Les problèmes du marché des matières premières

Publié le 12/06/2010 à 00:00

Les problèmes du marché des matières premières

Publié le 12/06/2010 à 00:00

Depuis 2002, nous assistons à un boom du marché des matières premières.

L'or offre le meilleur exemple : son prix a explosé de 370 % depuis huit ans, pour atteindre 1 200 $ US l'once.

Un tel rendement aide à faire des ressources un secteur vedette. Or, certains développements rendent ce secteur plus dangereux. Je dis " plus dangereux ", parce que je n'ai jamais recommandé d'investir dans les ressources naturelles. Selon moi, il s'agit d'activités trop cycliques. Pour qu'un investisseur réussisse dans ce secteur, il doit savoir précisément à quel moment acheter et vendre des actions. Cela est trop spéculatif à mon goût.

Par ailleurs, il sera encore plus difficile de faire de l'argent en Bourse dans ce secteur au cours des prochaines années, en raison de facteurs qui gagnent en importance.

Un secteur trop populaire

D'abord, ce secteur est trop populaire. Selon Barclays Capital, les actifs mondiaux investis directement dans les ressources ont crû de 36 % en 2009, pour atteindre 257 milliards de dollars américains (G$ US). Au 30 avril, soit les dernières données disponibles, ces actifs atteignaient 294 G$ US.

Des montants d'argent de plus en plus importants sont injectés dans ce qui est devenu une nouvelle catégorie d'actif, aux côtés des actions et des obligations. Ainsi, les grands investisseurs institutionnels, comme les caisses de retraite, consacrent maintenant un certain pourcentage de leur actif aux ressources. Ils réduisent leurs placements dans les actions et les obligations pour acheter des matières premières comme l'or et le pétrole.

Plusieurs raisons les motivent, dont la volonté de diversifier leur portefeuille en achetant des actifs tangibles. Les deux derniers marchés baissiers ont terni la réputation des actifs financiers, comme les actions. Par ailleurs, de nombreux investisseurs voient dans les actifs tangibles une police d'assurance s'il y avait résurgence de l'inflation.

Toutefois, on investit de plus en plus dans les ressources naturelles au moyen de fonds négociés en Bourse (FNB). Selon Barclays Capital, des 257 G$ US qui étaient placés dans les ressources en 2009, 92 G$ US avaient été investis par l'intermédiaire des FNB.

Cela crée deux problèmes. Le premier, c'est que le montant d'argent investi dans un FNB spécialisé dans une denrée dépasse souvent la valeur du marché de celle-ci. Par exemple, selon Niels Jensen, partenaire de la société de gestion Absolute Return Partners, il s'échange 14 fois plus d'actifs pétroliers chaque jour sur les marchés financiers qu'il ne se vend de pétrole réel sur le marché au comptant.

Cela peut mener à des distorsions importantes entre la demande boursière et la demande réelle. Historiquement, le prix du pétrole augmentait lorsque la demande des consommateurs surpassait l'offre des producteurs. C'est plus compliqué de nos jours. Le prix de l'or noir peut augmenter uniquement parce que des fonds spéculatifs (hedge funds)ou des institutions achètent des FNB qui reproduisent le prix du pétrole parce qu'ils spéculent sur celui-ci.

Cela crée une demande artificielle qui peut chuter rapidement. Par exemple, un rendement positif prolongé des marchés boursiers convaincrait les investisseurs de réduire leur pondération en matières premières.

Déficience des FNB

Le second problème, c'est que plusieurs FNB liés aux ressources ne parviennent pas à bien reproduire le rendement de la matière première sous-jacente. Par exemple, le United States Oil Fund (NY, USO) qui reproduit le prix de l'or noir, a affiché un rendement inférieur de 68 % à la progression du prix au comptant du baril de pétrole West Texas Intermediate depuis janvier 2009.

Cette situation tient avant tout à la nature des marchés à terme. Lorsque vous achetez du pétrole pour livraison dans plusieurs mois, vous payez une prime (en raison des frais d'entreposage, par exemple). Ainsi, lorsque le gestionnaire du United States Oil Fund échange des contrats pour livraison en septembre pour ceux de décembre, il paie plus cher que le prix de septembre et plus cher que le prix au comptant. Cette dynamique nuit au rendement du FNB par rapport à la denrée.

Selon M. Jensen, ce problème a été aggravé par le fait que de nombreux spéculateurs tentent de profiter de la situation en faisant monter les prix avant que les gestionnaires des FNB n'échangent leurs contrats.

Notez que les FNB qui achètent dans les marchés au comptant, comme les FNB liés aux indices boursiers, n'ont pas ce problème.

Si vous tenez à investir dans ce secteur - ce que je déconseille -, achetez des titres de grands producteurs au moyen d'un FNB, comme le iShares S&P/TSX Materials Index Fund (XMA), qui reproduit l'indice du secteur des matériaux du S&P/TSX, et le iShares S&P/TSX Energy (XEG), qui reproduit l'indice pétrolier.

De mon blogue

www.lesaffaires.com/bernard-mooney

Ne touchez pas à BP !

Les chercheurs d'aubaines voient certainement dans la pétrolière BP un titre attrayant, car il a dégringolé de 40 % depuis son dernier sommet.

J'ai un conseil pour eux : ne touchez pas à ce titre toxique ! Il est beaucoup trop tôt. Il est impossible d'évaluer la facture finale de la catastrophe du golfe du Mexique. Par exemple, l'analyste Kim Fustler, de Credit Suisse, calcule que les coûts de nettoyage pourraient atteindre entre 15 et 23 milliards de dollars américains (G$ US) . À cela, l'analyste ajoute des coûts de 14 G$ US pour les réclamations et poursuites.

" Cela représente trois ans de fonds autogénérés libres pour BP, soit après le versement du dividende et les dépenses en immobilisations ", estime l'analyste. Son évaluation est établie en fonction d'un prix du pétrole de 80 $ US le baril. Une telle punition financière fait en sorte que le dividende pourrait être suspendu, selon l'analyste.

Vos réactions

"Je crois que le titre baissera encore, mais le moment est proche où il aura trop baissé. "

- SB

" On assiste peut-être au début de la fin de BP. "

- Jad

bernard.mooney@transcontinental.ca

À la une

Le Québec pâtira-t-il de la guerre commerciale verte avec la Chine?

17/05/2024 | François Normand

ANALYSE. Les producteurs d’acier craignent que la Chine inonde le marché canadien, étant bloquée aux États-Unis.

Bourse: Wall Street finit en ordre dispersé, le Dow Jones clôture au-dessus des 40 000 points

Mis à jour le 17/05/2024 | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. La Bourse de New York a terminé en ordre dispersé.

À surveiller: AtkinsRéalis, Boralex et Lightspeed

17/05/2024 | Charles Poulin

Que faire avec les titres AtkinsRéalis, Boralex et Lightspeed? Voici des recommandations d’analystes.