Comment une nouvelle approche de leadership a donné un autre élan à Lego

Publié le 11/07/2009 à 00:00

Comment une nouvelle approche de leadership a donné un autre élan à Lego

Publié le 11/07/2009 à 00:00

Parfois, la transition la plus exigeante qui soit pour un gestionnaire ne consiste pas tant à changer de travail qu'à orienter l'entreprise dans une nouvelle voie.

Jorgen Vig Knudstorp, entré au service de Lego en 2001 et porté à la direction de l'entreprise familiale en 2004, a compris qu'il devait adopter une série d'approches de leadership distinctes pour redresser financièrement le fabricant de jouets danois, le réorienter vers la croissance et l'ouvrir à la contribution des consommateurs.

Il explique sa démarche à la Harvard Business Review.

Harvard Business Review - Quelle approche de leadership avez-vous adoptée pour stopper le déclin de Lego ?

Jorgen Vig Knudstorp - En 2004, quand j'ai été nommé chef de la direction, la situation était extrêmement difficile chez Lego. Pour survivre, l'entreprise devait enrayer le déclin des ventes, réduire son endettement et s'efforcer de dégager des liquidités. Il fallait donc réaliser un redressement classique, nécessitant un meilleur contrôle des coûts et un resserrement de la gestion hiérarchique.

Dans le même temps, je devais établir ma crédibilité. On peut réaliser beaucoup de choses quand on ne suscite pas la méfiance. Je me suis donc assuré d'être accessible. En danois, nous avons une expression qu'on traduit littéralement par " gérer à hauteur des yeux ", qui signifie être capable de discuter avec les travailleurs en usine, les ingénieurs, les responsables du marketing - être à l'aise avec tout le monde, quoi.

HBR - Alors comment avez-vous modifié votre approche de leadership ?

J.V.K. - Une fois que Lego a recouvré une marge de manoeuvre pour respirer et établir une stratégie, l'équipe de direction a entrepris d'optimiser les valeurs du groupe. Pour ce faire, il fallait se demander : " Quelle est la raison d'être de Lego ? " Nous avons trouvé la réponse suivante : offrir un produit de base dont le design unique permet aux enfants d'apprendre à résoudre des problèmes de façon systématique et créative - une compétence essentielle au 21e siècle.

Nous avons aussi établi que nous ne souhaitions pas être concurrentiels en devenant les plus gros, mais plutôt en étant les meilleurs.

L'application d'une stratégie d'excellence et de différenciation par créneau nécessitait une structure plus flexible et un relâchement du style de gestion hiérarchique que nous avions imposé pendant la période de redressement, la société ayant alors besoin de gestionnaires ayant les pleins pouvoirs.

Par exemple, j'ai cessé de m'immiscer dans le processus décisionnel hebdomadaire de gestion des ventes et d'affectation des moyens de production, et j'ai confié la prise de décisions à l'échelon le plus bas possible de la hiérarchie.

Nous sommes maintenant dans une troisième phase, marquée par une croissance interne. Notre expansion se poursuit assez solidement aux quatre coins du monde, mais nous devons encore modifier notre style de leadership pour assurer une progression continue de nos ventes, parce que la direction avait développé une certaine aversion au risque lorsque sa priorité était la survie de Lego. Elle doit maintenant être mue par une volonté de saisir toutes les occasions, ce qui l'oblige à prendre plus de risques calculés.

À chaque étape de notre changement de stratégie, nous avons pavé la voie en réaffectant les leaders au sein de l'entreprise et en modifiant les structures organisationnelles et les façons de travailler. Par exemple, nous avons mis en place un secteur de marché consacré aux ventes directes aux consommateurs, où tout est affaire d'éducation et de collaboration, ce qui est foncièrement différent de la vente auprès des détaillants, où l'efficacité est fondamentale.

HBR - Cette nouvelle ère de participation des consommateurs demande quelle forme de leadership ?

J.V.K. - À l'instar de la brique de plastique interchangeable, la communauté Lego est l'un des principaux atouts du groupe.

Je pense avoir saisi la pleine mesure de l'impact de la contribution des consommateurs en 2005, quand l'entreprise a commencé à faire participer quelques adeptes enthousiastes au développement de produits; j'ai alors commencé à rencontrer systématiquement des adeptes adultes de Lego. Depuis, nous encourageons activement nos fans à nous suggérer des idées de produit.

Un nombre étonnant d'adultes aiment jouer avec des Lego. Notre équipe de conception compte 120 personnes, mais nous pouvons probablement compter sur le soutien créatif de 120 000 concepteurs bénévoles à l'extérieur de l'entreprise. Les consommateurs peuvent même désormais concevoir leurs propres produits - que nous leur vendrons ou, dans certains cas, vendrons à d'autres - en utilisant gratuitement notre logiciel de conception offert sur Legofactory.com. Peut-être plus important encore, ces super-utilisateurs peuvent commenter les forces et les faiblesses d'un produit qu'un enfant peut percevoir mais pas exprimer.

La gestion des relations avec les clients collaborateurs exige de respecter leurs idées. Nous ne tenons jamais pour acquis l'engouement des consommateurs. Nous exprimons notre gratitude en leur montrant que nous sommes à l'écoute de leurs commentaires. Quand j'assiste à des réunions d'adeptes de Lego, je leur rappelle que, bien que nous ne puissions pas donner suite à chaque proposition, plus une idée est mise de l'avant, plus nous y accordons d'importance.

( CV )

Nom: Jorgen Vig Knudstorp

Âge: 37 ans

Fonction: Pdg

Entreprise: Lego

Il a pris la tête du fabricant de jouets à la fin de 2004, après avoir été consultant chez McKinsey.

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La période estivale est le moment idéal pour considérer de nouvelles idées en matière de gestion. Pour ouvrir des pistes de réflexion, voici une série d'entrevues avec des personnalités internationales du monde des affaires, réalisées par l'équipe de la Harvard Business Review.

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