Mesurer pour s'améliorer

Publié le 08/09/2012 à 00:00, mis à jour le 06/09/2012 à 15:31

Mesurer pour s'améliorer

Publié le 08/09/2012 à 00:00, mis à jour le 06/09/2012 à 15:31

Par Premium

Les outils de gestion actuels ne semblent pas adaptés à votre situation ? Qu’à cela ne tienne. Inversez-les ! C’est la stratégie adoptée par certains entrepreneurs cités dans ce texte. Leur réussite témoigne de la pertinence de leurs intuitions.

Auteurs : John Mullins et Randy Komisar, Business Strategy Review

QUE L’ON SOIT DANS UN COIN ISOLÉ D’UNE GRANDE SOCIÉTÉ ou dans son garage pour une entreprise en démarrage, lancer un produit inédit ou une nouvelle entreprise n’a rien de facile. Parmi les milliers d’exemples qui pourraient être cités, pensons notamment au concept de paiement en ligne que nous connaissons aujourd’hui sous le nom de PayPal. Son créateur, Max Levchin, cherchait à exploiter son expertise en cryptographie. Ce n’est finalement que sa septième idée qui a fonctionné.###

Des entrepreneurs bien informés – comme Max Levchin –, parfaitement conscients que leur plan initial, c’est-à-dire leur idée d’origine, ne se développerait pas comme prévu, ont emprunté à la grande entreprise un outil formidable pour mieux gérer leurs efforts d’innovation. Puis, même si cela semblait contre-intuitif, ils l’ont très sagement inversé !

Cet outil, le tableau de bord, réunit un ensemble d’indicateurs clés de rendement (ICR), qui signalent aux dirigeants la moindre dérive dans la trajectoire de l’entreprise. En repérant rapidement la plus infime déviation, ils peuvent rapidement apporter les modifications qui s’imposent — au personnel, aux processus, aux stratégies, etc. — afin de ramener le tout dans la bonne direction.

Nuance subtile mais essentielle

Pour une nouvelle entreprise, garder le cap sur le plan initial est probablement la pire chose à faire, puisque ce qui pourrait bien fonctionner n’est sans doute pas ce qui avait été prévu au départ (bref, oubliez le plan d’affaires !). Selon nos recherches, les tableaux de bord constituent en fait de puissants outils de navigation dans des eaux inexplorées, là où s’avancent justement les nouvelles entreprises.

Cependant, ces outils n’ont pas pour objectif de permettre aux nouvelles entreprises de suivre leur trajectoire initiale. Ils servent plutôt à compiler des données provenant du marché, puis à signaler que des changements s’imposent, parce que le plan de départ ne fonctionne pas comme prévu ! Cette nuance, subtile mais essentielle, jumelée aux attentes sous-jacentes aux tableaux de bord des grandes entreprises, expliquerait-elle pourquoi la plupart d’entre elles ne sont pas très efficaces en matière d’innovation ?

S’agirait-il aussi d’un indice pour comprendre pourquoi tant de nouvelles entreprises échouent, quel que soit leur domaine ? Cela pourrait-il même contribuer à diminuer de quelques points de pourcentage le taux d’échec des nouvelles entreprises ?

Pourquoi les grandes entreprises n’innovent pas

Plusieurs facteurs expliquent les difficultés des grandes entreprises à innover : entre autres, la culture, les incitatifs insuffisants et un comportement frileux face au risque. Selon toute vraisemblance, le récent engouement pour « l’innovation ouverte » reflète justement ces difficultés : tout se passe comme si les grandes entreprises avaient compris qu’il vaut mieux oublier l’innovation à l’interne et se tourner plutôt vers l’achat d’idées venant de l’extérieur, comme le font si bien des sociétés comme Cisco et, plus récemment, Procter & Gamble. Selon nos recherches, si les grandes entreprises ont tant de difficultés à innover, c’est en bonne partie en raison d’attentes inappropriées ou mal ciblées pour leurs nouveaux projets, comme

le montre le tableau suivant :

Les attentes

• Le plan initial fonctionnera ;

• Le rôle de la direction consiste à mettre en œuvre avec confiance le plan qu’elle a élaboré ;

• L’utilisation rigoureuse d’un tableau de bord permettra de déployer le plan comme prévu et d’assurer que l’entreprise gardera toujours le cap ;

• Le leader tout indiqué pour assurer la réussite du nouveau projet sera un expert de la mise en œuvre et il réalisera le plan.

