Comment gérer les chocs financiers

Publié le 08/11/2022 à 15:20

Comment gérer les chocs financiers

Publié le 08/11/2022 à 15:20

Les trois principaux types de ressources que l’on utilise pour gérer la perte d’un emploi sont les ressources financières, l’amour-propre et le soutien social. (Photo: 123RF)

Bien que le chômage soit encore très bas — 5,2% au Canada pour octobre —, des nouvelles de licenciements apparaissent sur les fils de discussion de LinkedIn et dans l’actualité avec les cas de Twitter et de Meta, nous rappelant qu’il n’existe pas de garantie de l’emploi. Alors comment pouvons-nous protéger nos vies du désastre dans le cas d’un choc comme un licenciement inattendu?

Nous sommes tous confrontés aux chocs économiques à un moment ou à un autre. De tous ces chocs, la perte involontaire d’un emploi est l’un des plus traumatisants et douloureux, et son impact se répercute sur notre vie affective, sociale, professionnelle et financière. Avec une inflation élevée, des marchés en baisse et des craintes de récession, la menace d’une crise comme une perte d’emploi plane lourdement sur beaucoup d’entre nous.

Heureusement, nous avons à portée de main plusieurs décennies de recherches sur les décisions à prendre et à ne pas prendre pendant et après un licenciement, et cela peut nous apporter une aide pratique si nous prenons acte des meilleures stratégies et des ressources essentielles qui s’offrent à nous.

 

Se concentrer sur le problème et sur l’affectif

Les recherches montrent qu’il y a deux principales stratégies d’adaptation auxquelles on a recours quand on est confronté à un choc négatif:

 

  • Les stratégies d’adaptation axées sur les problèmes, pour supprimer ou rectifier la source du désagrément.
  • Les stratégies d’adaptation axées sur l’affectivité, pour éviter, transformer ou atténuer la douleur affective.

 

Ces stratégies ont chacune leur utilité dans une certaine mesure, mais des circonstances différentes demandent des stratégies différentes pour obtenir le meilleur résultat. Par exemple, si vous avez une épine au pied, une stratégie axée sur le problème — l’enlever — est la meilleure façon de procéder. Si la douleur est causée par des points de suture, la meilleure approche est de l’éviter, l’atténuer ou l’ignorer pendant la cicatrisation.

Les stratégies axées sur l’affectivité consistent en une distanciation psychologique de la source du désagrément, une minimisation ou une ignorance de la douleur ou de sa source, un détournement de l’attention par rapport à la douleur ou à sa source, et une réévaluation positive de la situation.

Les investisseurs doivent souvent utiliser des stratégies axées sur l’affectivité pour atténuer ou ignorer les désagréments de la volatilité boursière et des pertes enregistrées par leurs placements ou tout simplement de s’en distancer. Dans ces situations, une stratégie axée sur l’affectivité peut être la réponse la mieux adaptée et la plus optimale parce qu’agir au mauvais moment peut conduire à des erreurs coûteuses.

 

Recadrer les choses de façon positive

La perte d’un emploi peut causer des émotions négatives intenses: la colère, la confusion, le chagrin, la tristesse et la peur, pour n’en nommer que quelques-unes. Les travaux de recherche étudiés suggèrent que l’outil d’adaptation affective le plus efficace dans ce cas est une réévaluation positive: recadrer les événements dans une lumière positive pour réduire la douleur et l’intensité des émotions négatives.

Un groupe de chercheurs a noté que ceux qui répondaient à un licenciement de façon pessimiste avaient très peu d’énergie psychologique en reste pour aborder des stratégies axées sur les problèmes. La réévaluation positive peut être spécialement utile parce qu’au lieu d’épuiser les ressources mentales par des efforts de distanciation et de détournement d’attention, la réévaluation contrebalance les émotions négatives par des émotions positives.

 

Comment se remettre sur pied après un licenciement

La manière dont fonctionne la réévaluation positive, c’est en créant une réponse affective plus tolérable, qui libère des ressources psychologiques à employer dans des stratégies axées sur les problèmes.

