Votre entreprise est-elle prête au retour de Donald Trump?


Édition du 08 Novembre 2023

Votre entreprise est-elle prête au retour de Donald Trump?


Édition du 08 Novembre 2023

Par conséquent, si Donald Trump reprend le pouvoir, il pourrait imposer de nouveaux tarifs douaniers sur certaines importations canadiennes, comme l’acier et l’aluminium, même si nous avons un accord de libre-échange avec les États-Unis. (Photo: 123RF)

ANALYSE GÉOPOLITIQUE. Ce scénario est de plus en plus plausible: l’ex-président américain Donald Trump remporte l’investiture républicaine, puis gagne l’élection présidentielle en novembre 2024. Sa victoire aurait à nouveau une incidence sur nos entreprises qui exportent aux États-Unis. Votre organisation est-elle prête au retour du protectionnisme ? 

Décortiquons d’abord la première étape qui peut mener à nouveau Donald Trump à la Maison-Blanche, soit la primaire à l’investiture républicaine, qui va s’accélérer au début de 2024. 

Le 25 octobre, il recueillait 57,6 % des appuis des électeurs républicains, devançant de très loin de son plus proche rival, le gouverneur de la Floride, Ron DeSantis, à 15,1 %, selon la firme d’analyse FiveThirtyEight. 

En fait, l’appui à Donald Trump est plus élevé que la somme des huit autres candidats républicains (38,3 %), dont l’ex-vice-président, Mike Pence (3,4 %), et l’ex-gouverneure de la Caroline du Sud, Nikki Haley (7,9 %). 

Aussi, à moins d’un revirement spectaculaire, on voit mal comment Donald Trump pourrait ne pas remporter l’investiture républicaine. 

Analysons maintenant la seconde étape, l’élection présidentielle en 2024. Là aussi, Donald Trump semble avoir un avantage sur le président démocrate sortant, Joe Biden, selon FiveThirtyEight. 

 

Trump vainqueur, selon plusieurs sondages

Par exemple, sur 27 sondages réalisés entre le 11 et le 23 octobre, l’ex-président républicain recueille la majorité des voix à 14 reprises, tandis que son opposant démocrate est en avance 8 fois — ils sont à égalité dans cinq sondages. 

Bien entendu, tout est encore possible d’ici novembre 2024, et Joe Biden peut donc fort bien gagner la course à la Maison-Blanche. 

En fait, la principale inconnue demeure l’effet qu’aura la candidature d’un candidat indépendant à la présidence, soit celle de Robert F. Kennedy Junior, le fils de l’ex-sénateur démocrate Robert F. Kennedy, assassiné comme son frère John F. Kennedy dans les années 1960. 

Les analystes se posent la question : cet avocat spécialisé en environnement — antivaccin et partisan de théories conspirationnistes, selon la radio publique américaine NPR — prendra-t-il davantage des voix aux démocrates ou aux républicains ? 

Plusieurs pensent qu’il pourrait avoir un effet comme en 1992, quand le candidat indépendant Ross Perot avait récolté 18,9 % du suffrage lors de l’élection présidentielle. 

Ce milliardaire texan avait croisé le fer avec le président républicain sortant George H.W. Bush et l’ex-gouverneur démocrate de l’Arkansas Bill Clinton. Ce dernier a remporté l’élection avec 43 % des voix, suivi par le président sortant à 37,5 %. 

Quatre ans plus tôt, en 1988, George H.W. Bush avait pourtant été élu avec un score de 54,4 %. 

Dans ce contexte, la stratégie la plus avisée pour les entreprises canadiennes consiste à prévoir une victoire de Donald Trump dans un an, et de commencer dès maintenant, si c’est possible, à se préparer à la montée du protectionnisme aux États-Unis.

« Prepare for the worst, hope for the best », dit l’adage anglophone. Comment ? En tentant d’imaginer les gestes que pourrait poser une nouvelle administration Trump.

Sa marge de manœuvre serait bien entendu liée à la composition des deux chambres du Congrès — actuellement, les démocrates contrôlent le Sénat, tandis que les républicains dominent la Chambre des représentants.

 

Tarifs et barrières non tarifaires

Le protectionnisme prend toujours deux formes : l’imposition de tarifs douaniers ou la création de barrières non tarifaires, comme des exigences de contenu local ou des normes dissuasives.

Aux États-Unis, le protectionnisme s’incarne avant tout dans les mesures dites du « Buy American » et du « Buy America ».

La première favorise les achats de biens du gouvernement fédéral destinés à l’usage public (articles, matériaux ou fournitures) dont la valeur est supérieure au seuil des microachats. La seconde favorise le contenu local dans les projets de transport public.

Par conséquent, si Trump reprend le pouvoir, il pourrait imposer de nouveaux tarifs douaniers sur certaines importations canadiennes, comme l’acier et l’aluminium, même si nous avons un accord de libre-échange avec les États-Unis.

Il pourrait aussi mettre en place de nouvelles barrières non tarifaires, comme une hausse des seuils de contenu américain dans les achats du gouvernement fédéral, incluant le financement pour le transport en commun.

 

Deux options pour s’adapter

Nos entreprises qui ne veulent pas délaisser le marché américain ont peu d’options pour s’adapter à une éventuelle nouvelle vague de protectionnisme aux États-Unis.

Celles qui ont déjà des usines au sud de la frontière pour desservir en partie le marché américain peuvent y accroître leur production, ce qui réduit la nécessité d’exporter aux États-Unis à partir de leurs usines au Canada.

Elles réduiraient ou élimineraient ainsi l’effet de nouveaux tarifs ou de nouvelles barrières non tarifaires.

Nos entreprises peuvent aussi améliorer leur efficacité, en réduisant au maximum leurs coûts par unité de production ou en faisant plus avec moins, grâce à de nouvelles technologies.

Elles se doteraient ainsi d’une nouvelle marge de manœuvre financière pour absorber par exemple des hausses de tarifs dans leur secteur.

Et si Trump n’est finalement pas élu ?

Si votre organisation s’est préparée au pire en augmentant sa production aux États-Unis (voire en y implantant une nouvelle usine) ou en faisant des gains d’efficacité, elle sera mieux positionnée et plus compétitive pour vendre ses produits sur le marché américain.

À propos de ce blogue

Dans son analyse Zoom sur le monde, François Normand traite des enjeux géopolitiques qui sont trop souvent sous-estimés par les investisseurs et les exportateurs. Journaliste au journal Les Affaires depuis 2000 (il était au Devoir auparavant), François est spécialisé en commerce international, en entrepreneuriat, en énergie & ressources naturelles, de même qu'en analyse géopolitique. François est historien de formation, en plus de détenir un certificat en journalisme de l’Université Laval. Il a réussi le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) de l’Institut canadien des valeurs mobilières et il a fait des études de 2e cycle en gestion des risques financiers à l’Université de Sherbrooke durant 15 mois. Il détient aussi un MBA de l'Université de Sherbrooke. François a réalisé plusieurs stages de formation à l’étranger: à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France (1996); auprès des institutions de l'Union européenne, à Bruxelles (2002); auprès des institutions de Hong Kong (2008); participation à l'International Visitor Leadership Program du State Department, aux États-Unis (2009). En 2007, il a remporté le 2e prix d'excellence Caisse de dépôt et placement du Québec - Merrill Lynch en journalisme économique et financier pour sa série « Exporter aux États-Unis ». En 2020, il a été finaliste au prix Judith-Jasmin (catégorie opinion) pour son analyse « Voulons-nous vraiment vivre dans ce monde? ».

François Normand

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