Ça prend plus qu'une solution pour apaiser la crise du logement


Édition du 10 Avril 2024

Ça prend plus qu'une solution pour apaiser la crise du logement


Édition du 10 Avril 2024

Par Claudine Hébert

Une partie de la solution repose entre les mains des municipalités, qui doivent faire preuve de proactivité, dit Martin De Rico, président de DeRico experts-conseils. (Photo: courtoisie)

IMMOBILIER RÉSIDENTIEL. Changement de vocation pour des motels et des bâtiments religieux servant à loger les travailleurs, exemptions de taxes sur les nouvelles constructions, conversion de résidences privées pour aînés en logements sociaux… Les Affaires présente des solutions pour apaiser la crise du logement. Il en faudra toutefois davantage.

Plusieurs experts en immobilier (y compris les promoteurs eux-mêmes) s’attendaient justement à des mesures plus encourageantes de la part du ministre des Finances du Québec, Eric Girard, qui a déposé son budget pour l’année 2024‑2025, le 12 mars dernier. À l’exception d’un plan budgétaire de 482,5 millions de dollars (M $) réparti sur quatre ans favorisant l’accès aux logements sociaux, le coup de pouce attendu pour stimuler la construction résidentielle n’est pas venu.

 

L’aide provincial tarde à venir

Le gouvernement de la CAQ continue de refuser d’accorder une exemption de taxe provinciale sur les coûts de construction de nouveaux immeubles locatifs comme le permet le gouvernement fédéral depuis septembre dernier, constate l’analyste Christian-Pierre Côté, associé chez Côté Mercier Conseil immobilier. « Certes, dit-il, cette mesure aurait aidé les constructeurs, mais il en faudra davantage pour apaiser la crise actuelle. » Selon lui, le coût de l’argent pèse trop dans la balance.

« Les promoteurs veulent construire, mais ne peuvent pas. Tout coûte trop cher. La main-d’œuvre, les matériaux de construction, sans oublier les délais d’approbation qui retardent le lancement des travaux d’au moins d’un an », soutient l’analyste. Et s’ajoute la hausse vertigineuse du taux d’intérêt de la Banque du Canada en moins de 18 mois. Si le nouveau projet n’avance pas, les intérêts des prêts pour les sommes investies s’accumulent. Ce qui constitue un autre fardeau qui nuit aux ensembles résidentiels.

« Tous ces facteurs font en sorte que la valeur économique d’un immeuble se trouve bien en deçà du coût actuel de son coût de construction. Quand un nouveau logement coûte plus de 300 000 $, 400 000 $, voire 500 000 $ à construire, il y a des limites à ce que peut absorber un locataire en coût de loyer », plaide l’analyste Christian-Pierre Côté.

 

La part des municipalités

Un avis que partage Martin De Rico, président de DeRico experts-conseils, une firme d’évaluation immobilière de Québec. « Jusqu’à présent, le gouvernement fédéral a fait sa part pour stimuler l’industrie, mais le provincial tarde à faire la sienne », soulève l’évaluateur agréé. Selon lui, l’une des causes de la crise a été provoquée par le gouvernement fédéral lui-même, qui a doublé les seuils d’immigration au cours des trois dernières années.

Une partie de la solution repose entre les mains des municipalités, qui doivent faire preuve de proactivité, dit-il. D’ailleurs, il salue la Ville de Québec qui fait sa part. « En février dernier, l’administration Marchand a annoncé un crédit de taxes aux promoteurs afin de stimuler la construction dans certains secteurs-clés de Québec. Ce nouveau crédit de taxes, qui peut aller jusqu’à 100 % sur des projets verts et de mobilité durable, doit s’appliquer sur les coûts de construction ou sur la mise à niveau d’infrastructures municipales à la charge des promoteurs », explique le professionnel.

 

Des retards et une absence de dynamisme

Une réduction substantielle des délais quant aux délivrances de permis et aux changements de zonage contribuerait aussi à apaiser la crise du logement, renchérit Luciano D’Iorio, président régional et associé directeur de l’agence immobilière CDNglobal Québec.

Il déplore le manque de dynamisme de la part des administrations municipales pour favoriser la conversion d’immeubles commerciaux en immeubles à logements. Selon un rapport d’Avison Young, le centre-ville montréalais compte plus de 600 immeubles de catégorie B et C qui présentent un fort potentiel de conversion.

L’expert immobilier cite le cas de l’immeuble situé au 1245, rue Sherbrooke Ouest, qui a été acheté en juin 2023 par la société NexArm Investments, filiale immobilière de la famille Armoyan. Selon l’acte notarié, l’acheteur a payé un peu moins de 50 M $ pour acquérir l’ancien siège social de la Standard Life. Les promoteurs, qui souhaitent transformer l’immeuble de 21 étages en 209 logements locatifs, attendent toujours le feu vert de la Ville.

« Les villes doivent revoir plusieurs de leurs façons de faire », enchaîne le professeur titulaire François Des Rosiers, de la Faculté des sciences de l’administration de l’Université Laval. Selon l’expert qui suit de près l’économie urbaine et immobilière, les villes auraient avantage à revoir leur politique de densification des quartiers résidentiels. « Un assouplissement des règles visant à encourager l’aménagement de logements dans certaines grandes maisons unifamiliales constituerait l’une des solutions pour apaiser la crise », dit-il. À ce propos, certaines villes, comme Québec, sont justement sur le point d’adopter un nouveau règlement en ce sens.

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