Le Sénat américain a commencé à examiner la réforme de la santé voulue par Barack Obama, faisant apparaître sans surprise un clivage net entre les démocrates, qui considèrent cette initiative comme une occasion historique, et les républicains, qui y sont opposés.

Le débat entamé lundi à la chambre haute du Congrès devrait durer plusieurs semaines. La chambre des représentants avait déjà adopté le 7 novembre sa propre version du projet de loi.

La réforme examinée au Sénat, estimée à près de 1.000 milliards de dollars sur dix ans, introduit le principe d'assurance-maladie obligatoire pour la plupart des Américains, étend largement l'actuel programme public de couverture médicale pour les pauvres (Medicaid) et obligerait les assureurs à couvrir tout client solvable quels que soient ses antécédents médicaux ou son état de santé.

Lundi, démocrates et républicains ont offert un avant-goût de la probable bataille d'amendements à venir sur le texte de 2.074 pages présenté par le chef de la majorité démocrate au Sénat Harry Reid.

"Il n'y a pas de question plus importante" que de terminer l'examen de ce texte, a déclaré M. Reid à ses collègues. Il a souligné que les coûts très élevés de la santé aux Etats-Unis avaient fait plonger des milliers d'Américains dans la faillite.

Le chef de file de l'opposition républicaine au Sénat, Mitch McConnell, a toutefois jugé le plan de réforme de 979 milliards de dollars examiné au Sénat trop onéreux pour un pays en proie à des difficultés financières.

Le sénateur de l'Arizona et candidat républicain malheureux à l'élection présidentielle de 2008 John McCain a de son côté qualifié le texte de "monstruosité" qui utilise une "comptabilité à la (Bernard) Madoff", et a déposé le premier amendement républicain.

Cet amendement vise à supprimer des baisses de crédit de 400 milliards de dollars dans le programme d'assurance public aux personnes âgées Medicare, et constitue un signal en direction des seniors qui s'inquiètent du projet de réforme. Les démocrates devaient riposter mardi en déposant un amendement soulignant les avantages du texte pour les seniors et garantissant que les prestations de base du Medicare ne seraient pas affectées. Les votes sur les amendements devaient commencer dans la journée.

"Nous avons une occasion historique" pour adopter "une réforme innovante qui au final mettra un frein au coût de la santé", a plaidé de son côté le sénateur démocrate du Montana Max Baucus.

Harry Reid espère que le débat sera bouclé d'ici la fin décembre mais la partie est loin d'être gagnée. D'autant que des sénateurs modérés de la majorité démocrate menacent de faire défection s'ils n'obtiennent pas une limitation du remboursement de l'avortement et l'abandon de la mise en concurrence du privé et de l'Etat pour l'assurance maladie. Autant de concessions qui feraient enrager les progressistes qui constituent le coeur du Parti démocrate.

Les démocrates doivent obtenir près des deux tiers des voix au Congrès, c'est-à-dire 60 sur 100, pour empêcher les républicains d'enterrer le texte en se livrant à des manoeuvres d'obstruction. Si les 40 républicains font bloc contre eux, il leur faudra les voix des 58 démocrates et des deux indépendants qui votent traditionnellement avec eux.

L'opinion publique reste quant à elle partagée sur la réforme de la santé, grande priorité de la politique intérieure du président Obama: 58% des Américains souhaitent que l'on s'attaque au dossier maintenant mais la moitié d'entre eux n'aiment pas ce qu'ils savent du projet, selon un récent sondage de la Kaiser Family Foundation.

Les Etats-Unis sont le seul pays développé à ne pas posséder de couverture de santé pour toute sa population. Des dizaines de millions d'Américains n'ont pas d'assurance-santé ou sont sous-assurés parce que leurs employeurs ne leur fournissent pas une couverture médicale ou parce qu'ils sont au chômage.