Vais-je manger mes bas à la retraite?

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Édition de Octobre 2020

Vais-je manger mes bas à la retraite?

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Édition de Octobre 2020

Par François Normand

(Photo: Nick Page pour Unsplash)

PLANIFICATION. À moins d'avoir imité la fourmi de la fable de La Fontaine depuis la vingtaine, nous nous posons sensiblement tous la même question : «Vais-je avoir assez d'argent à la retraite ?»

Plusieurs s'inquiètent de devoir renoncer aux plaisirs de la vie s'ils n'ont pas suffisamment de fonds pour financer leur retraite sur une période pouvant durer de 25 ans à 30 ans. Pour autant, ce n'est pas bien sorcier : il faut la planifier et mettre en place les bonnes stratégies, affirment les cinq spécialistes en planification financière que vous avons interrogés.

Pour voir si on est sur la bonne voie, Hélène Gagné, planificatrice financière et gestionnaire de portefeuille à Gestion privée Gagné Johnston (Valeurs mobilières Peak) suggère «de faire d'abord un état de sa situation financière avec deux documents : un bilan, pour évaluer où vous en êtes, et un budget, pour évaluer comment vous avez envie de vivre votre retraite.» Ce budget tiendra compte de vos projets . Il estimera aussi les dépenses qui disparaîtront à la retraite. Par exemple, le remboursement complet de votre hypothèque à la retraite réduira vos coûts de manière importante.

Une fois les objectifs déterminés, il faut s'assurer d'épargner suffisamment pour les atteindre. Bien avant le jour J, il faut mettre de l'argent de côté, même si c'est souvent difficile, surtout pour ceux et celles qui n'ont pas de régime de retraite et qui doivent par exemple miser essentiellement sur leur régime d'épargne-retraite enregistré (REER), estime Josée Jeffrey, planificatrice financière indépendante et fondatrice de Focus retraite et fiscalité. «Si on attend d'avoir des surplus pour épargner, on ne le fera pas. Autant épargner avant de dépenser et apprendre à vivre avec ce qui nous reste. Le meilleur conseil est de commencer tôt et de planifier l'épargne systématique dès le dépôt de la paie», dit-elle.

 

La méthode à utiliser selon son âge

La méthode de planification à utiliser pour déterminer vos objectifs sera différente selon le temps qui vous sépare de la retraite. L'Institut québécois de la planification financière (IQPF), dont la mission est d'assurer la protection du public en matière de finance personnelle, propose trois méthodes, selon votre âge. Il s'agit de la règle du 70 %, de l'approche fiscale et de l'approche budgétaire.

Plus vous vous approchez du jour J, plus la planification devra être précise. Si vous êtes à plus de 15 ans de la retraite, la règle des 70 % est appropriée, car ce projet est lointain et plutôt imprécis. Si vous cessez de travailler d'ici 5 à 15 ans, l'approche fiscale est toute désignée puisqu'elle vous permettra de préciser vos besoins. Quant à l'approche budgétaire, elle est préférable à moins de 5 ans de la retraite étant donné que vous êtes rendu à l'étape d'équilibrer votre budget à l'approche du grand jour.

Regardons d'un peu plus près ces trois approches. La règle du 70 % stipule que vous pourrez conserver le même niveau de vie à la retraite si vous remplacez 70 % de vos revenus bruts de votre vie active. Imaginons que votre salaire annuel avoisine les 60 000 $. Un revenu de 42 000 $ chaque année vous permettrait donc de préserver sensiblement le même niveau de vie à la retraite. Cette règle des 70 % s'inspire notamment de plusieurs régimes de retraite à prestations déterminées (la norme dans le secteur public), dans lesquels le retraité accumule une rente équivalente à 2 % de son salaire final moyen pour atteindre 70 % après 35 années de service.

La méthode du 70 % est une règle du pouce qui ne sied toutefois pas à tout le monde, prévient Hélène Gagné. «Quelqu'un qui gagne 40 000 $ devra peut-être viser 80 % de son revenu brut, tandis qu'une personne gagnant 300 000 $ pourrait se contenter de 140 000 $, ce qui représente près de 50 % de son revenu brut», nuance-t-elle.

L'approche fiscale, pour sa part, est basée sur votre revenu net. Il s'agit ici de conserver le même revenu net avant et après la retraite grâce à la disparition automatique de certaines de vos dépenses quand vous ne travaillerez plus. «Prenons un exemple où vous gagnez un revenu brut de 75 000 $, équivalant à un revenu net de 50 000 $. Avec cette approche, on va utiliser ce 50 000 $ net à titre de revenus pour répondre à vos besoins à la retraite», explique Yves Lizotte, CPA et planificateur financier au Groupe Investors, à Trois-Rivières.

Outre l'hypothèque, les coûts qui disparaissent à la retraite comprennent les dépenses liées à l'emploi (par exemple, les cotisations à la Régie des rentes du Québec), celles liées à votre mode de vie (par exemple, les dépenses liées aux enfants) ou l'épargne (par exemple, les cotisations au régime de retraite de votre employeur).

