Le talent vient aux entreprises qui savent attendre

Publié le 15/12/2008 à 00:00

Le talent vient aux entreprises qui savent attendre

Publié le 15/12/2008 à 00:00

Par François Rochon

C'est un des enseignements qu'est venu livrer le Canadien Malcolm Gladwell, journaliste au New Yorker et auteur des succès de librairie The Tipping Point (Le point de bascule, publié aux Éditions Transcontinental) et Blink.

Il était de passage à Montréal afin de présenter son nouveau livre, Outliers: The Story of Success.

Le livre traite des conditions nécessaires à l'éclosion des talents exceptionnels et renferme un certain nombre de paradoxes fascinants applicables au monde de l'entreprise.

"Dans certains cas, le fait d'exiger des résultats à court terme entre directement en contradiction avec de bonnes décisions d'affaires", a expliqué M. Gladwell à un parterre de décideurs.

Un des exemples les plus frappants est celui de l'industrie de la musique, auquel il s'est attardé en détail : "Si une maison de disques engage un groupe de musiciens, elle exige qu'il obtienne du succès dès la première chanson. Si le groupe échoue, c'est fini, il est renvoyé et on n'en parle plus."

Pourtant, l'industrie musicale se plaint de ne plus pouvoir produire des marques durables et se trouve en bien moins bonne santé que dans les années 1960 et 1970.

Des années d'errance finalement fructueuses

M. Gladwell a cité un cas de de cette époque, celui de Fleetwood Mac, pour justifier l'importance de la persévérance même dans ce qui paraît à priori voué à l'échec. Le groupe britannique a végété pendant 10 ans avant de trouver sa voie. Il a évolué du blues au hard-rock en passant par le rock progressif, et à un certain moment, le chanteur, Peter Green, a même abandonné la musique pour rejoindre une secte religieuse allemande !

"Ce qui étonne, c'est que, tout au long de cette évolution, Fleetwood Mac a conservé le soutien de sa maison de disques", a fait remarquer M. Gladwell. Sans l'appui indéfectible de Warner Music à travers ses années de recherche en apparence infructueuses, Fleetwood Mac n'aurait jamais trouvé le son country rock qui l'a propulsé dans la légende et a enrichi sa maison de disques.

Travail acharné

Dans son livre, l'auteur insiste sur l'importance du temps pour produire un travail de valeur : "L'erreur est de croire que le succès tombe du ciel, alors qu'il faut en général 10 000 heures de travail pour arriver à la maîtrise d'un art ou d'une technique."

Avant de connaître le succès, les Beatles s'étaient produits sur scène un millier de fois dans des clubs d'effeuilleuses de Hambourg, un nombre de prestations démesuré qu'aucun groupe de musique actuel ne peut aujourd'hui se permettre.

La progression du talent n'est pas non plus linéaire, elle ne peut être suivie pas à pas : "C'est souvent un processus d'essais et d'erreurs imprévisible, de hauts et de bas." Dans certains cas, une première faiblesse peut même devenir une force, grâce à ce que des psychologues ont appelé l'apprentissage par compensation. C'est le cas de quarts-arrières au football : des études ont montré que ceux qui sont bons sans être parmi les premiers repêchés et qui, de plus, ont un quotient intellectuel inférieur au QI moyen des quarts-arrières (!) fournissent des performances légèrement supérieures à celles de leurs rivaux plus favorisés intellectuellement ou au repêchage.

Ces leçons sont d'autant plus vraies que le monde est complexe et changeant et que partir d'une grande idée précise pour atteindre un but déterminé sera de plus en plus difficile, a avancé M. Gladwell. Les projets appelés à réussir sont ceux qui seront développés à tâtons, sans partir d'objectifs trop définis.

Rééduquer les investisseurs

Les gestionnaires peuvent dire qu'ils n'ont plus le temps ni les ressources pour soutenir des projets de longue haleine, mais il reste qu'ils sont responsables de cet état de fait : "Ils décident eux-mêmes de retirer le financement. Rien, en théorie, ne les empêche d'être plus patients. Ce sont les pdg qui prennent les décisions au bout du compte", a-t-il souligné.

Warner Music, dans les années 1960 et 1970, savait doser entre les projets à court terme, qui lui permettaient de rester à flot, et d'autres à long terme, qui ne donnaient pas de résultats immédiats, a fait valoir M. Gladwell.

On pourra objecter que les gestionnaires sont davantage forcés aujourd'hui de rendre des comptes. Les yeux rivés sur le moindre résultat, des légions d'investisseurs n'hésitent pas à retirer leurs billes dès qu'une entreprise rate sa cible de profits trimestriels.

C'est pourquoi M. Gladwell a plaidé pour une rééducation des investisseurs : "Il faut réduire les attentes à court terme, qui sont souvent irréalistes." La façon dont les gestionnaires sont rémunérés devrait aussi être revue, de façon à moins valoriser le succès à très court terme.

Reste la possibilité que de précieuses ressources soient consacrées trop longtemps à des projets sans avenir. À cela, M. Gladwell n'a pas de solution facile : "On ne cesse de chercher des moyens d'encadrer le processus de prise de décision, mais rien ne peut remplacer l'exercice du jugement."

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