Le bonus-malus

Publié le 01/05/2009 à 00:00

Le bonus-malus

Publié le 01/05/2009 à 00:00

On a vu récemment quelques PDG renoncer à une partie de leur rémunération. Leur geste est certes appréciable, cependant le problème de la rémunération scandaleuse des PDG n'est pas réglé pour autant. Il faut aller un peu plus loin en faisant appel au sens de l'éthique des PDG et dépasser le lieu commun du degré obscène de la rémunération de certains afin d'offrir une solution constructive à ce problème.

Pourquoi ne pas adapter un concept déjà appliqué en Europe dans le monde de l'environnement depuis 2007 : le bonus-malus ?

Le bonus-malus environnemental a été créé et mis en oeuvre par le ministre de l'environnement français Jean-Louis Borloo lors d'une réflexion appelée "Grenelle de l'environnement". Ce système consiste à pénaliser l'achat de voitures plus polluantes tout en proposant une remise de taxe à l'achat de voitures vertes. Si la performance environnementale de votre nouvelle automobile n'atteint pas un degré jugé acceptable, vous devrez débourser une taxe, un malus. Si, au contraire, votre voiture satisfait à ces normes, vous bénéficierez d'un avantage financier, un bonus.

Un bonus récompense quelque chose de bon. C'est un avantage con-senti à un PDG sous la forme d'une prime qui reconnaît l'excellence de sa performance. Qu'arrive-t-il au PDG s'il n'offre pas une performance digne d'excellence ? Actuellement, mis à part quelques exceptions, rien. Le PDG touche son bonus de toute manière parce que "ça faisait partie de son contrat". L'incompétence, l'aveuglement ou le laisser-aller ne devraient jamais être récompensés. Si un PDG désire obtenir tous les avantages liés à sa situation tout en n'assumant aucune des conséquences en cas d'échec, on devrait se poser de sérieuses questions sur sa vision de l'éthique, son jugement et son engagement envers l'organisation et ses actionnaires.

Le bonus-malus, tel que proposé, devrait constituer une mesure neutre pour les actionnaires et être imposé par le conseil d'administration lors de l'élaboration de l'entente de rémunération du PDG. En cas d'augmentation de la valeur de l'entreprise, l'attribution des bonus aux PDG serait largement compensée par les gains supplémentaires ; en cas de mauvais résultats, les pertes seraient atténuées par les primes non versées aux dirigeants qui auront causé ces pertes. C'est ce qu'on appelle la responsabilité.

Pour rendre justice tant au PDG qu'aux actionnaires, le bonus-malus devrait être calculé sur une période d'au moins trois ans. Cette période permettrait d'éviter que les inévitables soubresauts à court terme (vers le haut ou vers le bas), qui sont le propre de la conduite des affaires, n'obscurcissent ou ne peignent en rose la performance réelle de l'entreprise. Les montants du bonus-malus seraient ainsi provisionnés par l'entreprise et payés - ou imputés - au terme de la troisième année, que le PDG soit encore en fonction ou non.

Cette mesure aurait pour conséquence prévisible d'allonger la durée en poste des PDG ; elle leur imposerait une vision à long terme qui les obligerait à prendre de meilleures décisions sur une période plus longue pour le bénéfice des actionnaires, en sachant que, de toute manière, ils devront faire face aux conséquences de leurs décisions, bonnes ou mauvaises.

Enfin, le bonus-malus permettra de restaurer l'image d'excellence des PDG, qui a été fortement ternie au cours des dernières années. Un tel système empêcherait les PDG d'affirmer qu'ils "étaient responsables, mais..." ; ils ne pourront plus dire : "Que voulez-vous que je fasse, c'est dans mon contrat et c'est légal...". Les actionnaires, de leur côté, n'auront plus à se demander si un PDG devrait remettre sa prime de départ. En cas de résultats désastreux, le PDG n'aura pas reçu de prime. En cas de résultats exceptionnels, le PDG pourra en toute légitimité jouir des fruits de son excel-lent travail.

Il me semble que c'est simple.

rene.villemure@ethique.net

René Villemure est éthicien. Il est aussi le fondateur de l'Institut québécois d'éthique appliquée. Il conseille les dirigeants des grandes sociétés publiques et privées en matière de gestion éthique et de gouvernance éthique.

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