Best Buy et Future Shop sur les traces d'Amazon

Publié le 18/08/2012 à 00:00, mis à jour le 02/07/2014 à 15:54

Best Buy et Future Shop sur les traces d'Amazon

Publié le 18/08/2012 à 00:00, mis à jour le 02/07/2014 à 15:54

Par Marie-Eve Fournier

Best Buy et Future Shop espèrent maintenir leur chiffre d'affaires en diversifiant leur offre sur le Web. Et les géant de l'électronique ne se contentent pas de produits connexes... teintures pour cheveux, chandelles, machines à coudre, vêtements pour chiens, vitamines, alcootests, bottes de pluie, bibelots, tables à langer et même des serres sont apparues sur leur site. Une stratégie qui laisse les experts perplexes.

«C'est spécial !», lance spontanément François Gaumond, directeur commercial chez Umen, une boîte montréalaise spécialisée dans le commerce électronique. À son avis, Best Buy aura fort à faire pour donner le réflexe aux consommateurs d'aller sur son site y acheter autre chose que de l'électronique. «Pour les produits de beauté, c'est le dernier nom qui me viendrait en tête [...] C'est même bizarre d'aller sur le site de Best Buy et d'y voir des produits aussi éloignés de son core business [activité centrale].»

Il n'est pas le seul à voir des risques dans cette stratégie de diversification extrême. «C'est périlleux. En ligne, on a l'impression que tout se vend si le prix est bon, mais il faut aussi offrir les bons produits, ceux que les clients veulent», souligne Alain Michaud, leader national du secteur commerce de détail et biens de consommation chez PwC.

«Ce n'est pas une bonne stratégie à moyen ou long terme, mais c'est la stratégie du désespoir de la plupart de détaillants afin de montrer, à court terme, de la croissance», ajoute Jacques Nantel, professeur de marketing à HEC Montréal.

«On utilise l'achalandage sur notre site comme levier. Le but est de diversifier, étant donné qu'il y a des catégories en déclin comme les CD et les DVD. Il faut innover, proposer des nouveautés», a expliqué Patrick Lavoie, directeur du marketing de Best Buy pour le Québec. Depuis cette entrevue, M. Lavoie a quitté ses fonctions.

Sur Internet - mais pas en magasin - Best Buy et Future Shop proposent 6 000 produits (les mêmes) obtenus auprès de 400 ou 500 fournisseurs différents. À partir de l'automne, pas moins de 3 000 à 5 000 autres produits seront ajoutés chaque mois. Les détaillants prévoient ainsi qu'à la fin de 2013, la moitié de la marchandise sur leur site n'aura aucun lien avec l'électronique ou la culture.

Dans plusieurs catégories, les produits sont peu ou pas connus : Naomi (shampoing), Bigen (teintures), Ginsu (couteaux), Rowenta (fers à repasser), Global Kraft (bijoux). «Ce sont surtout des marques qui ne sont pas offertes au Québec ou au Canada», précise Patrick Lavoie.

Stratégie anti-Amazon

«La réalité, c'est que c'est surtout une stratégie pour contrer Amazon. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien qu'ils ont étendu leur garantie du plus bas prix pour comprendre les prix en ligne. C'est très agressif», observe Frank Pons, professeur de marketing à l'Université Laval, étonné lui aussi qu'un spécialiste de l'électronique vende également du shampoing.

Fin juillet, Best Buy et Future Shop ont lancé «Notre promesse de prix». Si un client trouve chez un concurrent en ligne ou en magasin un produit à prix inférieur, une réduction équivalant à 10 % de la différence lui sera offerte.

Best Buy ne nie pas que sa diversification est une réponse directe à la forte popularité d'Amazon. «Si notre offre est encore plus visible, nous pourrons encore mieux concurrencer Amazon», ajoute Patrick Lavoie. Pour le moment la nouvelle catégorie «Maison et style de vie» est très discrète sur le site et dans la circulaire, elle n'a droit qu'à quelques centimètres carrés en avant-dernière page.

Le géant américain attend «d'offrir un plus grand nombre de produits en ligne» avant de se lancer massivement dans la promotion de ses nouvelles orientations. Le message mettra en évidence «notre vaste sélection et nos bas prix». En attendant, les affaires seraient déjà bonnes puisque «les prix sont bas» et que «sur le Web, le premier critère de sélection est le prix.»

Bientôt en magasin ?

«Feront-ils des profits avec cela ? Je suis sceptique. Mais au moins, ils essaient des choses. Ils innovent. Il faut leur tirer notre chapeau pour cela», ajoute Alain Michaud.

François Gaumond est plus critique. Il craint que le manque d'expertise des acheteurs de Best Buy (et Future Shop) dans ses nouvelles catégories ne nuise à leur marque. «Il faut qu'ils dénichent les bons fournisseurs. Car le danger, c'est que la vente de mauvais produits porte atteinte à Best Buy dans son ensemble. Les consommateurs déçus croiront que c'est la qualité de tous les articles qui est douteuse.»

En outre, il soulève d'éventuels problèmes en ce qui concerne le service à la clientèle. Les employés en magasin sauront-ils répondre aux questions des consommateurs au sujet des biens vendus en ligne ? Les clients pourront-ils obtenir de l'aide au téléphone ?

«Les employés ne peuvent pas se contenter de dire ''désolé, ce produit est seulement offert en ligne'' à des clients qui ont pris la peine de se déplacer, affirme François Gaumond. Ça va entacher sa réputation.»

Pour le moment, Future Shop et Best Buy n'envisagent pas d'élargir aussi leur offre en magasin. Mais rien n'est exclu. D'ailleurs, on teste depuis peu une section d'instruments de musique au Best Buy de Brossard.

Best Buy au Canada

5,635 G$ : Ventes annuelles totales (exercice 2012 terminé le 3 mars)

36 Future Shop: 3 944 000 pi2

77 Best Buy: 2 432 000 pi2

Source : Rapport annuel de l'entreprise

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