Les dernières données de l'Institut de la statistique du Québec montrent que les quatre régions qui composent la banlieue montréalaise réussissent à maintenir leur niveau de vie uniquement en raison de la ville centre et des emplois de qualité qui s'y trouvent. La banlieue est donc toujours aussi dépendante de la ville centre, malgré ce que prétendent ses maires ?

C'est un fait, et c'est pourquoi ces chiffres ne me surprennent pas. C'est frustrant pour les maires de la banlieue mais ils ne peuvent pas dire le contraire : la majorité des gens qui résident en banlieue n'y travaillent pas. Ils y fréquentent les commerces, oui, mais c'est tout.

Cela dit, il y a des initiatives intéressantes : Laval a profité de la présence de l'INRS sur son territoire. Elle a créé des emplois de qualité et a attiré des talents avec Laval Technopole. Les Basses-Laurentides aussi ont attiré des emplois en haute technologie, mais ça ne suffit pas à faire travailler tous les gens qui y vivent. Et c'est peut-être mieux ainsi : est-ce qu'on veut de ces villes péri-urbaines, comme Houston, qui détruisent les villes centres ?

La faiblesse économique des banlieues est-elle donc une bonne nouvelle pour la ville centre ?

C'est un débat de société, en tout cas. Jusqu'où veut-on que le développement de la périphérie se fasse ? Le danger, lorsque les gens vivent et travaillent en banlieue, c'est l'" effet de beigne " sur la ville centre et les problèmes économiques qui en découlent.

Comment expliquer le discours de certains élus de banlieue qui aiment se croire indépendants de la ville centre ?

Les élus et les citoyens de la banlieue détestent se voir ainsi dépendants et ils veulent croire le contraire. Je vis à Gatineau. C'est une banlieue d'Ottawa, même si on ne veut pas le dire. Ça fait partie du discours : en faisant valoir le nombre d'habitants, les maires veulent plus d'argent pour les routes et les autres infrastructures, comme si leurs villes étaient indépendantes. À Laval, on est allé jusqu'à tenter de recréer de toutes pièces un centre-ville. Mais un centre-ville, ça ne s'invente pas comme ça !

( CV )

Nom: Rémy Tremblay

Âge: 42 ans

Fonction: Professeur de géographie

Organisation: TELUQ-UQAM

Titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les villes du savoir, il s'intéresse notamment à la qualité de vie en ville et en banlieue.

martine.turenne@transcontinental.ca