Comment trouver une idée : les secrets des pros

Publié le 19/05/2012 à 00:00

Comment trouver une idée : les secrets des pros

Publié le 19/05/2012 à 00:00

Cirque Éloize

«Les idées peuvent surgir à tout moment, souvent en déplacement. Ce qui est fondamental, c'est de me mettre en condition d'écoute, de réceptivité, d'ouverture, presque dans un état de méditation. C'est un peu l'équivalent de la visualisation, bien connue des sportifs, des acrobates, même de ceux qui ont à faire un discours. Je m'installe et je fais le vide pour laisser de la place aux idées qui vont éventuellement arriver. Ça ne signifie pas qu'il faille forcément que je sois seul, isolé. J'ai appris à faire abstraction de ce qui m'entoure pour entrer dans ma bulle et résoudre un problème. Il y a également des contextes plus propices que d'autres : le silence absolu tout comme le brouhaha, le trafic, la foule sont des environnements favorables. Une idée peut aussi être dans l'air du temps. Et là, le défi est d'être le premier à la sortir tout en la traitant de la meilleure des façons.

«Je mets toujours mes idées à l'épreuve. L'air de rien, j'en place une dans une conversation avec des gens qui ont une certaine sensibilité, mais qui ne font pas le même métier que moi. J'attends leur réaction. Quand je suis convaincu par une idée, mais qu'elle ne trouve pas d'écho, j'élargis le cercle. Parfois, ce n'est pas l'idée elle-même qui n'est pas bonne, mais la manière de la présenter. Parfois, ce n'est juste pas le bon moment, ou je n'ai pas moi-même la maturité ou les moyens de la faire naître. Les idées viennent et repartent. Il ne faut pas hésiter à les laisser mûrir. Ne pas hésiter non plus à les abandonner. Ça demande de mettre son ego de côté et d'avoir assez d'humilité et de lucidité pour tout arrêter.»

- Jeannot Painchaud, président, directeur général et artistique du Cirque Éloize

Moment Factory

«Nous trouvons nos idées en gardant les yeux aussi ouverts que possible, en tout temps. Dans la rue, dans les transports en commun, dans les livres d'architecture, sur Internet, en écoutant de la musique... Nous observons la lumière dans les espaces publics, la scénographie, les éléments graphiques de publicité, , les motifs de tissus... La créativité, ce n'est pas " tu appuies sur un bouton et tu es créatif ". C'est vraiment un processus bizarre. Ça prend du temps ; il faut rêvasser et travailler de longues heures, puis tout d'un coup, quelque chose de fort émerge.

«L'idée est bonne quand nous ne pouvons plus arrêter d'y penser, même dans notre sommeil. On l'évalue en la communiquant à d'autres. Quand les gens font wow ! et qu'ils comprennent instinctivement comment notre idée fonctionne et ce qu'elle apporte de neuf à leur existence, on se dit qu'on tient quelque chose.»

- L'équipe d'artistes de Moment Factory, studio spécialisé dans la conception et la production d'environnements multimédias

Dufour, spectacles et images

«Un créateur trouve le germe qui contaminera d'autres créateurs et qui, de là, deviendra une vraie idée. Au départ, c'est incomplet ; je commence par avoir une émotion, une idée un peu abstraite, née dans la douche ou au volant. C'est facile d'avoir une idée, mais concevoir une idée réalisable, qui raconte quelque chose dans le temps, on y arrive rarement seul. Je sais qu'une idée est bonne quand elle génère une émotion forte chez moi et que j'ai le goût de la défendre. Je passe beaucoup plus de temps à trouver comment donner vie à une idée qu'à en chercher.»

- Olivier Dufour, président, Dufour, spectacles et images

Ubisoft

«Nous sommes influencés par tout ce qui nous entoure, par plusieurs milieux, réels ou fictifs : le cinéma, la télévision, la littérature, l'histoire, le design, la mode, l'architecture. Ubisoft Montréal crée des jeux interactifs : dans ce contexte, le processus d'idéation se précise au fur et à mesure de son développement. À ce stade, nous puisons évidemment dans nos expériences respectives en tant que gamers, mais aussi dans toute l'expertise du studio. Parfois, nous développons des idées extrêmement intéressantes, mais qu'il nous est impossible d'intégrer dans le produit final. Elles tendent à resurgir dans le développement de projets subséquents. Trop souvent, des idées sont freinées avant même d'avoir atteint un stade d'aboutissement mature, ce qui peut contraindre la créativité. Une fois l'idée formulée, elle est validée auprès de différents métiers au sein de l'équipe, du studio et de l'entreprise. Heureusement, la direction d'Ubisoft Montréal laisse une grande place à la créativité, et c'est selon moi une de nos forces. Tout au long de ce processus, nous devons penser aux fans et nous assurer que l'idée retenue apporte une réelle valeur à l'expérience de jeu. Pour ce faire, nous entrons en communication avec les joueurs de diverses façons afin d'entamer un dialogue. Le marché d'aujourd'hui est concurrentiel et, au final, ce sont eux qui font le succès d'un jeu.»

