Les prix du bois pourraient exploser en 2023 en raison de Canfor

Publié le 26/01/2023 à 18:25

Les prix du bois pourraient exploser en 2023 en raison de Canfor

Publié le 26/01/2023 à 18:25

Par François Normand

Ces fermetures supprimeront environ 750 millions de PMP de la capacité de production annuelle de Canfor. (Photo: 123RF)

Les producteurs de bois en profiteront, les consommateurs en pâtiront. La décision de Canfor de fermer deux usines en Colombie-Britannique en avril réduira de 1,4% la production de bois d’œuvre en Amérique du Nord. Cela exercera une forte pression à la hausse sur les prix cette année, lorsque la demande continentale reprendra, selon le Conseil de l’industrie forestière du Québec (CIFQ).

Comme le gaz naturel, le prix du bois est un prix continental en Amérique du Nord. Aussi, une diminution ou une augmentation de l’offre a le même impact sur la valeur des produits forestiers vendus au détail, de Québec à San Diego.

Mercredi, le producteur de produits forestiers de Vancouver, Canfor, a annoncé une importante restructuration en Colombie-Britannique. Il fermera en avril ses usines à Chetwynd et à Houston.

Celle de Chetwynd de manière définitive, tandis que celle de Houston fermera temporairement «pour une période prolongée», et ce, le temps de construire une nouvelle usine plus moderne et plus compétitive.

Canfor dit les fermer parce qu’il n’y a plus assez de fibres disponibles en Colombie-Britannique pour justifier le maintien en service de ces deux usines. Ces fermetures supprimeront environ 750 millions de pieds mesure de planche (pmp) de la capacité de production annuelle de l’entreprise.

À elle seule, l'usine de Houston à une capacité de production de 610 millions de pmp (à ne pas confondre avec la production réelle, qui est toujours un peu inférieure), ce qui est énorme.

À titre de comparaison, au Québec, les usines forestières ont généralement une capacité oscillant de 100 à 125 millions de pmp.

 

Un «tremblement de terre» dans le marché

«Cette nouvelle a l’effet d’un tremblement de terre», laisse tomber au bout du fil Michel Vincent, économiste au CIFQ, qui représente les producteurs de bois d’œuvre dans la province.

Actuellement, la production nord-américaine de bois d’œuvre s’élève à quelque 55 milliards de pmp. Par conséquent, la réduction de 750 millions de pmp chez Canfor représente à elle seule une réduction 1,4% de l’offre totale, souligne-t-il.

L’économiste travaille depuis 40 ans dans l’industrie. Non seulement il ne se souvient pas avoir vu une telle réduction de l’offre d’un seul coup, mais elle survient aussi dans une conjoncture bien particulière.

D’une part, les inventaires de bois sont relativement bas chez les Rona et autres Home Depot de ce monde, selon les membres du CIFQ. Les hausses de taux d’intérêt et les risques de récession ont réduit la demande nord-américaine pour les produits forestiers.

Les prix du bois d’œuvre ont d’ailleurs diminué de manière importante, soit de plus de 50% en 2022.

D’autre part, l’Amérique du Nord est devenue un importateur net de bois en 2021. En 2005, le continent s’était retrouvé momentanément dans cette situation — une première depuis qu’on a commencé à compiler les statistiques, au début des années 1980.

 

Une restructuration prévisible

Même si la restructuration de Canfor est majeure, Michel Vincent affirme toutefois qu’il n’est pas trop surpris.

Dans la foulée de l’épidémie de dendroctone du pin en Colombie-Britannique (aux tournants des années 2000), plusieurs grandes forestières comme Canfor ont construit de grosses usines afin de récolter le bois infesté par ces insectes destructeurs, explique l’économiste du CIFQ.

Or, la plupart de ce bois à faible valeur ajoutée (vendu à bas prix sur le marché) a été récolté dans la province. Par conséquent, plusieurs entreprises se retrouvent aujourd’hui avec des surcapacités et des actifs moins rentables, voire déficitaires.

Michel Vincent estime que les producteurs de bois du Québec — mais aussi sans doute ceux de l’étranger, notamment de l’Allemagne et de la Suède — profiteront à terme de la restructuration chez Canfor et d’une offre à combler en Amérique du Nord.

Non seulement il manquera de bois sur le marché, mais il y aura aussi «des pressions à la hausse très fortes sur les prix». Cela dit, l’économiste estime qu’il faudra sans doute attendre la reprise de la demande nord-américaine de bois pour voir les prix augmenter de manière significative.

Une reprise qui devrait se manifester lorsqu’il n’y aura plus de risque de récession ou qu’elle sera derrière nous. C’est sans parler des taux d’intérêt qui se seront alors probablement stabilisés, voire qui auront alors commencé à diminuer.

À la fermeture de la Bourse de Toronto ce jeudi, le titre de Canfor était en hausse de 8,95% par rapport à la fermeture de la veille.

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