Rentables, les joueurs vedettes?

Publié le 28/06/2010 à 15:04

Rentables, les joueurs vedettes?

Publié le 28/06/2010 à 15:04

Par Premium

Nombre d’entreprises s’offrent les services d’employés ultra-compétents sans pour autant en retirer tous les bénéfices escomptés en raison d’une gestion défaillante.

La récession économique a ouvert la porte à l’embauche à rabais d’employés de haut niveau. Les déboires de grandes institutions, comme feu le cabinet d’avocats Heller Ehrman et feu la banque d’affaires Lehman Brothers, ont ainsi permis à des concurrents de recruter leurs meilleurs éléments. Mais voilà, le bilan de ces acquisitions est souvent mitigé, car plusieurs entreprises ont été incapables de bien intégrer les employés vedettes en question au sein de leur entreprise. Après tout, une organisation ne peut se contenter d’embaucher des personnes hyper compétentes et espérer qu’elles brillent d’emblée dans leur nouvel environnement de travail. La clé ? Favoriser la collaboration entre ces nouvelles recrues et des collègues de haut niveau.

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En fait, il faut miser sur une dynamique connue sous le nom d’« effet Matthieu » (Matthew Effect1) : plus une organisation compte d’employés compétents, plus il lui est facile d’attirer et de retenir ses nouvelles têtes d’affiche. En vertu de ce postulat, les gestionnaires doivent donc réaliser que toute décision reliée à l’embauche de telles personnes peut avoir un impact considérable sur le rendement de leurs collègues immédiats, voire sur ceux d’autres équipes. Ils doivent aussi comprendre que, si certaines méthodes de gestion peuvent maximiser le niveau de performance de leurs champions, d’autres peuvent les amenuiser tout autant.

De nombreux effets bénéfiques

Dans une équipe, l’influence des personnes hyper compétentes est inestimable, et ce, pour au moins quatre raisons :

1. Elles sont des sources d’information pré¬cieuses. L’échange d’information peut emprunter plusieurs voies, la plus simple étant la communication directe de renseignements d’un employé à un autre. Toutes sont vitales, car elles permettent d’enrichir le savoir commun. Michael Blumstein, vice-président, finances, chez Gerson Lehrman Group et anciennement directeur de la recherche sur les actions américaines chez Morgan Stanley, décrit ainsi cette synergie intellectuelle : « Quand le spécialiste du secteur bancaire discute avec celui du secteur des assurances, il y a fort à parier qu’il naîtra de cet échange une vision élargie, qui n’aurait pas pu voir le jour si chacun avait travaillé de son côté. »

2. Elles maîtrisent la critique constructive. Qui, mieux que des collègues bien informés, peut tester vos idées ou critiquer objectivement votre travail ? Selon Vladimir Zlotnikov, stratège en chef, investissements, chez Sanford C. Bernstein & Co., « le rôle du stratège, c’est de mettre à l’épreuve la logique des arguments des autres membres de l’équipe, comme les gestionnaires de portefeuilles et les analystes. Il lui faut notamment prévoir la réaction du client à qui l’on entend soumettre telle ou telle idée, et s’assurer que l’argumentation prévue est inattaquable ». Ce type d’intervention est particulièrement bénéfique aux étoiles montantes en quête d’expérience que seul le temps peut apporter. Amy Schulman, avocate principale chez DLA Piper, ne jure de son côté que par les critiques constructives : « Ces soupapes de sécurité sont essentielles, puisqu’elles permettent aux employés d’être écoutés en plus de s’exprimer librement. Ceux-ci ne craignent pas d’être jugés négativement. »

3. Elles facilitent les relations entre les clients et les employés de haut niveau. Tous les employés de haut niveau ne sont pas appelés à entrer en contact avec la clientèle, mais quand c’est le cas, il est important qu’une des vedettes soit impliquée. Par exemple, l’équipe de créatifs vedettes d’une agence de publicité peut bien concevoir une campagne percutante, mais si celle-ci ne bénéficie pas de l’appui d’un directeur de compte capable de convaincre le client de l’ingéniosité de son idée, elle risque fort de ne pas être retenue. Comme le soutient Steve Balog, ancien haut dirigeant de diverses banques d’affaires, « vos intentions et vos efforts peuvent être ruinés illico si vous ne réussissez pas à les faire valoir à votre client. C’est pourquoi il est vital de bien communiquer à ses employés l’information qu’on souhaite leur voir transmettre ».

4. Elles contribuent au rayonnement des meil¬leurs joueurs de l’entreprise. Compter une star dans son équipe, c’est détenir un élément de fierté considérable pour l’ensemble du personnel. C’est ce qu’on appelle l’effet de halo. Un exemple éloquent : les programmeurs informatiques qui côtoient Steve Jobs sont généralement fiers de travailler chez Apple et sont perçus comme des personnes douées dans leur milieu, et même au-delà. Ce halo rejaillit sur tout le personnel, voire sur la notoriété de l’entreprise.