Les travailleurs licenciés qui préfèrent une approche au chômage axée sur le problème lui-même ont plus de chances de recevoir allègrement un nouvel emploi dans les mois qui suivent.

L’adaptation axée sur les problèmes se fonde sur l’action. Dans le cas d’une perte d’emploi, il peut prendre les formes suivantes:

 

  1. L’élaboration d’un CV
  2. Une recherche d’emploi proactive
  3. Une évaluation des compétences et une formation
  4. Un réseautage professionnel
  5. Des ajustements aux flux de trésorerie   

 

Une stratégie axée sur les problèmes utilise des ressources disponibles pour aborder les problèmes à leur source. Ces ressources, selon les psychologues qui étudient les pertes d’emplois, tombent dans trois catégories.

 

Les outils du succès

Les trois principaux types de ressources que l’on utilise pour gérer la perte d’un emploi sont les ressources financières, l’amour-propre et le soutien social. Bien que les ressources financières puissent paraître comme la plus évidente, les deux autres jouent aussi un rôle important pour déterminer comment s’adapter, et la marche à suivre pour obtenir un nouvel emploi.

 

Les ressources financières

Nous savons tous qu’il est sage de mettre suffisamment d’argent de côté pour faire face à plusieurs mois de dépenses courantes et il n’est pas surprenant que les gens qui disposent d’économies substantielles souffrent moins, que ce soit sur le plan psychologique ou économique pendant une période chômée. Toutefois, l’inflation a récemment érodé les économies de pas mal de gens, et ce qu’il reste ne leur permettra pas de faire face aussi longtemps qu’il y a un an.    

La baisse des marchés a fait diminuer la valeur estimée des placements, la hausse des taux d’intérêt a rendu les emprunts plus chers, et les craintes de récession ont ralenti l’embauche et les promotions dans pas mal de sociétés.

Tous ces facteurs font qu’il est plus difficile de trouver de l’argent liquide quand on est coincé. Que faire quand on a perdu son emploi et qu’on ne peut pas faire face à six mois de dépenses courantes?

L’assurance-emploi (Æ) est l’un des avantages de la mutualisation des risques au Canada. Les prestations varient selon la durée du travail exercé et d’autres facteurs, et c’est donc une bonne idée de vérifier son admissibilité et de faire une estimation de ses prestations avant d’être confronté à une perte d’emploi, de façon à planifier les choses de la façon qui convient.

Pour ceux qui ont un revenu modeste ou moyen, les prestations de l’assurance-chômage peuvent remplacer une portion appréciable du revenu perdu, allégeant ainsi le fardeau et intervenant en complément des économies d’urgence. Ceux qui ont des revenus (ou des dépenses) plus élevés devront probablement trouver d’autres sources de revenus en supplément de leurs prestations.

Si les économies et les prestations de l’assurance-emploi ne sont pas suffisantes, on peut puiser dans certains actifs illiquides en cas d’urgence. Les prêts sur valeur domiciliaire et les lignes de crédit («HELOC») peuvent être utiles en temps de vaches maigres, encore qu’emprunter pour résoudre des problèmes de flux de trésorerie doit être un dernier recours, pas une première ligne de défense.

À un moment où les taux d’intérêt augmentent, nous devons aussi être au courant de la manière dont les taux affectent nos choix d’emprunts et dont le chômage lui-même peut être préjudiciable à notre capacité d’emprunter.

Selon les taux d’intérêt en vigueur, les planificateurs proactifs feraient bien d’avoir en place une ligne de crédit non utilisée pour pouvoir se rabattre sur cette solution si leur épargne et leurs prestations d’assurance-chômage sont insuffisantes.

 

L’amour-propre

Une vision positive de sa propre personne est une ressource psychologique importante à tout instant et elle est cruciale quand on est confronté à des difficultés. Malheureusement, être remercié par un employeur peut sévèrement porter atteinte à l’amour-propre des gens, surtout si leur emploi joue un rôle important dans leur sens identitaire ou s’ils soupçonnent que leurs propres lacunes sont à l’origine de cette situation.

