Amazon à Montréal: oui à une offre généreuse, mais pas d'excès svp

Offert par Les Affaires


Édition du 23 Septembre 2017

Amazon à Montréal: oui à une offre généreuse, mais pas d'excès svp

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Édition du 23 Septembre 2017

Par Jean-Paul Gagné

Le grand patron d'Amazon, Jeff Bezos. Photo: Gettyimages

Amazon(Nasdaq, AMZN), le géant mondial du commerce électronique, a invité les grandes villes des États-Unis et du Canada à lui proposer un site pour l'établissement de son deuxième siège social (HQ2).

Au moins cinq villes canadiennes ont manifesté leur intérêt : Montréal, Toronto, Vancouver, Calgary et Edmonton. Aux États-Unis, on mentionne les noms d'Atlanta, Pittsburgh, Chicago, Dallas, Boston et Washington. Puisque HQ1 est à Seattle, on peut penser que HQ2 sera situé au centre de l'Amérique du Nord ou plus à l'est.

Il y a de bonnes chances que Toronto et Montréal soient considérées pour HQ2 par le fondateur et président d'Amazon, Jeff Bezos , l'un des hommes les plus riches de la planète. Amazon arriverait au quatrième rang parmi les plus importantes sociétés du monde avec 380 000 employés et des revenus de 136 G$ US en 2016.

L'investissement d'Amazon, qui est évalué à 5 G$ sur une période de 15 à 17 ans, pourrait fournir 50 000 emplois à HQ2, soit 10 000 de plus qu'à Seattle. Il s'agira d'une infrastructure technologique qui transformera l'agglomération qui en héritera et qui lui procurera un prestige enviable.

La partie est loin d'être jouée, mais Montréal offre des attraits pour ce que recherche la multinationale américaine. Elle a un bassin de main-d'oeuvre qualifiée. Elle possède des universités qui ont beaucoup d'expertise dans les nouvelles technologies numériques, telle l'intelligence artificielle, qu'utilise abondamment Amazon.

Montréal a une population multiethnique et multilingue nombreuse, ce qui est un avantage indéniable pour une société qui fait des affaires à la grandeur de la planète. Amazon réalise 58 % de son chiffre d'affaires dans la vente en ligne en Amérique du Nord et 32 % dans le commerce électronique à l'international, mais 10 % de ses revenus viennent de sa division AWS, qui offre des services en technologies numériques et en intelligence artificielle dans de nombreux pays du monde. La présence à Montréal de chercheurs réputés dans ces domaines et la venue chez nous de Google, de Microsoft et de Facebook constituent des atouts indéniables.

Sur le plan immobilier, Montréal dispose aussi d'un site attrayant, soit le terrain jadis occupé par la piste de courses Blue Bonnets, qui est situé à proximité de l'aéroport, de l'autoroute 40 et d'une station de métro. Ce site compte 107 acres, ce qui convient au besoin d'espace de 100 acres recherché par Amazon.

Montréal offre aussi une qualité de vie enviable et un coût de la vie modéré. Ses systèmes de santé et d'éducation sont efficaces. Les activités culturelles y foisonnent, et on trouve de grands espaces verts à proximité.

La question qui tue

Si Jeff Bezos a sollicité des offres, c'est bien sûr parce qu'il veut profiter de la réputation de sa société pour maximiser les avantages financiers et fiscaux qu'il pourra tirer de son choix. Sans aucun doute, les retombées économiques et technologiques d'un siège social aussi prestigieux que HQ2 et la réputation qu'il apporterait à Montréal doivent retenir l'intérêt des pouvoirs publics à l'égard de ce projet.

HQ2 ne sera pas l'équivalent de l'usine de 10 G$ US que le groupe industriel taïwanais Foxconn, l'un des plus importants fabricants de matériel informatique au monde, envisage de construire au Wisconsin. Pour s'y établir, Foxconn obtiendrait 1,5 G$ de crédits d'impôt à la création d'emploi, 1,35 G$ de crédits d'impôt à l'investissement et 150 M$ en exemptions de taxes de vente, soit un total de 3 G$. C'est énorme. Cette aide pourrait représenter de 15 000 à 19 000 $ US par emploi annuellement. Or, cette usine procurera surtout du travail d'assemblage et de montage qui ne sera pas comparable à celui des futurs employés de HQ2, dont les tâches seront stratégiques, technologiques et mieux rémunérées. On peut donc prévoir qu'Amazon exigera des centaines de millions de dollars d'avantages fiscaux pour établir ses pénates. Et comme l'entreprise aura le gros bout du bâton dans les négociations avec les villes, gageons que la facture sera élevée.

Bien sûr, nos gouvernements doivent tout mettre en oeuvre pour séduire Jeff Bezos, mais il y a une limite à puiser dans les poches des contribuables pour l'enrichir davantage. Il est courant que de grandes sociétés se livrent à un chantage indécent avant de donner la première pelletée de terre d'une usine ou d'un siège social. Il faut vivre avec ce système, mais il faut aussi se respecter. Donc, oui à une offre généreuse et innovatrice à Amazon, mais sans tomber dans les excès. Si Montréal répond bien aux besoins d'Amazon, il faut espérer que celle-ci n'abusera pas de son pouvoir de négociation et qu'elle respectera la communauté qui l'accueillera. C'est aussi cela, l'éthique.

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