Climat et conflits: 2024 débute dans le rouge pour les céréales

Publié le 03/01/2024 à 12:22, mis à jour le 03/01/2024 à 12:26

Climat et conflits: 2024 débute dans le rouge pour les céréales

Publié le 03/01/2024 à 12:22, mis à jour le 03/01/2024 à 12:26

Par AFP

En blé, les échanges sont et devraient rester dominés par la Russie, même si sa récolte 2024 s'annonce moins fabuleuse que la précédente. (Photo: 123RF)

L'année 2024 s'est ouverte avec de premières cotations en baisse pour les céréales: plus que jamais, les risques climatiques conjugués à la multiplication de conflits, de l'Ukraine à la mer Rouge, promettent une année d'incertitudes sur les marchés mondiaux agricoles.

Le marché retrouve le niveau de prix de début 2021, avec une tonne de blé autour des 220 euros sur Euronext, bien avant le début de l'invasion russe de l'Ukraine.

«On partait de niveaux élevés», dans la foulée d'une première hausse des cours liée à la crise sanitaire de la COVID puis des «montagnes russes» du printemps 2022, rappelle Gautier Le Molgat, PDG d'Argus Media France.

La chute a toutefois été sévère en 2023, relève-t-il: «sur un an, le blé s'est replié de 28% sur Euronext et de 21% à la Bourse de Chicago». Le maïs a quant à lui perdu plus de 30% sur ces marchés, tandis que le colza et le soja, des oléagineux essentiellement transformés en agrocarburants, ont reflué de 25%.

Ce déclin des prix a permis aux pays importateurs de revenir aux achats, sans que la sécurité alimentaire des États fragiles ne s'améliore pour autant, notamment dans la Corne de l'Afrique, en proie à une sécheresse persistante.

 

«Soulagement ou misère»

En blé, les échanges sont et devraient rester dominés par la Russie, même si sa récolte 2024 s'annonce moins fabuleuse que la précédente. Mais si les réserves de céréales restent confortables au niveau mondial, les disparités régionales sont fortes et tout pourrait se détraquer très vite, estiment plusieurs analystes et courtiers.

Au premier rang des risques figurent les conditions météorologiques extrêmes, qui pèsent à la fois sur les récoltes et sur les transports, selon une note d'analyse de la banque UBS, qui souligne que «selon l'endroit où vous vivez, le phénomène météorologique El Niño [pourra] être source de soulagement ou de misère».

Ainsi, le risque accru de sécheresse va peser sur l'Asie du Sud-Est, sur l'Inde et l'Australie notamment, où la récolte de blé est attendue en repli de 37% en 2023-2024, selon les prévisions officielles; en revanche, après deux années très difficiles, l'Argentine devrait voir bondir de 60% sa production de maïs, à 55 millions de tonnes.

L'attention pour le maïs et le soja est tournée vers l'hémisphère sud, en particulier vers le Brésil, où l'on mesure encore mal les conséquences du manque de pluie dans le Mato Grosso, principale région productrice de soja, note Dax Wedemeyer de US Commodities.

Les retards de la récolte du soja et donc des semis réalisés dans la foulée de la «safrinha», la seconde et plus importante récolte de grain jaune au Brésil, récemment devenu le premier exportateur mondial, pourraient peser sur le marché.

 

«Troubles géopolitiques»

Ces risques climatiques ont un coût de plus en plus élevé, comme le souligne une note de perspective d'Everstream Analytics: alors que «dans les années 80, les États-Unis étaient confrontés à un événement météo d'un coût d'un milliard de dollars américains tous les quatre mois», c'est aujourd'hui «toutes les trois semaines».

Autre conséquence directe du climat, la restriction de circulation dans le canal de Panama, par lequel transite 6% du commerce maritime international, du fait d'un trop faible tirant d'eau.

À cette donnée climatique s'ajoutent, pour les transports, les risques géopolitiques: la multiplication des attaques menées par des rebelles yéménites en mer Rouge, dans une zone qui voit passer 12% du commerce maritime mondial, a conduit à une hausse brutale du coût du fret.

Mercredi, le français CMA-CGM a ainsi annoncé le quasi-doublement de ses tarifs de fret à partir du 5 janvier pour les échanges entre l'Asie et la Méditerranée.

Cette hausse du coût des transports «va être transférée au consommateur, ce qui signifie une demande plus faible. Cela augmente les chances d'une récession mondiale», estime Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Consulting.

Pour la banque UBS, «troubles géopolitiques" et "protectionnisme commercial», à l'instar des restrictions à l'exportation pour le riz indien, sont, après le climat, les deux risques majeurs à surveiller pour 2024.

Certains analystes, comme Dewey Strickler, d'Ag Watch market Advisors, s'interrogent désormais sur «la possibilité que Pékin, avant l'élection américaine de novembre, intente une action pour réintégrer Taïwan à la Chine».

 

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