L'harmonie tient à peu de clauses


Édition du 07 Mars 2015

L'harmonie tient à peu de clauses


Édition du 07 Mars 2015

Rassurer les investisseurs

Ainsi, il est assez facile de comprendre pourquoi les investisseurs de capital de risque insisteront pour inclure une telle disposition. Ayant en tête les intérêts à long terme de l'entreprise, ils voudront se protéger contre le départ dévastateur d'un des cofondateurs.

Qui plus est, l'oubli de cette clause peut aussi entraîner des conséquences catastrophiques à l'occasion des rondes de financement subséquentes. Il est probable que plusieurs anges- investisseurs ou investisseurs en capital de risque s'abstiennent tout simplement d'investir quand ils font face à une telle situation. Après le départ d'un cofondateur ayant fait un «trou» dans le capital-actions, ceux-ci considéreront souvent que la firme manquera de capital interne pour être viable en cas d'expansion et que les autres cofondateurs n'auront pas l'intérêt suffisant pour continuer à développer la boîte après leur dilution future aux tours de financement subséquents.

Alors, comment structurer cette clause restrictive ? Selon Adam Saskin, qui recommande aux fondateurs d'intégrer systématiquement cette clause à leur entente des actionnaires, la pratique veut actuellement que celle-ci «permette le versement des actions émises sur une période de 4 ans, où 25 % des actions sont versées à la fin de l'an 1, tandis que les 75 % des actions restantes seront versées mensuellement sur les 3 années suivantes». Bref, s'il y a un départ hâtif dans la première année, le cofondateur ne recevra rien. À son départ, la fraction des parts qui n'a pas été octroyée deviendra sujette au rachat par l'entreprise, typiquement à la valeur d'achat initiale. Cette clause est aussi souvent utilisée pour lier les premiers employés clés de l'entreprise, au-delà de l'équipe de cofondateurs, et favoriser la loyauté des membres de l'équipe.

Si j'en parle, c'est que nous n'avions pas inclus cette clause au moment de l'incorporation de notre entreprise Busbud. Lors de l'entente initiale, vu que je connaissais mes cofondateurs depuis 15 ans et qu'une bonne entente régnait, nous avions choisi de ne pas nous prévaloir de cette clause. Cela dit, nous avons vite rectifié le tir plus tard (sans conséquence, très heureusement !) au premier tour de financement, à la demande de nos investisseurs.

Depuis ce temps, au cours de mes activités de mentorat dans différents programmes, j'ai dû recommander à des dizaines de jeunes fondateurs d'ajouter cette clause dans leur entente pour leur propre bien et d'expliquer à leurs cofondateurs que c'est une protection qui bénéficiera à tous. J'espère donc que cet article aidera plusieurs autres entrepreneurs à éviter cette erreur classique de démarrage.

Souvent, on associe entrepreneuriat et liberté. Pourtant, quand on travaille en équipe (et les études ont démontré que les investisseurs de capital de risque préfèrent investir dans des équipes de deux à quatre fondateurs ayant des talents complémentaires), il importe souvent d'accepter certaines protections venant restreindre notre liberté dans le but d'accorder les intérêts du groupe et de favoriser l'harmonie à long terme. Bâtir une entreprise à succès, ça peut prendre de 5 à 10 ans. Les entrepreneurs doivent comprendre qu'au lieu de simplement obtenir leur capital-actions par défaut, ils devront être prêts à travailler pour le mériter au fil du temps.

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