La réalité

• Le plan initial fonctionne rarement ;

• Le véritable rôle de la direction consiste à trouver une solution de rechange qui fonctionnera vraiment ;

• L’utilisation efficace d’un tableau de bord permettra de valider de façon empirique quelques hypothèses vitales, et au besoin, d’apporter rapidement les correctifs qui s’imposent, avant d’avoir gaspillé trop de temps et d’argent ;

• Pour assurer la réussite d’un nouveau projet, il faut un leader doué pour l’expérimentation et l’apprentissage.

Étude de cas

La voie à suivre

Dennis Whittle était un homme frustré. Cadre supérieur à la Banque mondiale, il venait de passer un an à élaborer de nouveaux processus pour aider celle-ci à lutter contre la pauvreté. Il disposait d’un budget de cinq millions de dollars en plus des services d’une grande firme de consultants. Appuyé par sa collègue Mari Kuraishi et par leurs équipes de professionnels du développement, il avait mis en œuvre un programme grâce auquel la Fédération de Russie pouvait injecter des milliards de dollars dans le développement économique.

CONSIDÉRÉS COMME NOVATEURS, leurs efforts semblaient voués à la réussite. Pourtant, les résultats furent à la fois décevants et préoccupants : Dennis Whittle et Mari Kuraishi n’étaient vraiment pas convaincus que les fortes sommes investies dans le pays avaient eu les effets escomptés, ni que l’argent était bel et bien arrivé aux intervenants sur le terrain, qui en avaient le plus besoin.

Le problème est bien connu : les fonds destinés à combler des besoins humanitaires urgents ne se rendent pas toujours où ils le devraient… Trop souvent, une bonne partie des sommes accordées semble aboutir dans les comptes en Suisse des représentants du gouvernement. Selon le point de vue de Dennis Whittle, il fallait trouver une approche radicalement nouvelle. Il a donc demandé à Mari Kuraishi de l’aider à faire changer le système en place.

Rapidement, celle-ci a convoqué des spécialistes en stratégie ainsi que des amis d’autres services de la Banque mondiale à une séance de remue-méninges d’une journée. Le groupe a divisé un grand tableau en deux sections : à gauche, les « processus actuels de la Banque mondiale » ; à droite, « quel serait le fonctionnement inverse ? » La section de gauche contenait des éléments comme : « Prêts du sommet vers la base ; subventions de 100 millions de dollars ; délai de traitement de deux ans ; 200 pages de documentation ». À droite, on trouvait des idées comme : « Subventions de la base vers le sommet ; prêts ou subventions de 100 000 dollars ; délai de traitement des prêts de deux jours ; deux pages de documentation ». Le résultat de l’exercice ne ressemblait en rien aux activités quotidiennes courantes de la Banque mondiale.

Solliciter les idées

En février 2000, 700 personnes se massaient autour de 270 kiosques bondés dans le hall habituellement désert de la Banque mondiale, à Washington. Chacune voulait proposer une idée visant à éliminer la pauvreté, à l’occasion de la première édition du Development Marketplace, un salon du développement. Ces finalistes avaient été sélectionnés parmi 1 130 candidats provenant de plus de 100 organisations établies dans plus de 80 pays. Les propositions devaient se limiter à quatre pages, et chacun d’entre eux avait 15 minutes pour présenter la sienne.

