Des choix de titres tout terrain


Édition du 11 Novembre 2020

Des choix de titres tout terrain


Édition du 11 Novembre 2020

Par Dominique Beauchamp

(Photo: 123RF)

Deux thèmes dominent en Bourse ces jours-ci:les entreprises bénéficiaires de la COVID-19 et celles qui profiteront du retour à la normale. Entre ces deux pôles, d’autres entreprises reçoivent moins d’attention. Nous avons demandé à trois gestionnaires de proposer des titres pour toutes occasions dont la valeur et les perspectives dépendent bien peu des ramifications de la pandémie. Les voici.


Barry Schwartz
Vice-président et chef des investissements Baskin Wealth Management

Groupe TMX 

X, 128,37 $
Croissance prévue des bénéfices sur 3 à 5 ans:+9,8 %
Ratio cours/bénéfice prévu:21,4 fois

Le propriétaire de toutes les Bourses canadiennes, incluant celle des produits dérivés, à Montréal, bénéficie d’un fort avantage concurrentiel sur lequel il s’appuie pour renforcer ses fondations et se diversifier.

«On peut le voir ainsi. TMX capte chaque jour un peu de la croissance des autres soit par les nouvelles inscriptions de sociétés en Bourse ou encore par les frais sur les transactions qui croissent naturellement avec l’appréciation à long terme de la taille des marchés financiers», explique Barry Schwartz. Au fil des ans, le groupe s’est élargi grâce, notamment, à l’acquisition transformationnelle de la londonienne Trayport, en 2017, dont les solutions servent aux négociateurs, aux courtiers et aux Bourses de produits énergétiques.

Plus récemment, le 25 septembre, TMX s’est portée acquéreur de AST, qui fournit des services d’agent de transfert et des services fiduciaires aux entreprises à capital ouvert ou fermé. Cet achat de 165 millions de dollars (M$) vise à consolider la position concurrentielle de Fiducie TMX en étendant son offre de services.

La société verse un dividende intéressant de 2 %, qui a augmenté à un rythme annuel de 10,6 % par année depuis cinq ans.

Le titre n’est pas une aubaine, mais le multiple de 21,6 fois le bénéfice prévu dans 12 mois est «raisonnable»compte tenu de sa capacité bénéficiaire, juge le gestionnaire de portefeuille. Ses profits devraient passer de 5,30 $en 2019 à 7,57 $en 2022, si l’on se fie au consensus des analystes sondés par Refinitiv.

 

Moody’s Corp.
MCO, 292,13 $US
Croissance prévue des bénéfices sur 3 à 5 ans:+9,9 %
Ratio cours/bénéfice prévu:27,7 fois

L’agence d’évaluation des titres de dettes fait partie de ces entreprises financières qui offrent un service presque essentiel, au même titre que les fabricants d’indices boursiers tels que S&P Global (SPGI, 358,68 $US) ou encore MSCI (MSCI, 411,97 $US).

Barry Schwartz préfère toutefois Moody’s Corp.aux deux autres parce que son action est moins chèrement évaluée. Le titre s’échange à un multiple de 27,7 fois le bénéfice prévu dans 12 mois par rapport à des ratios respectifs de 29,7 fois pour S&P Global et de 47,04 pour MSCI.

Surtout, Moody’s semble vouée à des années de croissance, tellement les entreprises du monde sont nombreuses à émettre des titres de dettes afin de rassasier les investisseurs avides de rendements à l’ère de taux zéro. En août, le marché mondial des dettes de sociétés frôlait 41 000 milliards de dollars (G$US) américains, selon l’International Capital Market Association. «Chaque nouvelle émission doit être évaluée et classifiée. Même lorsque la manne de nouvelles émissions de dettes se modérera inévitablement, les titres déjà en circulation devront être remplacés par d’autres à leur échéance, ce qui exigera encore de nouvelles cotes», indique le financier de Toronto.

Sa filiale d’analyse de gestion de risque Moody’s Analytics évalue également les pratiques d’investissement responsable des entreprises, incluant le risque climatique, qui sont des critères de placement qui prennent beaucoup d’ampleur. Deux acquisitions, Vigeo Eiris, en France, et la californienne Four Twenty Seven ont approfondi ses outils d’analyse à cet égard.

La société de New York acquiert aussi d’autres firmes de son domaine afin d’élargir des marchés.

«Les investisseurs peuvent compter sur une croissance modérée des revenus et des bénéfices de qualité même si le marché de la dette connaît aussi ses propres cycles de hauts et de bas», indique Barry Schwartz.

 

Colin Wong
Cogestionnaire Fonds d’actions américaines Mawer

CME Group 

CME, 150,49 $US
Croissance prévue des bénéfices sur 3 à 5 ans:+3,0 %
Ratio cours/bénéfice prévu:22,4 fois

Le principal marché d’options aux États-Unis bénéficie de plusieurs avantages concurrentiels, dont l’effet de réseau, fait valoir Colin Wong. Plus le volume des options échangées est important, plus l’écart entre le prix offert et le prix demandé est mince, et plus nombreux sont les négociateurs sur sa plateforme, et ainsi de suite.

