à des besoins spécifiques de formation», explique Guy Breton, recteur de l'Université, qui a aussi une antenne en médecine à Trois-Rivières et un programme de médecine vétérinaire à Saint-Hyacinthe.

Au final, les universités qui ouvrent des campus le font dans des bassins de population importants ou, dans certains cas, pour remplir leur mission de service public et répondre à un besoin spécifique d'une région, même si les effectifs ne sont pas très nombreux. Si plusieurs campus d'universités différentes se trouvent parfois sur les mêmes territoires, c'est parce que, d'une part, la demande est suffisamment forte pour assurer leur viabilité et parce que, d'autre part, ces campus n'offrent pas l'intégralité des programmes, mais se concentrent sur les formations qui comblent les besoins locaux.

4. Augmenter le nombre d'étudiants étrangers

Certaines universités comptent aussi sur l'accroissement du nombre des étudiants étrangers pour augmenter leur effectif. Leur stratégie : participer à des actions communes de représentation à l'étranger. Et ça marche ! Près d'un étudiant sur dix dans les universités québécoises n'est pas canadien (ni résident permanent), selon la CREPUQ. Le nombre d'étudiants étrangers a augmenté de 7,5 % entre 2010 et 2011. Le phénomène est particulièrement marqué aux cycles supérieurs.

L'Université Laval, à Québec, vise tout particulièrement les deuxième et troisième cycles. «Les cycles supérieurs sont plus porteurs quand on veut avoir des liens de recherche avec les autres universités à l'étranger. Quand un étranger retourne dans son pays, il devient un excellent partenaire de recherche», explique Nicole Lacasse, vice-rectrice aux études et aux activités internationales. L'Université mène de nombreuses actions pour se faire connaître à l'étranger, surtout en France, en Belgique, dans les pays du Maghreb et en Afrique francophone, où elle a un représentant permanent au Sénégal.

À l'ÉTS, qui n'ouvrait pas jusqu'alors sa formation d'ingénieurs aux étrangers au 1er cycle, cent places ont été ouvertes il y a deux ans pour des étudiants français issus d'établissements de formation comparables aux cégeps (les Instituts universitaires de technologie). L'UQAR compte aussi 400 étudiants étrangers attirés par des formations sur la nordicité ou sur les sciences de la mer. Quant à l'UQAM, qui compte 3 000 étudiants étrangers, elle est très active dans le domaine. Plusieurs missions de représentation étaient d'ailleurs en cours dans les Antilles françaises et au Maghreb à la mi-octobre.

PLUS D'ÉTUDIANTS, PLUS D'ARGENT

Les 18 universités québécoises ont commencé l'année scolaire avec une bonne nouvelle : le nombre d'étudiants inscrits a augmenté pour la troisième année consécutive. Selon les chiffres de la CREPUQ (Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec), ce nombre a crû de 2,7 % en moyenne entre l'automne 2010 et l'automne 2011. Certaines universités ont connu de fortes augmentations, comme l'UQAR (Université du Québec à Rimouski), qui enregistre une hausse de 7 %.

Si ces chiffres expriment le dynamisme des études supérieures au Québec, ils sont aussi salutaires pour les finances des universités, dont le sous-financement ne cesse d'être dénoncé, notamment par la CREPUQ, qui représente l'ensemble des établissements.

Au Québec, l'étudiant paie des droits de scolarité de 2 168 $ pour cette année scolaire, quel que soit le programme choisi. Le gouvernement provincial verse pour chaque étudiant inscrit une subvention complémentaire, qui varie selon les programmes. Par conséquent, plus les étudiants inscrits sont nombreux, plus les moyens financiers des établissements qui les accueillent sont importants.

LES UNIVERSITÉS EN CHIFFRES

NOMBRE D'ÉTUDIANTS

ÉCOLE POLYTECHNIQUE 6 946

BUDGET : 200 M$

UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL 63 935

BUDGET : 661,6 M$

UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE 22 131

BUDGET : 320,8 M$

UQAM 41 731

BUDGET : 397 M$

UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À RIMOUSKI 6 494

BUDGET : 71,8 M$

UNIVERSITÉ LAVAL 39 325

BUDGET : 470 M$

UNIVERSITÉ MCGILL 38 000

BUDGET : 670 M$

17 050 Nombre d'étudiants étrangers inscrits dans les universités québécoises en 2010. Ils devraient être 25 030 en 2025. Source : Ministère de Éducation, du Loisir et du Sport

À la une

Les profits d’Alphabet bondissent

25/04/2024 | AFP

La maison mère de Google a été portée par la publicité, le cloud et l’IA.

Microsoft fait mieux que prévu au premier trimestre

25/04/2024 | AFP

Dans les échanges électroniques postérieurs à la clôture de la Bourse, l’action Microsoft gagnait près de 5%.

Les prévisions d’Intel déçoivent

25/04/2024 | AFP

Les prévisions pour la période en cours ont hérissé le marché.