Au terme de cet échange d’idées de deux jours, James Wolfensohn, président de la Banque mondiale, est monté sur scène pour remettre des subventions totalisant cinq millions de dollars à 44 équipes (114 000 dollars par projet en moyenne). L’événement a remporté un succès phénoménal. Comme l’a expliqué Dennis Whittle, « le Development Marketplace a non seulement donné lieu à des idées et à des projets extrêmement novateurs, mais il nous a aussi permis de prendre des décisions quant au financement en seulement deux jours, soit à la vitesse de la lumière comparativement aux normes habituelles de la Banque mondiale. L’exercice a été une innovation radicale, qui nous a ouvert les yeux. »

Après l’attribution des subventions, une femme sud-africaine s’est approchée de Dennis Whittle et Mari Kuraishi. D’une voix forte, elle leur a dit : « Je n’ai pas gagné ». Dennis Whittle lui a répondu : « J’en suis désolé, mais c’est un concours, et tout le monde ne peut pas gagner. » Elle lui a rétorqué : « Je vous assure que mon idée est excellente, et ce n’est pas parce que la Banque mondiale refuse de la financer que d’autres ne l’appuieront pas. »

Hanté par les paroles de cette femme, Dennis Whittle décida, plusieurs mois plus tard, de quitter son poste au sein de l’organisme de développement. Mari Kuraishi en fit autant. Leur but était désormais de mettre sur pied un véritable marché destiné au financement de projets de développement, un endroit où il y aurait plus de gagnants que de perdants. C’était un défi de taille.

Élaborer un tableau de bord

Sans trop d’efforts, Dennis Whittle et Mari Kuraishi ont cerné plus de 1 000 projets prometteurs dans des pays en développement, des idées susceptibles d’avoir un impact considérable tout en ne nécessitant qu’un financement faible ou modéré. Il semblait logique de croire que si de tels projets étaient présentés à une vaste communauté de bailleurs de fonds potentiels, l’argent abonderait. Baptisé Development Space, leur concept n’avait pas encore fait ses preuves, et il semblait prématuré de mettre sur pied une fondation par laquelle transiteraient les contributions destinées aux projets retenus. Ils ont donc établi un partenariat avec la fondation Calvert, un organisme sans but lucratif qui disposait de la logistique nécessaire pour accepter les dons déductibles d’impôt en vertu du système fiscal américain, un attrait important aux yeux des donateurs américains.

Il restait un problème crucial à régler : Dennis Whittle et Mari Kuraishi pourraient-ils exploiter Internet — concevoir une sorte de eBay pour les projets de développement — pour jumeler les contributions philanthropiques aux projets de développement de manière efficace et durable sur le plan économique ? Plus particulièrement, cela posait trois questions primordiales, auxquelles on ne pouvait répondre à ce moment-là que par un acte de foi :

1. Les gens présenteraient-ils des projets de grande qualité, crédibles et attrayants sur Internet ?

2. Un nombre suffisant de donateurs contribuerait-il aux projets directement sur Internet ?

3. Comment financerait-on le marché et comment le structurerait-on pour assurer une certaine durabilité financière ? Autrement dit, existe-t-il un modèle de gestion viable ?

Les réponses à ces questions fondamentales assureraient la réussite du projet ou causeraient sa perte : en y répondant, on saurait si l’idée avait réellement un potentiel de réussite. Pour obtenir des réponses, il fallait lancer un site pilote et tester certaines hypothèses. Le duo a donc élaboré un tableau de bord pour s’orienter efficacement et pour effectuer une vérification expérimentale.

Des données décevantes

Heureusement, le concept Development Space a suscité une réponse aussi immédiate que favorable. Les dons ont commencé à entrer au compte-gouttes. Les médias d’information ont également accordé une couverture très positive au projet. Mais il y avait plus de défis à relever que de bonnes nouvelles. Selon les résultats obtenus par Development Space, les clients avaient besoin de garanties quant à la qualité et, bien sûr, à la crédibilité des projets affichés sur le site. En se fondant sur l’analogie avec eBay, Dennis Whittle et Mari Kuraishi ont imaginé de faire appel au même système d’évaluation par l’utilisateur. L’idée semblait logique : pourquoi les donateurs ne pourraient-ils pas se fier aux évaluations d’autres donateurs pour se rassurer quant à la qualité d’un projet ?