Le 2 octobre, un nombre record de plus d’un million de contrats sur le soja a été enregistré.

CME négocie une foule de produits, ce qui facilite l’investissement sur marge parce que les négociateurs peuvent fournir différents placements à titre de collatéraux en garantie de leurs emprunts. «Cette flexibilité rend les clients plus loyaux», explique le gestionnaire de Calgary.

La plateforme fonctionne aussi 23 heures par jour, un autre avantage que les négociateurs apprécient. Enfin, CME a l’envergure pour investir en technologie, ce qui améliore sa performance en Bourse et réduit pour les clients le coût de chaque transaction, ajoute Colin Wong.

Le titre s’échange à un multiple de 22,4 fois les bénéfices prévus, ce qui n’est pas bon marché. Sur la base des futurs flux de trésoreries libres, l’action est tout de même au bas de la fourchette de la «valeur juste», établie par Mawer.

Son mode de fonctionnement, le parcours de croissance de 9 % de ses revenus et la répartition prudente du capital pèsent dans la balance, énumère aussi le financier.

 

Procter & Gamble
PG, 143,16 $US
Croissance prévue des bénéfices sur 3 à 5 ans:+8,5 %
Ratio cours/bénéfice prévu:24,6 fois

Le fabricant du détersif Tide, des couches Pampers et des rasoirs Gillette n’a pas besoin de présentation. Sa stature et ses grandes marques lui confèrent un bon pouvoir de négociation auprès des marchands, incluant Amazon, pour le placement de ses produits et sa stratégie de mise en marché.

Son énorme pouvoir d’achat s’étend aux dépenses publicitaires, ainsi qu’à l’approvisionnement des ingrédients et des emballages. «Ce qui est moins connu est le coup de barre donné par le grand patron depuis 2015. Il a réduit le nombre de produits et de marchés servis. La croissance des revenus est passée à 5 % et celle des bénéfices, à plus de 10 %», indique Colin Wong, en ajoutant que les intérêts des deux hauts dirigeants sont bien alignés avec ceux des actionnaires.

Le PDG David Taylor a non seulement instauré une approche plus intégrée, de l’emballage à l’expérience client, mais il a aussi accéléré la mise au point de produits. Ainsi, il a fallu seulement 18 mois pour lancer les couches Pampers Pure sur le marché, comparativement à dix ans pour la gamme précédente des Pampers Swaddlers, illustre Colin Wong. La société obtient aussi la cote de crédit de haute qualité AA, et gère judicieusement son capital. «Le risque que le titre baisse nous semble modeste par rapport au potentiel d’appréciation compte tenu des solides perspectives de croissance», soutient Colin Wong.

 

Marsh & McLennan Companies
MMC, 110,31 $US
Croissance prévue des bénéfices sur 3 à 5 ans:+6,1 %
Ratio cours/bénéfice prévu:21,1 fois

Le principal courtier d’assurance en dommages des États-Unis est aussi consultant en avantages sociaux, en régime de retraite et en gestion du patrimoine.

Fondamentalement, la demande globale pour l’assurance accidents et risques divers est «remarquablement»stable. «En 50 ans, les primes d’assurance n’ont baissé qu’à une seule occasion. Cela fait vraiment du courtier un choix toutes saisons», estime Colin Wong. Marsh & McLennan bénéficie aussi d’un avantage concurrentiel lié à l’effet de réseau parce que sa vaste expérience de gestion du risque ainsi que sa base établie de clients attirent et retiennent les assureurs et les entreprises. «Un gros client n’ira pas voir un petit courtier de peur qu’il évalue mal le risque assurable et mette ainsi en danger le règlement d’une future réclamation, pour l’interruption des activités d’affaires, par exemple, que ça soit pour un ouragan ou une pandémie», évoque le gestionnaire.

La filiale Mercer, qui prodigue des conseils en avantages sociaux et pour les régimes de retraite, jouit des mêmes avantages concurrentiels de taille, de savoir-faire en gestion de risque et de réseau que Marsh & McLennan, ajoute le financier.

Une base d’affaires stable, de nouveaux risques à assurer (pandémie, cybersécurité, catastrophes naturelles) et l’exécution solide par les dirigeants offrent ensemble un bon potentiel au titre en Bourse, tout en procurant une certaine protection contre des pertes à l’investisseur, résume Colin Wong. Au cours actuel, le titre se négocie au bas de la fourchette de la valeur juste établie par Mawer en fonction des futurs flux de trésorerie.

