Comment Eric La Flèche compte imposer la marque Metro en Ontario

Publié le 15/11/2008 à 00:00

Comment Eric La Flèche compte imposer la marque Metro en Ontario

Publié le 15/11/2008 à 00:00

[Photo : Gilles Delisle]

Les géants de l'alimentation se livrent une guerre sans merci en Ontario. Comment Metro pourra-t-elle réussir à imposer sa marque dans ce marché très concurrentiel, où Wal-Mart et Loblaw se font la lutte en coupant les prix et en ouvrant des mégasurfaces de l'alimentation ?

" Nous ne sommes pas directement en concurrence avec ces supermagasins. Ces groupes misent sur des succursales situées en banlieue, alors que nos épiceries sont en pleine ville ", affirme Eric R. La Flèche, président et chef de la direction de Metro, qui célébrera prochainement son premier anniversaire à la tête de l'entreprise.

Unification des bannières

Annoncée en août, la première étape de la stratégie du nouveau patron consiste à regrouper des bannières en Ontario.

Les consommateurs qui magasinaient chez A&P, Dominion, Loeb, Ultra et Barn devront donc s'habituer à faire leurs emplettes sous une nouvelle enseigne : Metro. À la fin de cette opération de 15 mois, en 2010, Metro sera la plus importante bannière en Ontario.

" Depuis que nous avons acquis A&P il y a trois ans, le gros de nos efforts a porté sur la conversion de la plateforme informatique. Nous avons heurté quelques écueils, comme c'est souvent le cas dans ce genre d'exercice, mais là, ça y est ", dit M. La Flèche.

Le successeur de Pierre H. Lessard, qui a transformé l'entreprise durant son règne de plus de 15 ans, est lui aussi très bien vu dans l'industrie.

" Le dauphin de M. Lessard est très fort, soutient Martin Dufresne, gestionnaire de portefeuilles chez Fiera Capital. Il est aussi ferré dans les détails de mise en marché d'un bon épicier que dans les exigences financières d'une entreprise inscrite en Bourse. "

Pas étonnant que les analystes soient enthousiastes. Avec un gain de 20 % en 2008, le titre de Metro affiche le rendement le plus élevé de l'indice S&P/TSX, après ceux de la Banque Laurentienne et d'Enerflex Systems.

Une performance frappante dans cette période de déprime boursière !

Une offre de produits améliorée

À quoi doit ressembler une épicerie établie en plein centre-ville ? Une visite de la nouvelle succursale de la rue Notre-Dame Ouest, à Montréal, située dans le même immeuble qu'une résidence pour étudiants de l'École de technologie supérieure, est la preuve que les habitudes des consommateurs ont bel et bien changé au cours des dernières années.

Cette épicerie offre un espace très dégagé, prêt à recevoir de nombreux citadins pressés, mais intéressés à acheter des aliments préparés de qualité. Le menu est varié : on peut y manger des sushis préparés sur place, tout comme une vaste sélection de charcuteries, de fromages, ou se servir au bar à salades.

Plus loin, on retrouve un large assortiment d'eaux embouteillées et de produits biologiques. En prime, des petites affiches qui rappellent les efforts de l'entreprise en matière de développement durable.

C'est dans cette succursale que M. La Flèche fait le point avec Les Affaires sur la stratégie de Metro en Ontario. Ces supermarchés ontariens seront-ils bâtis sur le même modèle ?

" L'offre de produits sera améliorée dans nos épiceries ontariennes ", affirme M. La Flèche, tout en ajoutant qu'il faut éviter de faire des distinctions trop simplistes entre les habitudes alimentaires des Québécois et celles des Ontariens. " Les épiceries sont des commerces de proximité, et chacune doit s'adapter à son environnement. Une épicerie de Montréal peut être aussi différente d'une épicerie de Saguenay que d'une épicerie de Toronto. "

Ainsi, dans les commerces dont la clientèle est plutôt familiale, on ne retrouve pas les comptoirs à salades ou de mets chauds mis de l'avant au centre-ville. Le choix de plats cuisinés est également plus limité.

Néanmoins, souligne M. La Flèche, les nouveaux Metro ontariens offriront plus de plats cuisinés et de meilleure qualité, et plus de produits frais que les anciens A&P, Dominion et autres. Le choix de fromages sera aussi plus varié. " Nous avons déjà introduit le pain de Première Moisson en Ontario. Nous allons amener le meilleur du Québec en Ontario et le meilleur de l'Ontario au Québec. "

La succursale de la rue Notre-Dame couvre 32 000 pieds carrés. En misant sur la flexibilité et la proximité, l'épicier compte se démarquer des supermagasins de Loblaw et des Supercentres de Wal-Mart, dont la superficie peut atteindre 200 000 pieds carrés, et où les consommateurs retrouvent tant des côtes levées qu'une robe de bal, un ballon de football ou un ensemble de chambre à coucher.

Metro n'est toutefois pas la seule chaîne d'alimentation à miser sur les produits frais et les repas préparés. Sobeys, qui exploite au Québec les magasins IGA et IGA Extra, met aussi davantage l'accent sur cette catégorie de produits depuis quelques années. En 2005, par exemple, elle a acquis la petite chaîne québécoise d'épiceries santé Rachelle-Béry.

Un effort de 200 millions de dollars

D'ici 2010, Metro investira 200 millions de dollars pour moderniser la plupart de ses magasins en Ontario. Outre les dépenses d'immobilisations, une part importante, soit 25 millions, sera utilisée pour le marketing et l'uniformisation de l'image de l'entreprise : changer les uniformes, repeindre les camions...

Après la plateforme informatique et la nouvelle bannière, Metro veut lancer une vaste campagne publicitaire en Ontario, ce qui était impensable avec cinq bannières différentes.

De plus, le programme de formation continue de Metro sera implanté en Ontario. Depuis l'acquisition d'A&P, Metro a dégagé 90 millions de dollars grâce à des synergies. En Ontario, en plus des 158 succursales qui s'afficheront sous la bannière Metro, l'entreprise exploite 115 épiceries à escompte Food Basics, une marque qui ne sera pas touchée par l'opération d'unification des bannières.

Contrairement à ses épiceries du Québec, qui sont soit affiliées, c'est-à-dire propriété d'un épicier indépendant, soit franchisées, Metro possède en propre presque tous ses établissements ontariens.

Au Québec, 219 épiceries arborent la bannière Metro ou Metro Plus. À cela s'ajoute une centaine de petites épiceries Richelieu, une soixantaine de Super C et quelques autres petites bannières, pour des ventes annuelles au Québec d'environ 5 milliards de dollars, à peu près la même chose qu'en Ontario. M. La Flèche estime que ces chiffres confèrent à Metro la deuxième place au Québec et en Ontario.

Son plan de match satisfait les spécialistes. " Les trois épiceries rénovées que nous avons visitées sont plus attrayantes et chaleureuses ", affirme Ryan Balgopal, de Scotia Capitaux.

Michael Van Aelst, analyste chez TD Newcrest, renchérit : " Les résultats du repositionnement en Ontario bénéficieront du fait que sa rivale Loblaw est distraite par l'ouverture des hyparmarchés de Wal-Mart. "

dominique.froment@transcontinental.ca

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