Armageddon entre Québec et Ottawa: faut-il prendre une assurance?

Publié le 25/11/2016 à 08:33

Armageddon entre Québec et Ottawa: faut-il prendre une assurance?

Publié le 25/11/2016 à 08:33

Je ne sais pas pour vous, mais dans mes cours de géographie du secondaire, on nous parlait du «Bouclier canadien» comme… d’un bouclier justement, d’une sorte de protection contre ces tremblements de terre qu’on voyait dans les films catastrophes et parfois aux bulletins de nouvelles. Ah, un tremblotement qui fait claquer la vaisselle dans les armoires et qui fait jaser le lendemain, ça oui! c’était possible. Mais du reste, on disait que la formation géologique sur laquelle on était assis nous protégeait de ces secousses qui déchirent les routes.

Il faut croire que vous avez eu le même prof de géographie que moi. Au Québec, peu de gens croient bon de prendre une assurance habitation contre les risques de tremblement de terre. C’est vrai que ça tremble plus souvent à l’étranger que dans le jardin. Et de mémoire d’homme, rien du genre n’a marqué les esprits.

Il y aurait eu un important séisme dans la région de Montréal en 1732 (magnigute 5,8), causant des dommages importants, bien que les infrastructures n’étaient pas très développées pour apprécier pleinement les dégâts. (Vous trouverez ici un historique sismique de la région, merci lecteur Chaput)

Mais vous savez quoi? On risque aussi d’en prendre un, un «Big One». Pas «Big» comme celui qui menace la côte Ouest, mais suffisamment «Big» pour semer le chaos et largement éclipser les petites pluies verglaçantes dans notre mémoire collective.

J’ai capté un reportage à la radio cette semaine dans lequel on évoquait des scénarios apocalyptiques et des chiffres ahurissants. Je n’en croyais pas vraiment mes oreilles. Ça sentait la campagne de peur.

Le reportage faisait état de la publication d’un rapport du Conference Board, lequel suivait les traces d’une autre étude publiée au mois d’août par C.D. Howe. Le Bureau de l’Assurance du Canada (BAC) s’était lancé dans un exercice semblable il y a trois ans. Tous se basent sur des estimations de Ressources naturelles Canada selon lequel la probabilité qu’un fort séisme se produise sur la côte Ouest du pays au cours des 50 prochaines années s’élève à 30%. Un truc immense, je ne vous dis pas. De magnitude 9, un séisme à 75 km des côtes de la Colombie-Britannique des pertes matérielles évaluées à 75 milliards de dollars. Avec une probabilité d’une sur trois d’ici 50 ans, avec un peu de «chance», ça pourrait se réaliser de mon vivant.

Le corridor Québec-Montréal Ottawa représente la 2e principale zone sismique au pays. Alors le «Bouclier canadien». Ici, la probabilité qu’un violent séisme se produise se situe entre 10 et 15 %. Le chiffre m’a fait sursauter. Les chances qu’on soit épargnés sont nettement meilleures, mais vous conviendrez qu’une probabilité de 1 sur 10 dans 50 ans, c’est énorme lorsqu’elle implique une catastrophe d’une envergure jamais vue (à plus long terme, c'est inéluctable). 

On parle d’un événement qui a lieu tous les 400 ans environ. En ce qui nous concerne, soit dans la Vallée du St-Laurent, il s’agit d’un séisme d’une magnitude de 7,1. Les conséquences seraient catastrophiques puisque 40% de la population occupent cette petite bande de territoire et nos infrastructures, comme on le sait trop bien, ne datent pas d’hier et ne sont pas toujours des plus robustes. Un tel tremblement de terre, selon les géologues, provoquerait des dommages estimés à 60 milliards de dollars.

Dans ce scénario, les pertes assurées s’élèveraient à 12 milliards de dollars. Au BAC, on dit que seulement 3% des propriétés résidentielles sont couvertes (ce type d'assurance est disponible par une avenant, qui équivaut grosso modo à 10% de la prime, mais le prix varie en fonction de plusieurs facteurs). Ce taux augmente à quelque 40% dans l’immobilier commercial. Les compagnies d’assurance sont assez capitalisées pour faire face ce type d’événement.

Le dernier rapport du Conference Board, publié cette semaine, se penche sur les impacts macroéconomiques d’un événement qui se produit tous les 500 ans, particulièrement dans l’Ouest. Les dix plaies d’Égypte sont de la petite bière. Imaginez des pertes économiques de 127 milliards de dollars, des compagnies d’assurances en faillites, des banques qui craquent, une SCHL exsangue, la croissance économique amputée de moitié, des finances publiques grevées comme jamais.

Le chaos.

Après avoir lu ces rapports, je vous jure, j’ai mal dormi. Vous savez, ce genre de nuit où on rêve à demi-conscient. À certains moments, je voyais ma maison d’enfance en ruine, avec le prof de géo qui fouillait dans les débris.

Mais le pire, c’est quand des vendeux d’assurances me couraient après avec un gros entonnoir à la main (?!). Un vrai cauchemar.

Je vais quand même m’informer auprès de mon courtier combien coûte pour mon immeuble un avenant pour les tremblements de terre.

CORRECTIF géographique: Un prof m'a écrit pour me signaler que la vallée du St-Laurent ne faisait pas partie du Bouclier canadien et que ce dernier était en effet moins sujet aux séismes. La confusion vient du fait que mon prof à moi nous disait qu'on n'avait rien à craindre au Québec. Bref.

Que coûterait aux Canadiens un mégaséisme - BAC 

Les lignes de faille: Tremblements de terre, assurance, et risque systémique - Institut C.D. Howe

 Les risques sismiques au Canada : Impacts macroéconomiques et risque financier systémique

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.