- Sébastien Roy, directeur de marque, Far Cry 3, chez l'éditeur de jeux vidéo Ubisoft

Groupe Le Massif

«Pour le projet du Massif, nous avons opté pour une démarche qui nous a amenés à rêver de tous les possibles, ce qui, à mon sens, est à la base de la création. Nous avons colligé différentes inspirations issues de nos rencontres et de nos voyages et, en parallèle, nous avons réuni des gens provenant de tous les horizons (des gens d'ici et d'ailleurs; des artistes, hommes d'affaires, restaurateurs ou créateurs). Cela nous a permis de mettre sur pied des cellules de création, qui nous ont conduits à imaginer ce que nous voulions bâtir comme destination. Après avoir fait émerger des idées, nous avons pris le temps de les décanter pour ensuite mieux les trier et les bonifier. Pour moi, le processus de création est foncièrement itératif. Et l'essentiel demeure de ne pas se censurer et toujours se permettre de rêver. Ensuite, c'est en se rattachant à nos valeurs que nous sommes en mesure de cerner si une idée vaut la peine d'être poussée plus loin ou non. Par exemple, dans mon cas, l'attachement à l'endroit - Charlevoix - m'a amené à faire certains choix et à vouloir donner quelque chose qui constituera un plus pour la communauté et les générations futures...»

- Daniel Gauthier, président du Groupe Le Massif, vaste projet récréotouristique dans Charlevoix

L'architecte Pierre Thibault

«Nos vies vont vite et nos journées sont hachurées. Or, ce n'est pas quand on est coincé qu'on a des idées. J'en ai quand je me donne du temps. Les voyages et les marches dans la nature offrent des occasions formidables de prendre du recul. Quand je vais à ma maison de campagne, je me débranche de tout et je deviens alors sensible à ce qui m'entoure, disponible. Ce que j'observe m'amène à faire des associations avec les projets sur lesquels je travaille. Tout le monde pense qu'en allant vite on en fait plus, mais pour les idées, il faut ralentir. Si on va vite, on fera ce qu'on a l'habitude de faire. Je sens que j'ai une bonne idée quand je suis surpris, puis émerveillé. Quand on a bien préparé son jardin, les idées peuvent venir assez spontanément.»

- Pierre Thibault, l'un des architectes canadiens ayant récolté le plus de prix internationaux.

Cirque du Soleil

«C'est un amalgame de contenus que l'on voit, que l'on entend, que l'on ressent, qui nous inspirent et que l'on transforme en quelque chose de nouveau. "Le nom du plus grand des inventeurs : hasard", disait Mark Twain. Nous devons être réceptifs aux coïncidences créatives. Par le remue-méninges et l'exploration, des liens surgissent entre les idées, favorisent la créativité et débouchent sur de nouvelles formes d'expression artistique. C'est ainsi que les idées mûrissent, se raffinent et prennent corps petit à petit. Au Cirque du Soleil, l'idée devient vite une oeuvre collective.

«Au début du processus de création, aucune idée n'est mauvaise. Mais le temps agit comme un filtre naturel ; au fur et à mesure que les idées sont confrontées entre elles, les moins prometteuses s'éliminent d'elles-mêmes. L'émotion et le frisson - ce que nous appelons le "facteur wow" - deviennent alors des instruments de mesure.»

- Jean-François Bouchard, vice-président, création et développement, du Cirque du Soleil

Beenox

«La recette pour avoir des idées, c'est de penser en fonction de l'objectif à atteindre, jamais en fonction des obstacles. Trop de gens regardent leurs moyens et ce qu'ils font déjà dans le but de trouver des idées, mais ces idées restent souvent à l'intérieur de ce que l'on connaît déjà ! Avec cette philosophie, les gens se créent des limites. Si on se donne des objectifs, que l'on réfléchit sans se mettre de limites, on se surprend et on accomplit de grandes choses. Je pense toujours sans contrainte ! Quelle est la direction à prendre, la prochaine étape à franchir ? Si j'avais une baguette magique, quel serait mon objectif ? C'est en se posant ces questions-là que l'on trouve des idées nouvelles aptes à aplanir les obstacles. C'est aussi à ce moment que l'on prend conscience de ce que l'on peut réellement accomplir comme personne ou comme entreprise ! C'est ma méthode. Quand on pense de cette manière, on sort de notre zone de confort, et les idées auxquelles on n'a jamais pensé peuvent naître et prendre vie.

«Une bonne idée est une idée qui répond à son objectif ! L'idée qui va nous amener plus loin comme entreprise et qui va nous pousser à nous dépasser pour créer quelque chose que l'on croyait impossible de prime abord ! C'est ça, une bonne idée, et c'est de cette manière que l'on garde une longueur d'avance sur la concurrence !»

- Dominique Brown, pdg,de l'éditeur de jeux vidéo Beenox

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