Cela ne pouvait pas fonctionner, pour deux raisons. D’abord, en vertu du Patriot Act qui venait d’être adopté, les contributions caritatives devaient faire l’objet d’un examen approfondi pour s’assurer que les fonds ne soient pas versés à des organisations associées à des acti­vités terroristes. Ensuite, avant de faire un don, les donateurs voulaient obtenir l’assurance de la part d’un tiers crédible que le projet était viable. Comme l’explique Dennis Whittle, « les internautes se sentent à l’aise d’acheter des biens en se fiant à l’opinion d’autres consommateurs, mais ils tiennent à profiter d’une expertise fiable pour trouver des projets sérieux qu’ils financeront par des dons philanthropiques ». Il fallait donc adapter le modèle pour permettre à des organisations partenaires crédibles d’effectuer une enquête de qualité sur le terrain. Une fois de plus, comme dans le tableau de bord d’origine, les données se sont avérées révélatrices. Bien que Dennis Whittle et Mari Kuraishi n’aient pas renoncé à leur rêve, leur première idée ne pouvait tout simplement pas fonctionner comme ils l’avaient espéré. Le moment était venu de concevoir une solution de rechange.

Vers GlobalGiving

Dennis Whittle et Mari Kuraishi ont alors conçu un nouveau plan qui se distinguait passablement du premier. Cette fois, les projets provenaient et dépendaient entièrement d’un réseau de partenaires, sur lesquels on compterait pour trouver des idées exploitables et les positionner sur le marché. Ashoka, une organisation très crédible qui recherche et construit des réseaux d’entrepreneurs sociaux prometteurs dans les pays en développement, est devenue le premier partenaire du projet. Cette collaboration a engendré un réseau de relations d’affaires, de même qu’un capital de confiance, ce qui a conféré aux projets une bonne dose de crédibilité.

Second point d’achoppement : l’organisation avait désespérément besoin de nouveaux donateurs. À quoi sert d’offrir des projets s’il n’y a pas de bailleurs de fonds ? Heureusement, Hewlett-Packard (HP) s’intéressait à Development Space depuis les débuts. Enthousiaste à l’idée qu’avaient Dennis Whittle et Mari Kuraishi d’utiliser Internet pour transformer le financement du développement international, HP a invité l’organisation à s’associer à la campagne de dons de ses employés. C’était une idée brillante qui a permis d’attirer des donateurs de manière beaucoup plus efficace, sans gaspiller de ressources rares pour chercher de nouveaux candidats donateurs.

De plus, le moment était venu pour Development Space de créer sa propre fondation. On souhaitait ainsi éviter la confusion générée lorsque les donateurs étaient dirigés vers la fondation Calvert. L’entreprise en a profité pour changer de nom, passant de Development Space à GlobalGiving, également utilisé par la nouvelle fondation. Un conseil d’administration distinct a été mis sur pied, de même que des mécanismes qui lui assuraient le degré d’indépendance voulu pour se conformer aux lois.

GlobalGiving avait développé un modèle financier qui s’appuyait sur plusieurs composantes, dont le soutien philanthropique de la nouvelle fondation. Ainsi, à peu près à la même époque, Dennis Whittle et Mari Kuraishi ont lancé une grande campagne de financement, ciblant des fondations et des individus bien nantis, et ont amassé suffisamment d’argent pour passer à l’étape suivante.

Enfin, il fallait revoir la plateforme technologique d’origine. Dennis Whittle et Mari Kuraishi avaient besoin de meilleurs outils pour suivre et analyser le trafic et le comportement des utilisateurs, tout en améliorant la présentation du site Web afin de le rendre plus convivial et d’optimiser l’expérience de navigation du donateur.

Encore un nouveau tableau

Avec autant de changements, un nouveau tableau de bord s’imposait. L’objectif était bien sûr de confirmer ou d’invalider leurs nouvelles orientations d’affaires. Les trois questions du départ restaient sans réponse, puisque les premiers balbutiements de l’entreprise n’avaient pas permis de démontrer qu’elle pourrait attirer suffisamment de projets de qualité ou de donateurs, ni que le modèle de gestion fonctionnerait. Cependant, les leçons apprises avec le tableau de bord précédent ont permis d’adapter leurs hypothèses en fonction des décisions qui caractérisaient la solution de rechange de GlobalGiving.

