Leaders, vous nuisez à la santé mentale des employés!

Publié le 09/05/2023 à 07:27

Leaders, vous nuisez à la santé mentale des employés!

Publié le 09/05/2023 à 07:27

Par Olivier Schmouker

La plupart des styles de leadership ont un impact négatif ou mitigé sur la santé mentale des employés. (Photo: Jehyun Sung pour Unsplash)

MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudisVous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca

Q. – «Ma boss est sûrement bien intentionnée, mais à force de donner la priorité à “l’harmonie” et au “bien-être” de tout un chacun, elle en oublie de reconnaître la performance et les efforts de ceux qui, comme moi, donnent leur 110% tous les jours. Ça me donne envie de tout laisser tomber. Ça m’horripile tellement que j’en deviens irritable au bureau et que j’en perds le sommeil…» – Dany

R. – Cher Dany, vous aimeriez être reconnu à votre juste valeur au travail, mais votre boss semble préférer saluer le collectif plutôt que l’individuel. Et vous en souffrez en silence, en présentant – je ne veux pas vous inquiéter, juste vous informer – des symptômes que l’on retrouve lorsque les gens tutoient l’épuisement professionnel (burnout, en anglais).

Mine de rien, vous venez de mettre le doigt sur un problème auquel s’intéressent de plus en plus de chercheurs: l’impact des leaders sur la santé mentale des membres de l’équipe dont ils ont la responsabilité. Un problème d’autant plus grave que les récentes découvertes à ce sujet tendent à montrer que, la plupart du temps, cet impact est… négatif. Voire dramatique. Explication.

Diego Montano est chercheur en médecine à l’Université de Tübingen, en Allemagne. Avec son équipe, il a effectué la méta-analyse de 53 études récentes sur l’impact des leaders sur la santé mentale des employés. Le premier point qui en ressort, c’est qu’on peut identifier sept styles de leadership auxquels recourent la plupart des leaders d’aujourd’hui:

– Le transformateur. Charismatique, il influence, inspire et stimule. Il tient compte des besoins de chacun.

– Le transactionnel. Il sait récompenser le travail effectué, rectifier le tir lorsqu’il est encore temps et tirer des leçons des erreurs commises.

– L’absent. Adepte du laissez-faire, il brille par son absence, évite de prendre des décisions et hésite à passer à l’action.

– L’individualiste. À ses yeux, l’individu prime toujours. Chacun est donc responsable des résultats qu’il affiche. Chacun doit directement en référer à lui, sans passer par quiconque d’autre.

– Le destructeur. Agressif, il a un comportement potentiellement dangereux envers ses subalternes. Ses ordres peuvent aller jusqu’à nuire aux intérêts de l’organisation, si cela lui chante.

– Le relationnel. Respectueux des autres, il agit comme un indéfectible soutien. Il sait résoudre les conflits.

– Le pragmatique. Il sait répartir les tâches avec justesse, évaluer la performance des uns et des autres ainsi qu’atteindre l’objectif visé.

Dany, je suis sûr que vous retrouverez dans cette liste le style de leadership de votre boss. Peut-être, au besoin, en en combinant deux d’entre eux. A priori, j’y irais avec un style du genre «absent/relationnel», qu’en pensez-vous?

Poursuivons. Diego Montano et son équipe ont ensuite évalué l’impact de ces différents styles de leadership sur la santé mentale des employés.

Résultats? Tous les styles ont un impact soit «négatif», soit «mitigé», hormis deux:

– Sans surprise, le style «destructeur» a un impact «hyper négatif» sur la santé mentale de ceux qui doivent le subir au quotidien.

– Le style «transformateur» a, lui, un impact «franchement positif». Et ce, en raison du fait que de tels leaders inspirent les autres grâce à leur vision de l’avenir, encouragent les membres de l'équipe à faire preuve d’initiative et savent adapter leur approche aux besoins particuliers de chaque employé.

Autrement dit, tous les leaders d’aujourd’hui ont un impact négatif, ou à tout le moins mitigé, sur la santé mentale des employés. Oui, tous, à l’exception notable de ceux qui agissent comme des transformateurs.

Convient-il de désespérer face à un tel constat? D’enfoncer le clou en soulignant que cela n’est guère surprenant, lorsqu’on sait que la raison principale invoquée par les employés qui démissionnent est presque toujours «C’est à cause de mon boss…»?

Non, car l’étude de Diego Montano et son équipe laisse poindre de l’espoir.

Par exemple, elle indique que les organisations devraient faire une priorité de réorienter le style de leurs gestionnaires vers le style «transformateur». Pour cela, il existe nombre de programmes de formation et autres coachs spécialisés.

Autre exemple: les organisations pourraient veiller à éliminer les comportements toxiques de leurs gestionnaires. C’est-à-dire les comportements qui correspondent à certains styles de leadership, en particulier celui dit «destructeur»: agressivité, égoïsme, etc.

À noter que l’étude a également découvert qu’il était, en général, «plus efficace» de chercher à corriger le style des leaders en place que de proposer aux employés différents programmes de bien-être et autres cours de pleine conscience. Car cela permet de s’attaquer au problème à sa racine principale.

Bon. Revenons à votre boss, Dany. Que faire quand le leader est «absent/relationnel» quand l’un des membres de son équipe est, disons, «individualiste» (n’hésitez pas à me corriger si je me trompe)? L’idée, me semble-t-il, est de trouver un terrain d’entente entre les deux. Ce qui signifie qu’il vous fait faire un pas vers le style «absent/relationnel», par exemple en pensant davantage collectif que vous ne le faites habituellement. Et la concernant, qu’il lui faut tendre vers le style «transformateur», lequel lui permettra notamment de mieux saisir votre besoin insatisfait de reconnaissance.

Bref, faites un pas vers elle, invitez-la à en faire tout autant, par exemple en s’informant sur cette étude de Diego Montano dont vous avez entendu parler. Et il se pourrait que cela aille mieux à l’avenir, pour vous comme pour elle.

En passant, l’ex-dirigeant d’équipe cycliste Cyrille Guimard aime à dire: «Bousculer les habitudes, c’est encore le meilleur moyen de faire évoluer les choses».

 

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