Au Québec aussi, le secteur automobile tombe en pièces

Publié le 29/11/2008 à 00:00

Au Québec aussi, le secteur automobile tombe en pièces

Publié le 29/11/2008 à 00:00

Une atmosphère de Grande Crise règne dans le parc industriel régional de Magog. Les stationnements des quatre énormes usines fermées par GDX Automotive sont déserts. Le fabricant de joints d'étanchéité pour portières de voitures a mis fin à ses activités estriennes en février. L'entreprise avait déjà considérablement réduit son effectif : depuis 2005, elle a mis à pied plus de 1 500 travailleurs.

Deux bâtiments de GDX ont retrouvé des locataires. Mais les chaînes de montage ont fait place à des entrepôts où les employés sont rares. Selon le Centre local de développement Memphrémagog, la MRC a perdu 2 000 emplois liés à l'automobile depuis 2003.

Quelques coins de rue plus loin, les employés de Dana, un fabricant d'arbres de transmission pour camionnettes et pour véhicules utilitaires sport, sortent de l'usine à la fin de leur quart de travail. Les installations font partie des dix usines que la multinationale a décidé de fermer, provoquant la mise à pied de 5 000 personnes en Amérique du Nord. "Dans nos marchés, la baisse de la demande est encore plus aiguë que dans les autres, dit Alain Plouffe, directeur de l'usine, joint au téléphone. Il y a vraiment trop de capacité de production."

Environ 140 employés perdront leur emploi au mois d'août prochain. Rencontrés devant l'entrée de l'usine, les travailleurs ne peuvent nous parler. La direction ne veut pas de journalistes sur son terrain.

Plus tard, dans une beignerie voisine, les gars se vident le coeur. "On ne s'y attendait pas, dit Éric Dubois, président du syndicat TCA-Québec de l'usine. Dana a eu des difficultés, mais début 2008, ils nous ont dit que ça repartait." L'entreprise a même investi des millions dans son usine de Magog pour y déménager une chaîne de fabrication de pièces d'aluminium en provenance d'une usine fermée en Virginie. Aujourd'hui, cet équipement fait le chemin inverse, vers le Tennessee.

Même si la direction n'y croit plus, le syndicat fait des pieds et des mains pour garder l'usine ouverte. Campagne électorale aidant, le syndicat a même rencontré le premier ministre. M. Dubois voudrait que le gouvernement accorde une subvention à Dana. Jean Charest dit qu'il a promis d'y réfléchir, dit-il.

Diminuer les coûts... coûte que coûte

En face de l'usine de Dana, chez Conceptromec, le pdg Stéphane Bégin se creuse la tête pour diminuer ses coûts. "On a réduit les prix de nos machines de 50 à 60 %, mais il faudrait encore les baisser de 10 à 15 % dans les huit prochains mois", dit-il. Il a déjà mis à pied quelques travailleurs et devra en licencier d'autres si le marché de l'automobile ne s'améliore pas.

Quand les fabricants de pièces de véhicules ont ouvert leurs portes ou augmenté leur capacité au Québec, au milieu des années 1990, Conceptromec a spécialisé son usine de machines d'automatisation dans ce secteur. "Aujourd'hui, on produit à 90 % pour l'automobile, dit M. Bégin, qui fait maintenant marche arrière. On envisage d'autres secteurs pour revenir à la situation d'avant. Ce n'est pas évident. On refait notre plan stratégique tous les trois mois."

M. Bégin tient cependant à être présent sur le marché automobile quand la crise passera, d'ici deux ans. C'est pourquoi il vient d'ouvrir une usine au... Mexique. "On pourra peut-être ainsi diminuer nos coûts des 10 à 15 % qui nous manquent pour résister à la concurrence des Chinois", dit M. Bégin.

Avec la fermeture de son voisin GDX, Conceptromec perd un des ses plus importants clients. Un autre gros acheteur, Waterville TG, à Waterville, 25 kilomètres plus à l'est, a lui aussi considérablement diminué ses commandes. L'entreprise, détenue à plus de 40 % par Toyota, comptait près de 1 250 travailleurs dans ses quatre usines de la région en 2003. Aujourd'hui, elle n'en a plus que 700. D'autres compressions sont à venir. À la dernière assemblée syndicale, les employés ont accepté une baisse du nombre minimum d'emplois qui les protégeait de la sous-traitance. "La liste est passée à 500 employés", dit Roch Drapeau, président du syndicat de Waterville TG.

En échange, les employés ont obtenu de la direction l'engagement d'investir 44 millions de dollars pour moderniser l'usine... à condition que le siège social, au Japon, approuve l'opération. La direction de Waterville TG a refusé d'accorder une entrevue.

Marasme généralisé

L'Estrie a la plus grande concentration d'emplois dans le domaine des pièces d'automobiles au Québec, derrière la région de Montréal. Mais sa situation n'est pas unique : partout dans la province, les fabricants automobile ferment leurs portes ou réduisent leurs effectifs.

À Rivière-Beaudette, dans Vaudreuil- Soulanges, la française Montupet vient d'annoncer que son usine de pièces d'aluminium pour les moteurs de Chrysler fermera le 19 décembre; 195 personnes perdront alors leur emploi.

À Trois-Rivières, Aleris a fermé l'été dernier son usine de pièces d'aluminium pour radiateurs d'autos. Le fabricant de tubes pour servodirection Technologies de fluides Dayco a fait de même en février. La ville a ainsi perdu plus de 500 emplois en cinq mois.

À Québec, chez Veyance Technologies, c'est la saignée. Ce fabricant de pièces de caoutchouc pour l'industrie automobile a mis à pied une quarantaine de travailleurs sur 150 cette année.

Dans la région montréalaise, plusieurs entreprises marquent le pas. Parlez-en à Jean Meredith, directeur de Raufoss Canada, un fabricant de pièces de châssis d'aluminium pour voitures de Boisbriand. "Jusqu'en octobre, on connaissait notre plus grosse année, dit-il. Mais maintenant, tout est au ralenti." Sur la centaine d'employés, une douzaine devront quitter l'entreprise.

"Pour survivre, il faut que General Motors continue ses activités", dit M. Meredith. Au Québec, c'est l'unique client de Raufoss. Avant que la crise ne s'aggrave dans le secteur, l'entreprise norvégienne avait même commencé à agrandir ses installations pour pouvoir mieux la servir ! "Avoir su, on aurait procédé autrement", dit le dirigeant.

Des milliers d'emplois perdus

L'industrie québécoise des pièces d'automobiles perd des milliers d'emplois. L'an dernier, la province comptait 12 300 travailleurs dans ce secteur. Combien en reste-t-il aujourd'hui ? Difficile de la savoir : Québec n'a pas fait de décompte depuis les dernières fermetures.

L'industrie peut-elle se remettre de toutes ces mauvaises nouvelles ? Isabelle Dostaler, professeure de management à l'Université Concordia, en doute. "Je ne suis pas sûre que le Québec et l'Ontario aient une place dans le marché mondial des pièces d'automobiles", dit-elle.

Les manufacturiers d'ici ne peuvent plus compter sur leur proximité avec les usines d'assemblage d'Ontario et du Michigan. Les "Big Three" américains vendent de moins en moins de gros chars et ils déménagent leurs usines d'assemblage au Missouri et au Mexique... trop loin du Québec.

hugo.joncas@transcontinental.ca

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