De nombreux dangers

Les employés vedettes constituent-ils ainsi la solution miracle à tous les problèmes auxquels sont confrontés les gestionnaires ? Bien sûr que non. Il ne suffit pas de recruter les meilleurs pour devenir le chef de file de son secteur. Encore faut-il offrir à chaque employé un environnement favorable au déploiement de son talent. Et ainsi éviter de commettre cinq erreurs courantes.

Le mythe du héros solitaire

L’une des pires erreurs commises par les gestionnaires est de croire qu’un seul employé, qu’il s’agisse d’un brillant analyste, d’un programmeur de génie ou d’un créatif doué, puisse transformer à lui tout seul la dynamique d’une équipe, voire d’une entreprise tout entière. Cela mène à de mauvaises décisions d’embauche, surtout quand l’heureux élu se comporte en diva au lieu de contribuer au succès de l’entreprise.

Pour éviter ce piège, il convient d’établir un processus de sélection rigoureux, qui prévoit notamment que des employés en poste participeront à des entrevues avec le candidat retenu. Cette pratique est d’ailleurs en vigueur chez Goldman Sachs, comme le raconte un de ses anciens hauts dirigeants, Steven Einhorn : « Chaque recrue potentielle doit rencontrer des employés issus d’autres services au sein de l’entreprise. Cela permet d’avoir un éventail de points de vue sur la personne que nous souhaitons embaucher. » Sans compter que cette méthode facilite l’intégration du nouveau venu.

Il faut également veiller à ce que la nouvelle tête d’affiche comprenne bien la culture de l’entreprise. Idéalement, la recrue proviendrait d’une entreprise ayant des valeurs similaires, mais ce n’est pas toujours le cas. Il faudra ainsi prendre le temps de la familiariser avec ce qui importe aux yeux des hauts dirigeants de l’entreprise et s’assurer que le message est bien compris.

La seule motivation salariale

Souvent, les employés vedettes sont trop bien payés. Résultat : le personnel en poste peut en prendre ombrage et croire que son travail n’a, tout compte fait, jamais été considéré à sa juste valeur. Le salaire ne doit constituer qu’une des motivations de la nouvelle recrue, et non la principale ou, pire encore, la seule. On peut jouer d’autres cartes pour la séduire, comme l’intégrer à une équipe déjà performante, où règne une bonne ambiance de travail. Il arrive d’ailleurs que des personnes posent leur candidature pour des emplois moins bien rémunérés que ceux qu’elles occupent, parce que l’atmosphère est meilleure et les défis à relever, plus stimulants.

L’ego démesuré

Il est naturel de vouloir s’élever au sommet de la pyramide hiérarchique, mais cela peut inciter certaines personnes à retenir des informations ou à entrer en compétition, en particulier si le temps et les ressources sont limités. Dans ce cas, les vedettes se comportent comme des rivales au lieu de travailler en harmonie avec les autres. Il faut donc favoriser l’échange d’information et multiplier les possibilités d’interactions entre employés. En effet, une fois qu’on a noué des liens avec un collègue, il est souvent plus naturel de collaborer avec lui que de lui mettre des bâtons dans les roues.

Des entreprises vont encore plus loin. Au cabinet d’avocats Duane Morris, les employés touchent des primes en fonction de leur rendement, mais aussi de leur contribution au succès des autres. « Durant un trimestre, la productivité d’un de nos avocats peut paraître faible, mais cela peut se justifier s’il a dû donner un gros coup de main à un de ses collègues », souligne Charles O’Donnell, le directeur des opérations. « Cette mesure contribue à une bonne ambiance de travail. Elle incite les employés à ne pas travailler seulement pour leur intérêt personnel, mais aussi pour le bien commun », ajoute l’ancien directeur général, Sheldon Bonovitz.

Le cloisonnement des talents

Des entreprises limitent leurs efforts à embaucher des candidats vedettes et à les maintenir dans un seul secteur de l’organisation. Elles les cantonnent ainsi à un seul poste ou à un seul secteur, alors que des employés de cette envergure ont besoin, pour mieux s’épanouir, de rayonner et d’exprimer leur talent au-delà de leur équipe immédiate. Limiter le champ d’action des employés vedettes risque d’isoler l’équipe de ces derniers au sein de l’entreprise et, par conséquent, de les empêcher de bénéficier du soutien nécessaire à leur efficacité. Par exemple, chez Goldman Sachs, les meilleurs conseillers financiers ne sont pas considérés comme de simples vendeurs d’actions d’obligations et autres titres ; ils sont aussi appelés à discuter régulièrement avec les analystes, les stratèges et les gestionnaires afin d’établir la stratégie adéquate pour chaque client.

L’aveuglement causé par la vedette

Certains mettent tant d’efforts à recruter les vedettes de leurs compétiteurs qu’ils négligent le développement du personnel déjà en poste. Cette erreur peut être fatale : démotivation générale, baisse de loyauté, etc. À cela s’ajoute le fait que de tout miser sur un seul champion s’avère risqué : qu’adviendra-t-il le jour où celui-ci aura envie de briller ailleurs ?

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