Les consommateurs se sentent irrités face à la hausse des demandes de pourboires

Publié le 27/09/2022 à 11:49

Les consommateurs se sentent irrités face à la hausse des demandes de pourboires

Publié le 27/09/2022 à 11:49

Par La Presse Canadienne

La fatigue des pourboires frappe les consommateurs alors que les demandes augmentent et se propagent. (Photo: La Presse Canadienne)

C’est en achetant du lait maternisé que Caitlin Green a senti la goutte qui faisait déborder le biberon. 

«On m’a demandé de donner un pourboire pour une commande en ligne de lait maternisé», raconte Mme Green, une nouvelle maman et animatrice radio à Toronto. 

«Je n’utilisais pas (le service de livraison) Instacart et ce n’était pas pour un livreur. C’était juste une commande en ligne normale et on m’a demandé de donner un pourboire à la caisse pour “montrer mon soutien à l’équipe”.» 

Elle a ajouté: «J’ai l’impression qu’on me demande des pourboires à chaque décision.» 

La fatigue des pourboires frappe les consommateurs alors que les demandes augmentent et se propagent à de nouvelles entreprises, souvent par l’entremise des machines de paiement automatisées, de plus en plus utilisées, et de leurs suggestions de pourboires prédéfinies. 

Au pire de la pandémie, de nombreux Canadiens ont augmenté leurs pourboires pour les travailleurs essentiels comme le personnel des restaurants et les chauffeurs-livreurs, en reconnaissance des risques pour la santé qu’ils prenaient au service des gens. 

Maintenant, alors que pratiquement toutes les restrictions pandémiques sont levées et que l’inflation fait grimper le coût de tout, certaines personnes se sentent mal à l’aise avec la pression pour obtenir plus de pourboires, même dans les entreprises où des pourboires ne sont traditionnellement pas attendus. 

Sans compter que les montants des pourboires semblent également avoir été touchés par l’inflation. 

Les invitations pour laisser un pourboire sur certains terminaux de point de vente suggèrent de plus en plus des montants allant de 18% à 30%, bien qu’il soit généralement possible d’entrer manuellement un montant autre que ceux suggérés automatiquement. 

Ces pourboires s’ajoutent souvent aux taxes et aux hausses de prix sur les menus des restaurants. 

«Il semble maintenant que laisser 15% est impoli», observe Mme Green. 

«Il y a eu une énorme baisse de service, du moins d’après mon expérience dans les restaurants depuis la pandémie, et je comprends parfaitement pourquoi cela se produit. Mais les prix sont également plus élevés et on me demande ensuite de donner un pourboire de 25% comme option prédéfinie.» 

Pour certains, c’est un juste prix à payer pour s’assurer que les professionnels de l’hôtellerie, qui travaillent dur, gagnent un salaire décent. 

Pour d’autres, le découplage entre le pourboire et le service génère une incertitude quant au montant à laisser, surtout lorsqu’il s’agit d’un achat qui n’impliquait pas de pourboire auparavant, comme une commande en ligne. 

 

Détérioration du service?

Greg Rozon, un résidant de Halifax, note que le service s’est détérioré à mesure que les prix des menus et les attentes en matière de pourboires ont augmenté. 

«Tout le monde a ces machines avec les demandes automatiques de pourboire, même si le service n’est pas très bon, souligne-t-il. J’essaie toujours de bien donner un pourboire. Mais c’est un peu difficile à accepter.» 

Pour Judy Haiven, le remède à l’irritation du pourboire est simple: verser aux travailleurs un salaire décent. 

«Les pourboires sont humiliants», fait valoir Mme Haiven, chercheuse au Centre canadien de politiques alternatives et professeur à la retraite de l’Université Saint Mary’s. «Ils devraient être complètement supprimés et les travailleurs devraient recevoir un salaire équitable.» 

À Halifax, elle estime qu’un salaire décent serait d’environ 23,50 $, soit plus de 10 $ de plus que le salaire minimum actuel de 13,35 $ l’heure de la province. 

Une partie du problème est que les gérants recueillent souvent l’ensemble des pourboires et les redistribuent comme ils le souhaitent, ajoute Mme Haiven. 

«Dans la plupart des provinces, il n’y a pas de loi stipulant que les pourboires sont la propriété de l’employé, explique-t-elle. L’idée n’est pas de donner un pourboire au personnel de cuisine. Souvent, l’employeur prend la moitié des pourboires et répartit le reste comme il le souhaite.»

Avec cette pratique, certains clients se demandent où va exactement leur argent. 

«Il n’y a aucune transparence, déplore Mme Green. Quand on me demande de donner un pourboire pour “montrer mon appréciation à l’équipe”, je ne sais même pas vraiment ce que cela signifie.» 

La suppression des pourboires faciliterait également une partie du travail émotionnel lié au travail dans l’industrie des services, a déclaré Mme Haiven. 

«Peut-être qu’ils ne vous demanderont pas comment s’est passée votre journée ou ne s’intéresseront pas à votre santé, mais ce serait incroyablement rafraîchissant d’entrer dans un restaurant et de savoir que les personnes sont bien payées», affirme-t-elle. 

 

Différente signification depuis la pandémie? 

Malgré tout, tant que les travailleurs compteront sur les pourboires pour gagner leur vie, Mme Haiven juge que les consommateurs devraient être prêts à leur laisser un pourboire. 

Henk van Leeuwen a observé qu’il donnait ses pourboires de façon plus volontaire pendant la pandémie. 

«J’ai toujours donné des pourboires décents, mais cela correspondait davantage à l’expérience que je recevais assis dans un restaurant ou à la qualité du service ou du repas», note-t-il. 

«Mais cela a changé pendant la pandémie. Les travailleurs de première ligne dans les restaurants étaient en quelque sorte une bouée de sauvetage, ils prenaient des risques pour que nous puissions commander des plats à emporter, et j’ai décidé que je commencerais à donner le montant de pourboire le plus élevé à chaque fois.» 

Même si M. van Leeuwen assure qu’il n’est pas riche, il reconnaît qu’il avait le privilège de pouvoir manger dans un restaurant toutes les semaines ou aux deux semaines, et il considère le pourboire comme un genre de devoir. 

«Je donne des pourboires autant que je peux et ce n’est plus une question de service. Il s’agit de soutenir les travailleurs et de soutenir ma communauté. C’est une petite façon pour moi d’aider.» 

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