Enfin, l'approche budgétaire implique de préparer votre budget préretraite. «C'est le budget le plus précis possible de vos dépenses à la retraite, qui tient compte de vos dépenses de loisir ou de voyage», insiste Yves Lizotte. Cette approche nécessite par contre beaucoup plus de travail de planification. Par contre, elle aura tendance à être plus précise que l'approche fiscale, selon l'IQPF.

Même si ces trois méthodes permettent de mieux évaluer vos besoins en fonction de votre âge, il faut pousser l'analyse encore plus loin, fait valoir Dany Provost, associé et directeur de la planification financière et de l'optimisation fiscale à SFL Expertise, à Québec.

À ses yeux, il est primordial de faire la différence entre vos dépenses courantes, comme la voiture ou la maison, et les dépenses qui constituent votre niveau de vie (qui procure du plaisir), telles que voyager, sortir au restaurant ou aller voir des spectacles. «Il faut isoler nos centres de dépenses liées aux loisirs et les maintenir dans le temps», suggère Dany Provost. Plus vous serez près de la retraite, plus vous devrez être rigoureux dans le maintien de ces dépenses liées à votre bonheur.

 

Les erreurs courantes

Épargner en prévision de ses vieux jours est une bonne chose, mais encore faut-il éviter les erreurs ou les pièges qui pourraient faire en sorte de réduire l'argent qui sera vraiment à votre disposition, préviennent les spécialistes. «Le gros risque à la retraite, c'est de surestimer les rendements à long terme», prévient Sylvain Chartier, conseiller à Banque Nationale Gestion privée 1859. Par exemple, plusieurs personnes tablent sur des rendements annuels de 6 %, 7 % ou même 8 %, alors qu'un rendement de 5 % est un objectif «ambitieux», souligne-t-il.

Chaque année, l'IQPF publie ses prévisions à très long terme (sur une période de 30 à 40 ans) des rendements attendus de plusieurs catégories d'actifs, et ce, à partir d'estimations faites par des actuaires et des gestionnaires de portefeuille. En 2020, l'organisme prévoit que les titres à revenus fixes afficheront à long terme un rendement annuel moyen de 2,9 %, tandis que les actions canadiennes progresseront de 6,10 %.

Imaginons que vous ayez un profil d'investisseur équilibré (50 % de revenus fixes et 50 % d'actions canadiennes). À long terme, cela signifie que votre portefeuille affichera un rendement moyen de 4,5 % par année (50 % de 2,9 % + 50 % de 6,1 %), auquel il faut soustraire des frais de gestion d'environ 1 %, pour un rendement net de 3,5 %, explique Sylvain Chartier.

Et les rendements passés ? Ne faut-il pas en tenir compte ? Après tout, depuis 30 ans (du 1er juin 1990 au 19 juin 2020), la valeur de l'indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto a pratiquement été multipliée par cinq, passant de 3 346 à 15 474 points, ce qui représente un rendement de 362 %.

Aussi impressionnant soit-il, un épargnant ne peut pas vraiment utiliser cette information dans la planification de sa retraite, car «les rendements passés ne sont pas garants des rendements futurs», souligne Sylvain Chartier, en précisant que Banque Nationale Gestion privée 1859 ne s'appuie jamais sur des rendements passés.

Une autre erreur consiste à sous-estimer la durée de la retraite (souvent parce qu'un proche ou un parent est décédé relativement jeune), un problème d'autant plus criant pour ceux et celles qui prennent leur retraite relativement tôt, par exemple à 60 ans. «Souvent, les gens ne comprennent pas que la retraite peut durer de 30 à 35 ans», souligne Hélène Gagné, précisant que cette situation peut malheureusement amener les retraités à réduire leur budget en cours de route.

Selon les données de l'IQPF, 10 % des hommes âgés actuellement de 50 ans ont la probabilité de vivre jusqu'à 98 ans, tandis qu'une femme sur 10 de cet âge deviendra centenaire. Pas moins de 25 % des hommes et des femmes âgées de 50 ans affichent respectivement une espérance de vie de 94 et 96 ans.

«Personnellement, dans ma pratique, je fonctionne avec une espérance de vie oscillant de 90 à 95 ans», confie Yves Lizotte.

Plus vous vous approchez du jour J, plus votre planification devra être précise. Si vous êtes à plus de 15 ans de la retraite, la règle des 70 % est appropriée.

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Des outils de calcul

Des calculateurs ou des simulateurs des revenus à la retraite peuvent vous aider à estimer approximativement vos besoins financiers futurs, bien que ces outils soient imparfaits. D’ailleurs, dans son simulateur des revenus à la retraite (SimulR), Retraite Québec met en garde les particuliers en expliquant que les résultats ne peuvent pas remplacer les conseils d’un planificateur financier. Ces outils peuvent toutefois vous donner une idée générale de votre situation avant d’aller plus en détail avec un expert.

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