Ottawa réduit de 5% les cibles de nouveaux résidents temporaires

Publié le 21/03/2024 à 13:57, mis à jour le 21/03/2024 à 19:00

Ottawa réduit de 5% les cibles de nouveaux résidents temporaires

Publié le 21/03/2024 à 13:57, mis à jour le 21/03/2024 à 19:00

Par La Presse Canadienne

Les premiers objectifs seront fixés en septembre prochain. (Photo: La Presse Canadienne)

Ottawa — Le Canada fixera pour la première fois un «plafond souple» sur le nombre de nouveaux résidents temporaires arrivant au pays lorsqu’il établira ses prochaines cibles d’immigration en septembre, a annoncé jeudi le ministre de l’Immigration, Marc Miller.

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Cette annonce est la plus récente d’une série de mesures prises par le ministre Miller ces derniers mois pour freiner la croissance démographique au Canada. Le gouvernement fédéral prévoit de réduire le nombre de résidents temporaires à 5% de la population au cours des trois prochaines années, contre 6,2% actuellement.

Le Canada a connu une forte augmentation du nombre de résidents temporaires qui arrivent chaque année, et le ministre Miller a déjà indiqué dans le passé que le pays était devenu «accro» aux travailleurs temporaires.

«C’est une annonce qu’on fait aujourd’hui suite au constat qu’on fait et que les économistes ont fait quant au niveau de gens qui sont de façon temporaire de la façon dont ça attaque et affecte l’abordabilité», a indiqué le ministre en point de presse à Ottawa.

«On devrait avoir une conversation franche sur ce que l’augmentation de la migration internationale signifie pour le Canada alors que nous planifions l’avenir», a-t-il ajouté.

La forte croissance démographique au Canada a conduit à un examen minutieux des politiques d’immigration du pays, en particulier des flux de résidents temporaires.

La population du Canada a augmenté de plus de 430 000 personnes au cours du troisième trimestre de 2023, ce qui représente le rythme de croissance démographique le plus rapide jamais enregistré depuis 1957. Près des trois quarts de cette croissance étaient attribuables aux résidents non permanents.

Le nombre de résidents temporaires au Canada a grimpé en flèche en raison de l’augmentation des inscriptions d’étudiants étrangers dans les établissements postsecondaires ainsi que du recours accru aux programmes de travailleurs temporaires — notamment en agriculture au Québec.

Le gouvernement fédéral avait assoupli les règles relatives aux travailleurs étrangers temporaires pendant la pandémie afin de donner un coup de pouce aux entreprises dans un contexte de pénuries inégalées de main-d’œuvre.

Le Canada a également accueilli un nombre important de migrants en réponse aux crises humanitaires, notamment près de 300 000 Ukrainiens fuyant l’invasion russe.

Crise du logement et main-d’œuvre bon marché

Les économistes ont exprimé leurs inquiétudes quant à l’augmentation du nombre de travailleurs migrants ces dernières années, avertissant que les programmes fédéraux, en proposant une main-d’œuvre bon marché, découragent l’innovation chez les employeurs.

Le ministre Miller avait déjà réduit de plus d’un tiers, plus tôt cette année, le nombre de nouveaux visas d’étudiants étrangers délivrés. Il a également fixé un plafond temporaire pour répondre à la crise du logement et aux problèmes du système de visa étudiant qui ont permis à certains mauvais joueurs de profiter des frais de scolarité élevés imposés aux étudiants étrangers tout en leur offrant une éducation de piètre qualité.

L’automne dernier, M. Miller avait annoncé qu’il stabiliserait le nombre de nouveaux résidents permanents au Canada en 2026 en réaction à la crise du logement et d’autres services.

Le ministre Miller a précisé jeudi qu’il convoquerait d’abord en mai ses homologues des provinces et territoires afin de discuter de la manière dont ces cibles devraient être fixées.

«Ce qu’on fixe aujourd’hui, c’est une cible, mais c’est une cible qui sera à gérer avec les provinces, en assumant leurs responsabilités, a-t-il dit. Les gens qui sont ici évidemment de façon temporaire, c’est pour travailler dans les économies provinciales.»

La ministre québécoise de l’Immigration, Christine Fréchette, s’est réjouie que le gouvernement fédéral reconnaisse «qu’il devait réduire l’immigration temporaire au Québec».

«C’est un premier pas. Il faudra voir l’impact, a-t-elle écrit jeudi sur le réseau social X. Notre capacité d’accueil a atteint sa limite et nos services subissent une trop forte pression.

«M. [le premier ministre Justin] Trudeau a exprimé plusieurs ouvertures la semaine dernière lors de sa rencontre avec M. [François] Legault, notamment quant à la sélection par le Québec des travailleurs temporaires. Nous ferons un suivi serré. Le fédéral doit agir en collaboration avec nous.»

À Ottawa, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a salué avec prudence l’annonce du ministre Miller. «Le fait que le ministre de l’Immigration rencontre les ministres de l’Immigration du Québec et des provinces est en soi une bonne nouvelle, que je salue, a-t-il déclaré en point de presse. Que ça vienne avec des changements qui pourraient s’avérer significatifs à l’automne est une bonne chose.»

Programme de travailleurs étrangers temporaires

Le ministre Miller a également demandé à son ministère de revoir les programmes existants qui accueillent des résidents temporaires, afin de mieux les aligner sur les besoins en main-d’œuvre et d’éliminer les abus dans le système.

Le gouvernement prend également des mesures pour réduire dès le 1er mai le nombre de travailleurs entrant au Canada dans certains secteurs.

Le ministre de l’Emploi, Randy Boissonnault, a ainsi annoncé jeudi que les entreprises qui sont actuellement autorisées à faire participer jusqu’à 30% de leur main-d’œuvre au Programme des travailleurs étrangers temporaires verront cette proportion baisser à 20%. Les secteurs de la santé et de la construction seront exemptés de ce changement.

Le Conseil du patronat du Québec a déploré la réduction annoncée de l’accès au Programme des travailleurs étrangers temporaires, qui «aura un impact significatif sur des milliers d’entreprises au Québec et au Canada», a soutenu le PDG, Karl Blackburn.

«Il est important de rappeler que les employeurs faisant affaire au programme ne le font pas par plaisir, mais bien par nécessité dans le cadre de la pénurie de main-d’œuvre qui frappe leurs secteurs d’activités depuis plusieurs années déjà et qui va se continuer pendant encore plusieurs années», écrit le Conseil du patronat dans un communiqué.

Le gouvernement fédéral exige également que les employeurs considèrent les demandeurs d’asile possédant un permis de travail valide pour des emplois vacants avant de pouvoir postuler pour obtenir des travailleurs étrangers temporaires, a annoncé le ministre Boissonnault.

 

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