 

Richard Fogler
Cofondateur et chef des investissements Kingwest & Company

GFL Environmental 

GFL, 28,01 $
Croissance prévue des bénéfices sur 3 à 5 ans:s.o.
Ratio cours/bénéfice d’exploitation prévu:30,1 fois

Presque aussitôt arrivé en Bourse, le quatrième gestionnaire de déchets en Amérique du Nord a été accusé de pratiques comptables douteuses par un vendeur à découvert qui allègue que des transactions intercompagnies embellissent les résultats.

Richard Fogler et son équipe se sont penchés sur le rapport de Spruce Point Capital Management, qu’ils jugent peu convaincant. Les financiers ont alors analysé la société et sa gouvernance de plus près pour finalement conclure que son titre ne reflète pas la valeur de ses activités, en particulier les contrats à long terme d’enfouissement. «Notre analyse indique que la seule valeur des contrats d’enfouissement équivaut à sa valeur boursière. Au cours actuel, le titre accorde peu de valeur à ses autres activités et au potentiel de croissance», explique le gestionnaire d’expérience.

Le jeune PDG, Patrick Dovigi, est ambitieux, reconnaît Richard Fogler, qui le voit réaliser une série d’acquisitions pour percer de nouveaux marchés, comme celle de WCA Waste Corp, présente dans une douzaine d’États, acquise en août pour un montant de 1,2 G$US. Le gestionnaire signale que GFL peut compter sur l’appui de deux partenaires d’envergure, le groupe privé HPS Investments Partners, de New York, et la caisse de retraite des enseignants de l’Ontario, Teachers. HPS vient d’ailleurs vient d’acheter 600 M$US d’actions privilégiées convertibles pour financer l’acquisition de WCA, qui servira de tremplin pour d’autres achats. Le bilan est endetté, mais les deux dernières acquisitions hissent le bénéfice d’exploitation annuel à 1,34 G$US, ce qui est amplement suffisant pour s’acquitter des dépenses en capital de 480 M$US et des frais d’intérêts de 300 M$US. GFL pourra aussi refinancer les dettes existantes à meilleur coût à mesure qu’elle croîtra.

 

Brookfield Properties
BPY, 14,95 $
Croissance prévue des bénéfices sur 3 à 5 ans:s.o.
Ratio cours/bénéfice d’exploitation prévu:30,1 fois

Dans le cas du géant immobilier, Richard Fogler fait le pari que le pessimisme au sujet des perspectives des immeubles de bureaux et des centres d’achat après la pandémie est exagéré. «C’est vrai que Brookfield est un propriétaire immobilier endetté au moment où les gens travaillent de la maison et consomment en ligne. Ce verdict est néanmoins trop hâtif et ignore la qualité des immeubles de la société qui récoltent encore la majorité de leurs loyers», fait valoir le gestionnaire de fonds de placement et de fortunes privées.

Ses immeubles de bureaux de première qualité situés dans les villes les plus prisées sont loués à 92 %. «Le retour au bureau se fera à la longue et certains employeurs essaient déjà de planifier des espaces plus aérés», dit-il. À eux seuls, ces 134 immeubles dépassent la valeur totale de l’entreprise de 13 G$US, soit sa valeur boursière plus la dette. À ce total, le gestionnaire ajoute la valeur de 10 G$US, qu’il attribue aux quelque 25 centres d’achat les plus solides qui sont peu endettés. Les centres peu performants plus endettés ont peu ou pas de valeur, mais Brookfield peut renégocier au cas par cas les hypothèques commerciales.

«Dans le pire des cas, Brookfield pourrait laisser tomber les centres d’achat en difficulté et les hypothèques qui y sont associés sans ébranler le groupe», avance le financier.

Les défis des centres d’achat sont plus sérieux, reconnaît Richard Fogler, mais il reste convaincu que les chaînes bien en vue dans les meilleurs centres (loués à plus de 95 %) continueront à payer leurs loyers et que des concessions seront offertes aux commerces plus mal en point.

Les actifs immobiliers productifs préservent bien leur valeur, dans le temps. Richard Fogler donne en exemple la récente renégociation des termes de l’hypothèque du centre commercial de luxe Tysons Galleria, à Washington D.C.et la vente à bon prix d’un immeuble de bureaux londonien construit il y a deux ans.

En fin de compte, le gestionnaire accorde une valeur d’au moins 35 $par action au géant immobilier, un cours qui pourrait refaire surface d’ici trois ans.

 

À la une

Les proches aidants, l’angle mort de l’équilibre travail-famille

Mis à jour il y a 49 minutes | Catherine Charron

RHÉVEIL-MATIN. Les employeurs semblent mal comprendre leur réalité.

Bourse: la Banque Royale fait trembler le marché des actions privilégiées

BALADO. La Banque Royale envoie un signal clair qu'elle pourrait racheter toutes ses actions privilégiées.

Bourse: ce qui bouge sur les marchés avant l'ouverture vendredi 19 avril

Mis à jour il y a 9 minutes | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. Les marchés mondiaux battaient en retrait vendredi matin.