De l'argent qui tomberait du ciel, vraiment ?

Publié le 07/10/2016 à 11:57

De l'argent qui tomberait du ciel, vraiment ?

Publié le 07/10/2016 à 11:57

Par Jean Gagnon

Photo: 123rf

Montréal, Square Victoria, 8h30 mercredi matin. Un hélicoptère survole les lieux et laisse tomber des liasses de billets de banque que les passants n’ont qu’à ramasser. La place est bondée de monde, car l’opération de la Banque du Canada avait été annoncée quelques jours plutôt.

Surréaliste, pensez-vous ? Peut-être pas tant que ça.

L’hélicoptère à argent est le plus récent outil invoqué pour tenter de relancer l’économie mondiale sur de meilleures bases et d’assurer une saine augmentation de l’inflation. Il consiste en un transfert d’argent directement des banques centrales vers les consommateurs et/ou les gouvernements.

Évidemment, l’hélicoptère est une métaphore. Elle a été utilisée pour la première fois il y a environ 50 ans par Milton Friedman, l’économiste de l’Université de Chicago réputée pour ses théories monétaires. L’expression a été reprise il y a quelques années par Ben Bernanke, ex-président de la Réserve fédérale américaine (Fed).

Certaines banques centrales avouent ouvertement qu’elles arrivent au bout des outils à leur disposition pour stimuler leur économie, écrit Hendrix Vachon, économiste senior, Mouvement Desjardins dans une note destinée aux clients et aux membres de l’institution financière. Elles sont de moins capables d’acheter des actifs, telles les obligations de gouvernements et de sociétés à cause d’un manque de titres, et les politiques de taux d’intérêt très bas, voire même négatifs pratiquées par certaines ne donnent par les résultats espérés.

« Plutôt que de miser sur des efforts supplémentaires de la part des gouvernements déjà très endettés, une solution alternative serait le financement monétaire », explique M. Vachon. « Ce sont les banques centrales qui stimuleraient la demande via des transferts directs d’argent aux gouvernements et aux consommateurs sans aucune obligation de remboursement », dit-il. L’argent ne tomberait pas du ciel, mais ce serait tout comme.

Aujourd’hui, la faible croissance économique est devenue un mal chronique contre lequel les banques centrales sont parties en guerre, explique A. Gary Shilling, président de la firme de recherche économique A. Gary Shilling & Co., de Springfield, New Jersey. « Tous les achats d’actifs au cours des dernières années par la Fed, la Banque d’Angleterre, la Banque centrale européenne (BCE) et la Banque du Japon n’ont pu relancer significativement l’activité économique, et les taux d’intérêt sont déjà à zéro, ou même négatifs », dit-il. Voilà pourquoi on parle de l’hélicoptère à argent.

En sommes-nous rendus là ? On en est certainement très près au Japon, croit Hendrix Vachon. « Comme l’endettement totalise déjà 200 % du PIB, le gouvernement ne peut plus emprunter », dit-il. De plus, les taux d’intérêt ont un effet pervers sur la confiance. « On note une augmentation de l’achat de coffres-forts, ce qui laisse croire que les individus pourraient songer à convertir bientôt leur argent virtuel en argent sonnant », dit-il.

L’Europe pourrait aussi être tentée par l’hélicoptère à argent à cause de son incapacité à relancer son économie. Mais cette mesure serait extrêmement difficile à implanter compte tenu de la réglementation complexe de l’Union européenne.

Et au Canada ? Les probabilités sont très faibles, mais la chose n’est pas impossible à plus long terme, selon l’économiste de Desjardins. « Ce ne sera pas avant que l’on ait connu une bonne récession et que tous les autres stimulants monétaires et budgétaires auront échoué. On parle d’une décennie entière où tout irait mal », dit Hendrix Vachon.

Inutile alors de vous rendre au Square Victoria demain matin, sauf bien sûr si c’est votre lieu de travail. Au Canada, l’hélicoptère à argent n’est pas pour demain.

À la une

Logistique: sale temps pour les entreprises

03/05/2024 | François Normand

ANALYSE. Depuis 2020, les crises se multiplient, et les travailleurs du CN et du CPKC pourraient bientôt être en grève.

Les travailleurs du CN et du CPKC se donnent un mandat de grève

Un arrêt de travail au CN et au CPKC simultanément pourrait perturber les chaînes d’approvisionnement.

Bourse: Wall Street salue l’accalmie de l’emploi américain

Mis à jour le 03/05/2024 | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. La Bourse de Toronto prenait plus de 100 points à la fermeture.