Les droits de vote multiples n'ont aucune importance

Publié le 10/07/2010 à 00:00

Les droits de vote multiples n'ont aucune importance

Publié le 10/07/2010 à 00:00

L'affaire Frank Stronach, président de Magna International, dirige les projecteurs sur les dirigeants qui détiennent des actions à droit de vote multiple.

Plusieurs investisseurs se demandent probablement comment considérer les actions à droit de vote multiple dans leurs choix de titres. Certains se disent qu'ils auraient probablement avantage à éviter les entreprises dont le capital est composé de telles actions. C'est une erreur, car le nombre de droits de vote devrait être le moindre de vos soucis. En effet, le facteur le plus important à considérer dans le choix de titres reste la qualité de la direction.

Peu de gains pour les actionnaires, des millions pour Frank Stronach

Avant de vous expliquer ma pensée, disons un mot sur l'affaire Frank Stronach. Ce dernier est le fondateur et président du conseil de Magna International, le géant canadien des pièces d'autos, qui est en Bourse depuis 1962. M. Stronach a fondé Multimatic Investments en 1957, laquelle a fusionné avec Magna Electronics en 1969, une société qui était déjà en Bourse. En 1971, M. Stronach est devenu président de Magna.

M. Stronach a grandement profité au fil des ans d'une structure de capital à plusieurs droits de vote. Il possède seulement 4 % des actions, mais il a le contrôle de l'entreprise, avec 66 % des votes, en raison du fait que ses actions lui procurent chacune 300 droits de vote.

Depuis plusieurs années, la rémunération de M. Stronach est aberrante. Il a reçu au total 53 millions de dollars (M$) au cours des trois dernières années. Si vous regardez le rendement à long terme de l'entreprise, vous constaterez que les actionnaires n'ont pas fait d'argent, tandis que M. Stronach a empoché des dizaines de millions de dollars. Le titre a perdu 20 % de sa valeur depuis cinq ans, alors que l'indice S&P/TSX a progressé de 20 %. L'action se négocie au même cours qu'en 1994 !

Par ailleurs, M. Stronach a investi le capital des actionnaires de Magna dans des activités sans lien avec le secteur de l'automobile, comme les magazines de luxe (au début des années 1990) et les courses de chevaux (Magna Entertainment). Ce genre de comportement en dit long sur la qualité de la direction.

Une proposition indécente

Récemment, le conseil de Magna a décidé d'éliminer la structure à droit de vote multiple. Pour inciter son président à convertir ses 726 829 actions de catégorie B à 300 droits de vote en des actions à un seul droit de vote, le conseil a convenu lui donner une prime par rapport à la valeur des actions ordinaires. Logique. Mais quand il s'agit de M. Stronach, la prime ne peut pas être normale.

Selon la proposition soumise à l'assemblée des actionnaires, Magna débourserait une valeur de 863 M$, soit 300 M$ au comptant et l'émission de 9 millions d'actions ordinaires de Magna en faveur de la famille. M. Stronach, par le truchement de sa fiducie, recevrait ainsi 1 188 $ pour chacune de ses actions à droit de vote multiple, alors que les actions ordinaires A s'échangeaient à 62,53 $ US le 5 mai dernier, lorsque la proposition a été faite. Il s'agit d'une prime de 1 800 % !

Ce que je trouve le plus curieux - et pathétique -, c'est que plusieurs firmes spécialisées en gouvernance d'entreprise (comme Glass Lewis, filiale de Teachers, et RiskMetrics Group) ont recommandé aux actionnaires d'accepter cette proposition. Pourquoi ? Parce qu'elle suit les règles de la bonne gouvernance ! Ces experts ne sont pas payés pour réfléchir, mais pour appliquer les règles...

Pourtant, cette proposition est clairement indécente. Selon moi, une prime de 50 % aurait été bien généreuse.

Évaluez vous-même la direction

Ce n'est pas le fait qu'il ait 300 droits de vote par action qui me fait craindre M. Stronach, mais son style de gestion. En fait, même s'il avait des actions à un demi-droit de vote, j'éviterais quand même son entreprise.

Votre analyse de la direction et du conseil d'administration ne doit pas être embrouillée par la structure de capital. Vous ne devez pas tenir pour acquis qu'une société ayant une seule catégorie d'actions agira dans vos intérêts d'actionnaire minoritaire. Vous ne devez pas compter non plus sur le conseil d'administration qui, le plus souvent, est la marionnette de la direction.

C'est aussi une erreur d'éviter une société uniquement parce qu'elle a des actions à plusieurs droits de vote. Malgré ce désavantage structurel, cela ne signifie pas nécessairement que vos intérêts d'actionnaire minoritaire seront mal servis. Tout dépend de la qualité du président, de son équipe et de son conseil d'administration. Car quels que soient les lois et les règlements, c'est votre jugement qui doit servir à distinguer les dirigeants " exploiteurs " des dirigeants " créateurs de richesse ".

De mon blogue

www.lesaffaires.com/bernard-mooney

Les États-Unis ne retomberont pas en récession

Selon un modèle qui a fait ses preuves, l'économie américaine ne risque pas de retomber en récession au cours des six prochains mois. Ce modèle a été développé par des économistes de Credit Suisse. Depuis 40 ans, il a indiqué à l'avance la probabilité qu'une récession survienne sept fois sur sept (soit lorsque la probabilité d'une récession au cours des six prochains mois dépasse 50 %).

Par exemple, en août 2007, cinq mois avant la dernière récession, le modèle a sonné l'alarme. Il s'est trompé une fois en 40 ans, soit pendant trois mois en 1984 : il indiquait alors un risque de récession, mais celle-ci ne s'est pas produite.

Toutefois, le modèle peut changer de verdict assez rapidement. Plusieurs de ses composantes, comme celles liées aux marchés financiers, sont assez volatiles.

Vos réactions

" En effet, il n'y a aucun risque d'une récession. Il y a cependant un grand risque que ce soit plutôt le début d'une grande dépression ! "

- bmessier

" Il est difficile de prédire l'avenir en raison de cette crise, car il faudrait réformer tout un système. "

- Olivier M.

bernard.mooney@transcontinental.ca

À la une

Le Québec pâtira-t-il de la guerre commerciale verte avec la Chine?

17/05/2024 | François Normand

ANALYSE. Les producteurs d’acier craignent que la Chine inonde le marché canadien, étant bloquée aux États-Unis.

Bourse: Wall Street finit en ordre dispersé, le Dow Jones clôture au-dessus des 40 000 points

Mis à jour le 17/05/2024 | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. La Bourse de New York a terminé en ordre dispersé.

À surveiller: AtkinsRéalis, Boralex et Lightspeed

17/05/2024 | Charles Poulin

Que faire avec les titres AtkinsRéalis, Boralex et Lightspeed? Voici des recommandations d’analystes.