Le Panama est «le dernier des Mohicans» de l'évasion fiscale

Publié le 04/04/2016 à 14:17

Le Panama est «le dernier des Mohicans» de l'évasion fiscale

Publié le 04/04/2016 à 14:17

Par AFP

Le scandale mondial d'évasion fiscale surnommé Panama Papers, qui implique des hauts responsables politiques, sportifs ou milliardaires, renforce considérablement l'image de ce pays d'Amérique centrale comme plaque tournante du blanchiment d'argent. 

Ce petit pays de quelque quatre millions d'habitants, régulièrement accusé d'être un paradis fiscal, ce que contestent les autorités, est le siège de nombreuses compagnies offshore et se retrouve régulièrement mis en cause pour l'opacité de son système financier. Son secteur financier florissant représente, en comptant les revenus issus du célèbre canal de Panama, près de 80% du PIB.

Outre un taux de croissance parmi les plus élevés du continent, cette nation, qui a adopté le dollars comme monnaie et dispose de l'une des principales zones franches du continent américain, peut se vanter d'un taux inflation particulièrement bas. Ces dernières années, les gouvernements successifs se sont efforcés de présenter le pays comme un centre financier favorable aux affaires, à l'image de Singapour, et qui souhaite attirer davantage d'entreprises et d'investisseurs.

Après avoir subi une forte pression de la communauté internationale, et plus particulièrement des Etats-Unis, le Panama a redoré son image, au point de parvenir à sortir de la liste "noire" des pays suspectés de blanchiment de capitaux.

Ironie du calendrier, il y a quelques semaines, mi-février, le président panaméen Juan Carlos Varela se félicitait que le pays soit également sorti de la liste "grise" de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme du Groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux (GAFI), après l'adoption d'une série de réformes par son gouvernement.

Interview

Le directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l'OCDE, Pascal Saint-Amans, considère que le Panama concentre «une série de problèmes» dans la lutte contre l'évasion fiscale et se comporte comme «le dernier des Mohicans».

Question: Les révélations des "Panama Papers" démontrent-elles que la communauté internationale ne parvient pas à lutter contre l'évasion fiscale?

Réponse: Oui et non. Oui, car les révélations montrent que l'évasion fiscale existe. Et non, car les "Panama Papers" dévoilent une concentration croissante de cas à Panama, en raison de la lutte contre l'évasion fiscale dans le reste du monde. Demain, avec l'échange automatique de renseignements, il y a aura un vrai changement. Ceux qui ne souhaitent pas déclarer leurs revenus n'ont plus beaucoup d'endroits où aller. Ils ont le Panama, le dernier des Mohicans. Ce pays fait de la résistance. Face à cette situation, il faut maintenant que le Panama décide de prendre des engagements et arrête de se faire de la pub en disant qu'il ne respecte aucune des règles internationales. Nous avons des standards. Des règles internationales. Le vrai souci, c'est qu'il faut les appliquer.

Q: Le GAFI (groupe d'action financière) a pourtant retiré le Panama de sa liste grise en février...

R: Le Panama a une stratégie qui consiste à faire des petits progrès pour essayer d'arracher sa sortie des listes grises. Il l'a obtenu du GAFI. Il est aussi passé en phase 2 dans le cadre du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements de l'OCDE. Le pays fait des petits progrès. Mais comparé à ce qu'ont accompli d'autres places financières, en prenant les connues et les plus résistantes comme la Suisse ou le Luxembourg, Panama n'a presque rien fait. Ce pays n'a pas pris l'engagement de procéder à l'échange automatique de renseignement. Il s'en fait d'ailleurs une fierté. Panama est la seule place financière importante à avoir refusé de mettre en place des systèmes pour collecter les infos. Lors d'une réunion du Forum mondial à la Barbade l'an dernier, le Panama a dit qu'il procéderait à l'échange d'information. Comme par hasard, c'était avant la présentation de notre rapport au G20. Juste après, les autorités ont dit qu'elles n'appliqueraient pas les standards de l'OCDE. Elles nous ont dit que nous n'étions pas légitimes. En février, lors du G20 Finance de Shanghai, nous l'avons signalé.

Q: Reste-t-il d'autres paradis fiscaux?

R: Pour les places financières d'importance, la réponse est non. Parmi les pays ayant refusé l'échange automatique de renseignements, il reste le Bahreïn, Nauru, Vanuatu et le Liban. On ne peut pas dire que ce soient vraiment des compétiteurs de la Suisse ou du Panama. Il y a les pays qui ont pris l'engagement de signer la convention multilatérale, mais qui ne l'ont pas fait, parmi eux les Bahamas, les Emirats Arabes Unis et le Panama. Parmi ceux qui n'étaient pas vraiment bons dans l'échange à la demande, qui ont trainé passablement les pieds avant d'entrer dans la phase 2, il y avait le Panama et la Suisse. Mais la Suisse est vraiment dans un mouvement de progrès. Il y a donc une concentration de problèmes à Panama.

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