Le Cirque Éloize met le cap sur l'Asie et l'Amérique latine

Publié le 14/01/2012 à 00:00, mis à jour le 17/01/2012 à 12:04

Le Cirque Éloize met le cap sur l'Asie et l'Amérique latine

Publié le 14/01/2012 à 00:00, mis à jour le 17/01/2012 à 12:04

Par François Normand

Après avoir roulé sa bosse en Amérique du Nord et en Europe, le Cirque Éloize se développera surtout en Asie et en Amérique du Sud dans les prochaines années.

Le producteur de spectacles multidisciplinaires (arts du cirque, musique, danse, théâtre) établi à Montréal n'est pas en terrain inconnu : dans le passé, il a notamment présenté quelques spectacles au Brésil, en Argentine, en Chine et en Corée du Sud. Mais aujourd'hui, le dynamisme économique de l'Asie et de l'Amérique du Sud fait en sorte que ces régions sont beaucoup plus intéressantes pour le producteur de spectacles.

«On sent qu'il y a un intérêt accru pour des produits culturels comme le nôtre. Nous recevons beaucoup de demandes pour nous produire dans ces pays», raconte Christine Mariano, vice-présidente au développement des affaires de l'entreprise fondée en 1993.

Des classes moyennes assoiffées de culture

Renaud Legoux, expert en marketing à HEC Montréal, souligne que l'Asie et l'Amérique du Sud sont des marchés intéressants pour la PME en raison de l'émergence d'une classe moyenne. «Il y a beaucoup de consommateurs à la recherche de divertissements», dit-il.

Pour croître sur ces deux continents, le Cirque Éloize s'appuiera à court terme sur deux spectacles : ID, qui roule depuis un an et demi, et un nouveau spectacle, qui sera lancé à l'automne 2012. Dans cinq ans, la PME prévoit faire tourner quatre spectacles simultanément autour du monde, dont en Asie et en Amérique du Sud. De plus, les tournées seront plus longues.

Des spectacles de plus grande envergure

Le cirque songe aussi à donner des prestations sous des chapiteaux, comme le fait le producteur de spectacles équestres Cavalia. Il pourrait même offrir des spectacles permanents comme le Cirque du Soleil. «Nous regardons toutes les possibilités pour livrer nos oeuvres», dit Christine Mariano.

Cette nouvelle stratégie internationale est en grande partie possible grâce à l'investissement du Cirque du Soleil à hauteur de 50 % du capital-actions du Cirque Éloize, en 2011. «Avec ce partenariat, le Cirque Éloize s'est donné les moyens de ses ambitions», souligne Renaud Legoux.

Un partenariat qui créera toutefois des situations délicates : parfois, les deux cirques québécois seront en concurrence dans certaines villes, surtout s'il s'agit de petits marchés comme Montréal. Comme les consommateurs ont des moyens financiers limités, ils devront souvent faire des choix. Les deux entreprises tenteront de réduire ce risque de «cannibalisation» en coordonnant, par exemple, davantage le calendrier de leurs tournées mondiales respectives. Le recrutement et la rétention de ses artistes sont aussi un enjeu pour le Cirque Éloize.

S'appuyer sur les promoteurs

Pour présenter ses créations, le Cirque Éloize continuera de s'appuyer sur les promoteurs. «Ce sont eux qui achètent nos créations et qui en font ensuite la promotion dans les marchés locaux», dit Christine Mariano.

En Corée du Sud, où le Cirque Éloize a déjà présenté quatre spectacles, son partenaire clé est Credia Arts Management. Il est en discussion avec de futurs partenaires en Amérique du Sud.

La PME devra aussi en trouver un de confiance en Chine, où les arts du cirque sont une institution depuis des siècles. «Nous nous démarquerons avec une nouvelle forme de cirque, dit Sylvie Baumann, directrice au développement international. C'est le moment d'attaquer ce marché.» En mai 2010, le Cirque Éloize avait donné une prestation en Chine, à l'Exposition universelle de Shanghai.

Michel Archambault, titulaire de la Chaire en tourisme Transat à l'ESG UQAM, estime que le Cirque Éloize a un bel avenir en Asie en raison du dynamisme de la région. «Même un pays comme le Japon, dont l'économie stagne depuis une décennie, offre des occasions d'affaires.»

Le Cirque continuera de se développer en Amérique du Nord et en Europe. Ces marchés sont très concurrentiels, surtout l'Europe, selon Sandeep Bhagwati, expert en arts à l'Université Concordia. «Les arts de la scène sont très subventionnés. Les Européens sont habitués à des spectacles exceptionnels, même dans les petites villes. Pour se démarquer, les troupes étrangères doivent présenter des créations de très grande qualité.»

LES RISQUES DU CIRQUE ÉLOIZE

Risque financier

Le Cirque Éloize évolue dans une industrie où les risques financiers sont importants, selon Renaud Legoux, expert en marketing à HEC Montréal. Le producteur de spectacles doit investir beaucoup de temps et d'argent pour créer un spectacle, notamment à partir des revenus de commandites (ils peuvent représenter jusqu'à 15 % du financement). Or, le Cirque n'engrange la plupart de ses premiers revenus qu'à partir du soir de première. Et si un événement venait perturber la tournée, par exemple, un accident de transport tuant des artistes, l'entreprise et le promoteur perdraient des revenus. C'est pourquoi les institutions financières seraient frileuses en matière de financement des entreprises culturelles, selon Renaud Legoux. «Si un problème financier survient, quels actifs la banque va-t-elle saisir ?»

Risque d'affaires

Le Cirque Éloize est sollicité de toutes parts. Aussi court-il le risque de choisir un marché où la demande locale est moins forte qu'il n'était prévu, souligne Christine Mariano, vice-présidente au développement des affaires du Cirque Éloize. «La qualité de la création n'est pas en cause, c'est plutôt une question de mauvais timing.» Pour limiter ce risque, le Cirque a des contacts réguliers avec ses promoteurs. Il peut par exemple suspendre une tournée dans un pays en raison du mauvais climat économique, comme il l'a fait en Espagne. «En 2010 et 2011, nous avons cessé de nous produire dans ce pays. Les budgets des théâtres avaient été coupés en raison de la récession», dit Sylvie Baumann, directrice au développement international du Cirque Éloize. Pourtant, en 2009, la troupe québécoise avait présenté des spectacles dans une douzaine de villes espagnoles. Le cirque pourrait revenir dans ce marché. «Nous allons surveiller de près la situation en 2012 et en 2013», précise-t-elle.

1 000

Nombre approximatif de cirques actifs en Europe en 2007. Aux États-Unis, il n'y en avait que 31. Sources : European Circus Association et McClatchy-Tribune Information Services

10 000 000$

Chiffre d'affaires du Cirque Éloize en 2011

Les propriétaires du Cirque Éloize

50 % Cirque du Soleil

50 % Productions Éloize¹

¹ Le pdg du Cirque Éloize, Jeannot Painchaud, est l'actionnaire majoritaire de cette société de portefeuille.

À ce jour, le Cirque Éloize...

compte

7 productions originales à son actif

a visité

31 pays sur tous les continents, sauf l'Afrique

a donné près de

4 000 représentations

s'est produit dans quelque

395 villes

Source : Cirque Éloize

Dans cette série, nous décodons la stratégie internationale d'une entreprise québécoise et analysons ses risques.

Sur le Web, Les Affaires s'associe à L'actualité, Canadian Business, The Report on Business, The Economist Intelligence Unit et à la banque HSBC pour offrir un site axé sur les exportations. À lire sur affairessansfrontieres.ca.

François.Normand@transcontinental.ca

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