Les PME prennent le relais des grandes entreprises


Édition du 28 Novembre 2015

Les PME prennent le relais des grandes entreprises


Édition du 28 Novembre 2015

Par Claudine Hébert

Le Groupe Perron organise depuis 2006 une soirée annuelle de financement au vignoble Domaine Les Brome, à Lac-Brome. « Plus de 1,75 M$ ont été amassés et remis à des fonda- tions », dit Jonathan Sénécal, associé du Groupe Perron. [Photo : Jérôme

De plus en plus de PME participent à des activités philanthropiques. Et c'est tant mieux. Si ce n'était de l'apport de ces entreprises, la part de dons annuels provenant du milieu des affaires québécois, soit près de 1,5 milliard de dollars, aurait considérablement fondu depuis la crise économique de 2008, soutient Daniel Asselin, président-fondateur d'Épisode, une firme de Montréal spécialisée en collectes de fonds.

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«En raison des faillites, des fusions et des acquisitions, les dons qui proviennent des grandes entreprises ont diminué d'au moins 20 %, si ce n'est de 25 %. Ce sont les dons provenant des PME qui ont atténué cette perte. Ils ont permis de maintenir la part de dons du milieu des affaires», poursuit-il.

Mais attention : «Il ne faut pas viser le coup de circuit avec les PME. À l'image des Royals de Kansas City qui viennent de remporter la série mondiale, il faut plutôt y aller à petits coups sûrs», avertit Jean-Robert Nolet, fondateur de BNP Stratégies, une firme montréalaise qui aide les entreprises à développer des stratégies philanthropiques.

Des dons qui évoluent avec l'entreprise

Instaurer une politique philanthropique est loin d'être la priorité lorsqu'on démarre une entreprise, poursuit M. Nolet. La relation entre les PME et la philanthropie se veut donc un long processus. Les fondations doivent commencer par cibler les individus, soit les propriétaires, les actionnaires et les dirigeants des entreprises. C'est à force de les approcher, de leur parler de leur cause et de l'impact de leurs dons que les fondations gagneront le coeur de ces entrepreneurs.

Il ne faut pas oublier qu'au sein des PME, la philanthropie évolue au rythme de la croissance de l'entreprise. «Le donateur va franchir différentes étapes dans sa vie. Il commencera souvent par investir du temps, des biens et des services. Ce sera ensuite des montants de 1 000 $, 5 000 $, 10 000 $ avant d'arriver à des dons majeurs de 100 000 $, 250 000 $, voire d'un million de dollars et plus», explique M. Nolet.

C'est le cas de Jean Coutu, considéré comme l'une des trois personnalités les plus généreuses du Québec. Depuis la création de la Fondation Marcelle et Jean Coutu en 1991, l'organisme a distribué plus de 200 M$, dont plus de 20 M$ seulement en 2015. «Ses premiers dons comme petit entrepreneur n'avaient pas l'ampleur qu'ils ont aujourd'hui», souligne M. Nolet.

«Mon père a toujours été généreux», indique Marie-Josée Coutu, directrice générale de la Fondation Marcelle et Jean Coutu. Combien donnait-il lors de ses premiers dons ? Elle l'ignore. Mais son concept de la pharmacie à escompte était justement destiné à aider les plus démunis à se procurer des médicaments et des soins à des prix plus abordables, explique Mme Coutu.

«On voit de plus en plus naître de grandes familles philanthropiques au Québec, particulièrement depuis cinq ans, souligne Daniel Asselin. Ce sont elles qui sont en voie de prendre le relais des grandes entreprises en philanthropie. Il s'agit pour la plupart d'ex-dirigeants de PME qui transfèrent une partie de leur patrimoine à des oeuvres caritatives.»

Daniel Asselin précise que les fondations privées au Québec ont doublé en 10 ans, pour se chiffrer à plus de 300.

Chez Épisode, on est conscient qu'un président de PME nourrira d'abord son patrimoine personnel avant de donner. «Dans plusieurs entreprises, faire des dons majeurs aura pris une génération, voire deux», observe Daniel Asselin.

Aux Industries Bonneville, c'est la troisième génération qui a instauré une politique philanthropique il y a huit ans au sein de l'entreprise de 300 employés. Le fabricant de maisons usinées a d'ailleurs offert jusqu'à maintenant près d'une dizaine de maisons dans différentes campagnes de financement. Sans vouloir dévoiler de montant, Bonneville affirme avoir donné plusieurs millions de dollars depuis huit ans.

Une culture philanthropique plus socioresponsable

La nouvelle génération d'entrepreneurs est plus sensible à la philanthropie. «On voit poindre une culture philanthropique auprès de la relève qui est davantage socioresponsable. Au sein du milieu des arts, certaines institutions muséales, notamment le Musée des beaux-arts de Montréal et le Musée d'art contemporain, mettent sur pied des cercles de jeunes philanthropes pour initier les générations X, Y et Z à la philanthropie», remarque Daniel Asselin.

Pour sa part, Jean-Robert Nolet observe un intérêt philanthropique un peu plus prononcé au sein des PME qui gravitent autour des secteurs juridique, comptable et financier. «Par la nature de leurs services, ce sont des entreprises qui disposent de larges réseaux. Ce qui facilite les collectes de fonds», dit-il.

Le Groupe Perron, gestionnaire de portefeuille de BMO Nesbitt Burns qui compte à peine six employés, organise depuis 2006 une soirée annuelle de financement au vignoble Domaine Les Brome, à Lac-Brome. «Depuis trois ans, cette soirée-spectacle franchit aisément le cap des 225 000 $ en dons. Plus de 1,75 M$ ont été amassés et remis à des fondations», indique Jonathan Sénécal, associé du Groupe Perron, à Montréal. Plus de 90 % des 550 participants sont des entrepreneurs et des dirigeants d'entreprise.

Encore une fois, la part de bénévolat et celle d'offres de service constituent deux éléments clés dans le succès de la soirée. Selon M. Sénécal, la petite équipe consacre en heures l'équivalent de deux mois de travail pour organiser cet événement devenu l'une des campagnes de financement majeures en Estrie.

D'où l'importance de cibler l'entrepreneur et non les entreprises. «Qu'il s'agisse de solliciter un don ou des heures de bénévolat auprès des employés, ça prend la "bénédiction" du patron», conclut Jean-Robert Nolet.

Du bénévolat plus que de l'argent

Une PME sur deux dit privilégier le bénévolat comme forme d'implication au sein d'un organisme ou d'un établissement qu'elle soutient, selon une étude réalisée par la firme Épisode en 2014. Un rôle au conseil d'administration (35 %) ou une participation au comité organisateur d'un événement (23 %) figurent respectivement au deuxième et au troisième rang des types d'engagements les plus recherchés.

La Mission Bon Accueil, une banque alimentaire montréalaise fréquentée chaque année par plus de 4 000 familles, profite largement de cette tendance. «On ne tient pas de statistiques. Mais d'emblée, on constate que la majorité des 67 300 heures de bénévolat dont l'organisme a besoin annuellement sont comblées par des entreprises de notre quartier. Elles nous donnent du temps en triant les vêtements et les aliments, ou en participant aux services de la banque alimentaire», indique Kathryn Stephens, gérante principale du développement et relations publiques de la Mission Bon Accueil.

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