Bourse: la lune de miel de Trump s'étire une troisième semaine

Publié le 25/11/2016 à 16:54, mis à jour le 26/11/2016 à 08:24

Bourse: la lune de miel de Trump s'étire une troisième semaine

Publié le 25/11/2016 à 16:54, mis à jour le 26/11/2016 à 08:24

Photo: Gettyimages

Les Bourses du monde profitent encore de la lune de miel entre «The Donald» et les investisseurs qui n’ont d’oreilles que pour ses promesses pro-croissance.

La couverture sensationnaliste des évènements est saupoudré de superlatifs tels «l’ère Trump» dont seuls les Américains sont capables.

L'indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto et ses contreparties américaines s’offrent de nouveaux sommets, après trois semaines de gains.

Les actions européennes aussi s’apprécient depuis trois semaines et voguent à leur meilleur niveau en un mois, grâce à l’effet positif de la dépréciation de l’euro sur les exportateurs européens et sur l’inflation locale.

La victoire de Trump fait grimper les secteurs cycliques et les cours de divers métaux, dans la logique que les dépenses en infrastructures et les baisses d’impôts hausseront le régime de croissance américain.

Tous espèrent aussi que l’approche populiste du président désigné aura un effet boule de neige ailleurs dans le monde, après des années d’austérité.

L’impact le plus prononcé est certainement dans le marché des métaux. Sa petite taille ressemble plus à celle du segment des titres à faible capitalisation qu’à celle des grands indices.

Ce marché est donc facilement pris d’assaut par les spéculateurs qui s’en donnent à coeur joie.

Les observateurs parlent de hausse vertigineuse pour le cuivre. Le bond de 21% du métal rouge en novembre à 2,65$US la livre à Londres, le plus en dix ans, surprend même les gros producteurs tels que Codelco.

Et que dire du rebond spectaculaire de 554% du producteur de charbon métallurgique et de zinc Teck Resources(Tor.,TEK.B, 34,84$), depuis le début de l’année?

Le dollar et les taux sous haute surveillance

Donald Trump sera le «président de l’inflation» prévoient déjà plusieurs observateurs.

Pourtant, les manchettes sont truffées d’exemples de guerre de prix dans les médicaments, de l’effet d’Amazon(Nasdaq, AMZN) sur les détaillants traditionnels et de déflation alimentaire, aux États-Unis.

Le volume du commerce mondial a augmenté d’à peine 1% au cours des trois mois terminés le 30 septembre, rapporte Capital Economics.

Les stocks de biens dans les marchés émergents montent en flèche parce que l’achat local et les exportations n’augmentent pas aussi vite que la production industrielle.

«Le ratio qui compare la production industrielle aux exportations dans les marchés émergents est le plus élevé depuis la crise financière. Ce n’est pas de bon augure pour la production future», note Krishen Rangasamy, économiste principale, de la Financière Banque Nationale.

En un mot, la surcapacité est présente partout sur le globe. La technologie accentue la concurrence entre les acteurs de toutes les industries, si ce n’est qu’en facilitant la comparaison des prix.

La nouvelle appréciation du dollar américain, qui trône à un sommet de presque 15 ans, freine aussi l’inflation des produits importés aux États-Unis.

Un équilibre fragile à maintenir

Tout ça pour dire qu’une économie ne passe pas de la désinflation à l’inflation en criant ciseau.

Si c’est le cas, la hausse appréhendée des taux d’intérêt pourrait être plus bénigne que certains investisseurs ne l’appréhendent.

«Le consensus semble être que la baisse des impôts promise compensera pour l’effet défavorable de la hausse du billet vert sur les revenus, les bénéfices et la compétitivité des multinationales américaines», dit Martin Roberge, de Canaccord Genuity.

Le stratège quantitatif estime que les marchés financiers ne sont pas du tout préparés au risque que le dollar américain s’apprécie trop.

Pour l’instant, M. Roberge se montre rassuré par le fait que les Bourses des pays émergents et que les cours des métaux tiennent bon malgré la hausse du billet vert. C’est signe à son avis que les économies émergentes prennent du mieux.

Le billet vert pourrait s’apprécier d’encore 3% à 5%, mais sa hausse tire à sa fin. Si l’euro atteignait la parité avec le dollar américain, la devise européenne approcherait du niveau extrême atteint en 2000-2002, en terme de déviation par rapport à la valeur de parité du pouvoir d’achat.

«Une hausse d’encore 3% à 5% de billet vert ne serait pas dramatique. C’est un mécanisme par lequel les États-Unis peuvent redistribuer leur propre croissance à l’étranger tant que les autres banques centrales ne haussent pas leurs propres taux afin de lutter contre l’inflation des produits importés chez eux que cause la dépréciation de leur monnaie», dit-il.

Il est aussi fort probable que la Réserve fédérale américaine se fasse plus prudente, après la deuxième hausse de son taux directeur du 16 décembre, en particulier si de mauvais résultats d’élections en Italie et en Autriche poussaient le dollar américain encore plus à la hausse.

«Le risque est effectivement que le billet vert s’apprécie trop fortement puisque les trois-quarts de la croissance mondiale provient des pays émergents. Une surchauffe du dollar pourrait mettre fin au découplage récent entre le dollar et les cours des ressources. Ces pays seraient obligés de puiser dans leurs réserves en dollars américains et d"augmenter leurs taux pour défendre leur propre monnaie», explique le stratège qui guide les investisseurs institutionnels dans leur stratégie à court terme.

Pour l’instant, il est positif que les cours des matières premières montent et que l’inflation dans les pays émergents soit à la baisse, pour soutenir ces économies.

Une autre raison de croire que les taux américains repères de dix ans ne franchiront pas la barre de 2,5% est l’écart entre les taux américains et japonais, à son avis.

L’écart de 242 points de base entre les taux américains et japonais de dix ans approche aussi du seuil critique qu’il avait atteint pendant la crise de 2008-09.

«Les taux zéro de dix ans au Japon jouent un rôle d’ancre pour l’ensemble des taux obligataires mondiaux», croit M. Roberge.

L’équilibre économique mondial reste bien fragile, reconnaît M. Roberge.

Ceci dit, les indicateurs économiques avancés (LEI) continuent de monter, un facteur de plus à mettre du bon côté du bilan.

 

À propos de ce blogue

La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
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