Scandale de la FIFA: un cas d'école en gouvernance


Édition du 13 Juin 2015

Scandale de la FIFA: un cas d'école en gouvernance


Édition du 13 Juin 2015

Par Robert Dutton

«Je ne peux pas surveiller tout le monde, tout le temps. Si quelqu'un veut mal agir, il cherchera aussi à le cacher.»

C'est ainsi que Joseph (Sepp) Blatter, qui vient de démissionner de son poste de président de la FIFA, s'est dégagé de toute responsabilité face aux nombreuses accusations de corruption rendues publiques depuis le 27 mai dernier contre de hauts dirigeants de la FIFA et ceux de fédérations régionales associées.

Je ne suis pas particulièrement amateur de soccer. Mais cette petite phrase de M. Blatter m'a néanmoins interpelé, parce que je m'intéresse à la gouvernance et à l'éthique au sein des organisations. Et parce que j'ai été pendant des années dirigeant d'une entreprise qui, toutes proportions gardées, avait des budgets de commandite sportive conséquents.

Une fois digéré le sentiment d'indignation devant les allégations de corruption «endémique et systémique», couvrant «au moins deux générations», formulées par le procureur général des États-Unis au sujet de la FIFA, la question qui se pose naturellement est la suivante : qui doit répondre d'une telle situation ?

Au moment de mettre sous presse, aucune accusation n'avait été déposée contre M. Blatter, et il est bien possible qu'il n'y en ait aucune. Accordons-lui le bénéfice du doute. Mais est-ce que sa non-culpabilité criminelle l'exonère de toute responsabilité, lui qui est cadre de la FIFA depuis 40 ans, dont 17 à titre de président ?

Aucun président d'une multinationale ne peut savoir ce que fait «tout le monde, tout le temps» dans son organisation. C'est pour ça qu'existent des systèmes de contrôle et de gouvernance. Mais le principal dirigeant doit s'assurer que règnent, dans son organisation, les «trois C» de la gouvernance éthique : clarté des valeurs, contrôles adéquats et culture de l'éthique.

Dans le cas de la FIFA, la corruption «endémique» concernerait l'organisation de la Coupe du monde de football. Celle qui a eu lieu au Brésil en 2014 a représenté à elle seule 84 % des revenus de la FIFA sur le cycle 2011-2014. Que la corruption ait existé à l'échelle alléguée par le procureur général des États-Unis témoigne d'un échec colossal en matière de valeurs, de contrôles et de culture - le coeur même de la responsabilité d'un président.

Présumant que M. Blatter n'est coupable d'aucun crime, il doit toutefois répondre de cet échec. Pourtant, son départ ne suffira pas à assainir les moeurs et la culture de l'organisation. Il faudra une refonte en profondeur de tous les systèmes de gouvernance. Dans un organisme essentiellement politique, où 209 fédérations nationales jouissent d'un droit de vote égal, il faudra des mois, voire des années, d'efforts déterminés pour y arriver. Et, sans doute, une impulsion externe.

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