Une fois le nouveau site lancé, les choses ont commencé à bouger. Avec Ashoka comme partenaire et grâce à la crédibilité de cette organisation, les vannes se sont ouvertes. Trois cents projets ont afflué (si rapidement que l’équipe a dû temporairement cesser d’en accepter pour éviter un trop grand déséquilibre entre le nombre de projets proposés et les contributions des donateurs). Mais une fois la campagne auprès des employés de HP enclenchée, l’augmentation presque immédiate du nombre de donateurs et de l’argent disponible a donné un surcroît de confiance à toute l’équipe : un précieux coup de pouce pour le moral des troupes !

Le rôle de HP ne s’est pas arrêté là. L’entreprise a également contribué à promouvoir l’idée auprès d’autres sociétés. Très vite, GlobalGiving a établi des partenariats avec plusieurs autres entreprises, y compris Visa, Advanced Micro Devices et North Face.

La solution de rechange fonctionne-t-elle ?

Au moment d’écrire ces lignes, GlobalGiving a financé des milliers de projets, s’est bâti un solide réseau de partenaires, et a mis en place des mécanismes très fiables pour assurer la crédibilité des projets. Bien que ces résultats ne soient pas tout à fait à la hauteur des projections d’origine, l’entreprise continue sur sa lancée, et l’équipe reste engagée et optimiste. Aujourd’hui, Dennis Whittle et Mari Kuraishi trouvent plutôt amusantes certaines de leurs hypothèses de départ et se réjouissent de constater à quel point ils ont beaucoup appris depuis ce jour. Le plan initial n’avait aucune chance de réussir, mais la solution de rechange fonctionne très bien !

Qu’est-ce qui attend maintenant Global­Giving ? Comme l’explique Dennis Whittle, « le plus important, ce n’est pas la qualité du plan d’affaires initial, mais bien la capacité de l’équipe d’élaborer successivement différents plans d’affaires jusqu’à ce qu’elle trouve celui qui fonctionnera. La clé, c’est d’expérimenter rapidement mais intelligemment, avec discipline ». Une chose est certaine : l’acquisition continue du savoir se trouve désormais au cœur de la culture de l’organisation.

Les leçons du tableau de bord

DANS L’HISTOIRE DE GLOBALGIVING, quatre domi­nantes ressortent :

1. À chaque étape, les fondateurs se sont concentrés sur les plus grands risques auxquels ils étaient confrontés ;

2. Les tableaux de bord sont dotés d’une nature changeante. Ils se modifient au fil du temps ;

3. Les mesures quantitatives ont une très grande importance ;

4. Mieux vaut adopter un état d’esprit axé sur l’expérimentation, qui s’appuie dès le départ sur l’hypothèse que le premier plan n’était probablement pas au point (autrement dit, ne pas craindre les remises en question).

Alors que pour à peu près tout le monde, les tableaux de bord ne tiennent compte que de la troisième dominante, les autres ont permis aux fondateurs de se démarquer par leur façon d’utiliser cet outil.

Bien sûr, les tableaux de bord différeront d’une nouvelle entreprise à l’autre, selon les expériences antérieures de chaque équipe de direction, la nature des actes de foi qu’il leur faudra faire, la culture de l’organisation et l’étape à laquelle se trouve l’entreprise. Mais essentiellement, ils présenteront les caractéristiques suivantes :

• Les questions qui nécessitent un acte de foi sont les moteurs d’un projet ;

• Ces questions entraînent différentes hypothèses ;

• Ces hypothèses doivent être vérifiées à l’aide de paramètres très précis à un moment fixé dans le temps ou pendant une certaine période ;

• Cela procurera le déclic sur lequel appuyer ses décisions et servira, selon toute vraisemblance, à apporter des correctifs de mi-parcours.

Stimuler le processus d’innovation

La valeur d’un tableau de bord est liée aux questions sans réponse et aux hypothèses non vérifiées — les actes de foi — qui le caractérisent. Comment trouver les questions qui comptent vraiment au moment présent ? Posez-vous les questions suivantes :

• Quelles hypothèses sous-jacentes à votre entreprise vous mettent mal à l’aise ou vous empêchent de dormir la nuit ?