Tous les gens à qui j’ai parlé ont indiqué qu’être licencié avaient porté un coup à leur amour-propre. Toutefois, lorsqu’ils ont réévalué la situation, ils ont pu se concentrer sur leurs points forts, leurs actifs et la valeur qu’ils apportaient sur le lieu de travail, ce qui a stimulé leur confiance et les a aidés à rassembler l’énergie nécessaire pour être proactifs. Bien entendu, ce sera plus facile pour certains que pour d’autres.

 

Le soutien social

C’est le dernier type de ressource d’adaptation, qui peut prendre la forme d’amis, de famille, d’animaux de compagnie, de collègues ou d’un autre réseau social, quel qu’il soit. La qualité du soutien social est plus importante que sa quantité.

Le soutien social contribue à renforcer notre amour-propre quand il commence à faiblir, puisque ce soutien peut nous garder connectés à notre sens identitaire et à notre sentiment d’appartenance quand ces derniers sont menacés. Les connexions sociales peuvent aussi ouvrir des portes, créer des opportunités et initier des partenariats. Dans certains cas, être connecté socialement peut occasionner aussi un soutien financier et économique. Les conjoints et conjointes, partenaires et ami(e)s constituent un filet de sauvetage quand l’argent se fait rare.

La perte d’un emploi peut porter atteinte à notre sens de soutien social, surtout si la plupart de nos connexions sociales sont liées au travail. Constituer un ensemble divers de connexions sociales, réseauter activement et maintenir des relations professionnelles et amicales aux moments d’affluence peut vous aider en périodes de difficultés.

Les réseaux professionnels peuvent être une source majeure de soutien social. Les collègues, les connexions par LinkedIn et bien d’autres personnes peuvent ainsi vous apporter leurs encouragements et leurs suggestions pour vous créer de nouvelles opportunités.

 

Mieux rebondir

«Ne gaspillons jamais une bonne crise.» — Winston Churchill

Le changement forcé est difficile, et beaucoup d’entre nous considéreraient un licenciement comme une crise personnelle ou économique importante. Néanmoins, s’il faut y faire face, la résilience est l’objectif à atteindre. Cela veut dire qu’il faut rebondir, et rebondir si possible à une meilleure situation que celle que l’on vient de quitter.

Au cours des licenciements, de nombreuses sociétés offrent des services de transition aux employés et à leur famille pour les aider à rebondir. Ces ressources peuvent être par exemple des indemnités de départ, des services de constitution de CV, de recherche d’emploi ou de formation, et un soutien psychologique.

Les indemnités de départ peuvent être un supplément à l’épargne ou aux prestations de l’assurance-chômage et contribuer à rendre la transition moins douloureuse financièrement. Sachant ce qu’offre votre employeur ou ce qu’il a offert dans le passé peut vous aider à évaluer ce dont vous pourrez disposer si vous êtes licencié. N’oubliez pas non plus que les conditions d’une indemnité de licenciement peuvent être négociées selon votre situation particulière.

 

Élaborer un plan avant que la crise ne frappe

Devant la perspective d’une perte d’emploi, nous avons deux stratégies et trois ressources à notre portée pour nous aider à nous adapter. L’adaptation fondée sur l’affectivité peut nous aider à réparer notre amour-propre et une réévaluation positive à réduire la souffrance éprouvée. Sur le long terme, il faut que nous nous concentrions sur des stratégies axées sur les problèmes comme la formation, la constitution de CV, le réseautage et les activités propres à une recherche d’emploi.

Pour protéger notre vie contre les effets désastreux d’une perte d’emploi, nous devons nous employer dès maintenant à développer nos ressources avant la crise de façon à les avoir sous la main quand nous en aurons le plus besoin.

Si vous avez peur d’être remercié, votre filet de sauvetage financier est important, mais votre réseau social et le sens de votre propre valeur sur le marché sont tout aussi cruciaux. Que vous soyez licencié ou non, renforcer ces ressources comme des garde-fous vous protégeant des catastrophes est un investissement qui en vaut la peine.

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