• Qu’aimeriez-vous savoir que vous ignorez en ce moment ?

• Quelle information vous mènerait à une conclusion autre que celle à laquelle vous parvenez actuellement ?

• Quelle question vitale, si elle recevait une réponse favorable, vous conforterait quant à la direction prise par votre entreprise ?

• Quelle question vitale, si elle recevait une réponse défavorable, vous ferait changer de cap sur-le-champ ?

Que dire à vos investisseurs

Presque toutes les nouvelles entreprises ont besoin d’un peu d’argent venant d’ailleurs. Que ces fonds viennent de l’unité Innovation de votre grande entreprise ou des sources traditionnelles des entreprises en démarrage (famille, amis et… fous !), ou encore d’investisseurs providentiels ou de capital-risqueurs, on est en droit de se demander dans quelle mesure des idées controversées — à savoir que le plan initial dans lequel ces gens ont investi ne fonctionnera probablement pas — décourageraient les bailleurs de fonds.

La bonne nouvelle, c’est que les meilleurs investisseurs — ceux qui ont déjà effectué le parcours entrepreneurial à plusieurs reprises — savent que changer le plan fait simplement partie du processus. Si dès le départ vous présentez votre projet de manière appropriée, c’est-à-dire de façon à convaincre les investisseurs d’en faire partie et de financer votre cheminement expérimental soigneusement structuré, grâce à un tableau de bord bien préparé, vers une meilleure solution de rechange, avec tous les risques (acte de foi et autres) que cela comporte, vos investisseurs sauront que vous avez longuement examiné la question : si vous revenez avec des données significatives, ils comprendront que le moment est venu de passer à la solution de rechange.

Il vous faudra peut-être informer vos investisseurs en ce qui a trait à la nécessité de changer vos plans, surtout s’ils ont peu d’expérience ou s’ils ont une approche des affaires très conservatrice. Même un parcours qui se rendra jusqu’à la énième solution de rechange peut aussi connaître un heureux dénouement !

Pas une panacée

Évidemment, les tableaux de bord ne constituent pas un remède miracle pour les innovateurs, qu’ils évoluent dans une petite ou une grande entreprise, existante ou nouvelle. Les incertitudes qui planent sur n’importe quel véritable travail d’innovation ne disparaîtront pas. Mais les tableaux de bord bien conçus offrent de nombreux avantages que les entrepreneurs ne devraient pas négliger, quelle que soit la situation :

• Ils aident la direction à concentrer ses efforts sur les problèmes essentiels au moment présent.

• Ils aident aussi à mettre fin rapidement à un projet quand les données recueillies indiquent que cela s’impose.

• Les résultats obtenus, en général, se traduisent en chiffres, et non en mots. Ce sont les chiffres qui révèlent ce qui se passe vraiment dans la nouvelle entreprise. Trop souvent, les mots ne servent qu’à masquer la réalité.

• Les bons tableaux de bord ramènent l’attention sur les revenus qui seront générés concrè­tement, y compris quand et à quel coût, plutôt que d’évoquer des prévisions fantaisistes ou, tout au moins, fortement hypothétiques. Malheureusement, pour les entreprises véritablement novatrices, il serait farfelu de tenter de prévoir les revenus, même si les investisseurs et les membres de la haute direction continuent d’exiger de telles prévisions.

• Ils contribuent à faire comprendre aux dirigeants qu’à titre de leader d’une entreprise en démarrage ou de tout autre projet d’innovation, leur mission ne consiste pas à mettre en œuvre le plan proposé à l’origine sans jamais y déroger. Ils doivent plutôt découvrir — le plus rapidement possible et au moindre coût — les parties du plan (s’il y en a !) qui sont bien ciblées, et celles qui ne le sont pas. Dès lors, ils ont pour responsabilité de rajuster le tir et d’adopter une meilleure solution de rechange.

Bref, le moment est venu d’être réaliste. Et de vous défaire du carcan que représente le plan initial. Lancez-vous plutôt dans un parcours d’apprentissage qui vous mènera, vous et vos partenaires, à une solution de rechange plus viable et plus dynamique.

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