Le Nasdaq en 2022: l’histoire est-elle en train de se répéter?

Publié le 05/10/2022 à 14:16

Le Nasdaq en 2022: l’histoire est-elle en train de se répéter?

Publié le 05/10/2022 à 14:16

Le facteur déterminant de la correction boursière a été une chute brutale des ratios de valorisation provoquée par la hausse des taux d’intérêt et la peur d’une récession qui en résulterait. (Photo: 123RF)

L’indice composé Nasdaq axé sur la technologie a connu un début d’année chancelant, et les investisseurs s’inquiètent que ce secteur soit amené à suivre le même chemin que lorsque la bulle des dot-coms a éclaté en 2000-2002.

Nous sommes à la recherche de preuves nous permettant de vérifier le vieil adage selon lequel «cette fois, c’est différent».

Le tournant

Le signal alarmant le plus évident d’affaiblissement du sentiment technologique est celui que nous donnent les sociétés d’acquisition à vocation spécifique (SAVS). Ces véhicules financiers ont recueilli des milliards quand les taux d’intérêt étaient faibles dans la perspective d’une acquisition de société cotée en bourse ou d’une fusion avec cette dernière dans les deux ans. Même Donald Trump s’y est mis. Actuellement, les SAVS sont durement frappées par la chute des valorisations et le manque de liquidité ou de financement, et certains de leurs partisans les plus farouches sont en train de jeter l’éponge.  

L’implosion précédente de la bulle était plus liée aux scandales comptables (Enron, Wordcom), au recours à des magouilles financières comme les éléments de passif hors bilan, ou le recours excessif aux produits dérivés (appelés à ce moment-là des «armes de destruction massive» par Warren Buffett).

Il y a de nombreuses sociétés non rentables qui le demeureront encore pendant un certain temps, certaines pour des raisons provisoires (dus au risque plus élevés de récession), mais d’autres pour des motifs plus structurels et valables (l’incapacité de prouver que leur modèle d’entreprise crée de la valeur, car le rendement qu’elles génèrent ne couvre pas le coût du capital).

Ce fut le cas en 2000-2002, lorsqu’une société comme Pets.com a été liquidée dans l’année qui a suivi son entrée à la bourse.

Mais une raison plus fondamentale pour que la correction boursière se poursuive serait une révision à la baisse des estimations de bénéfices.

 

Pleins feux sur les bénéfices

Jusqu’à présent, le facteur déterminant de la correction boursière a été une chute brutale des ratios de valorisation provoquée par la hausse des taux d’intérêt et la peur d’une récession qui en résulterait.

Mais les estimations de bénéfices se sont bien maintenues.

Il y a eu ces derniers temps plusieurs signes alarmants sur les bénéfices, comme ceux de Snap (SNAP), Zoom Video Communications (ZM) ou Peloton Interactive (PTON), précédemment têtes d’affiche du monde pandémique, mais ces signes semblent plus idiosyncrasiques que révélateurs de problèmes plus larges.

Cela ne durera peut-être pas une éternité et pourrait dorénavant conduire les analystes à revoir leurs estimations de bénéfices à la baisse. Actuellement, les titres de l’indice composé Nasdaq se négocient à un cours/bénéfices de 25, qui demeure assez élevé par rapport aux marchés mondiaux et américains (dont le ratio c/b est plus proche de 16 en ce moment, conformément aux chiffres historiques).

Un risque fondamental identifié par les investisseurs serait celui d’un scénario récessionniste, où plus la révision à la baisse des bénéfices serait importante, plus bas l’indice chuterait.

Selon les derniers commentaires du président de la Réserve fédérale américaine Jerome Powell, ce scénario est de plus en plus probable. La conclusion serait ici serait d’attendre pour voir quelle sera l’évolution des bénéfices aux trimestres prochains avant de se mettre à chercher des opportunités. La saison des bénéfices du T3 va bientôt commencer, et les sociétés américaines publieront leurs rapports en octobre.

Les leçons de l’histoire

Les investisseurs pourraient aussi se pencher sur des facteurs techniques. L’indice est descendu au-dessous de sa moyenne mobile sur 200 jours au début de cette année.

En 2000, quand cela s’est produit, l’indice a baissé encore davantage.

Toutefois, les analyses de tableaux ne sont pas infaillibles. Il y a beaucoup de cas où les deux lignes se sont chevauchées, comme au quatrième trimestre de 2018, au cours de l’été 2015, pendant la crise de l’euro en 2010-2012, et bien sûr lors de la crise financière de 2008.

Tous ces épisodes ont été déclenchés par divers événements macroéconomiques, mais aucun d’entre eux n’a généré un effondrement boursier de la taille de l’implosion de la bulle technologique en 2000 : une des raisons pourrait en être le fait que les banques centrales aient appliqué une politique monétaire accommodante et gardé les taux d’intérêt à un faible niveau.

Cette différence pourrait prolonger encore davantage l’effondrement actuel.

La valorisation est la clé

En tant qu’investisseur, si vous décidez de synchroniser le marché et de prévoir quand le Nasdaq va toucher le fond, vous jouez un jeu dangereux.

Synchroniser le marché n’est pas vraiment un leitmotiv à Morningstar, parce que nos données ont montré à maintes reprises que cela conduisait à des rendements moins élevés pour l’investisseur.

Par ailleurs, si vous mettez l’accent sur le long terme et que vous pouvez supporter la volatilité boursière, votre souci principal devrait être d’acheter des actifs de qualité et de prêter attention aux valorisations.

À cet égard, la volatilité boursière n’est pas un problème. Certes, il est difficile de tolérer des pertes virtuelles quand on voit le cours d’une action chuter de 30 à 40% de plus, mais s’il s’agit d’un actif de qualité, cela ne devrait pas vous gêner beaucoup.

Se concentrer sur les valorisations est le meilleur moyen pour que vous puissiez générer des rendements convenables et contrôler le risque.

 

Le NASDAQ n’est pas un investissement particulièrement bon

Comme l’explique l’analyste de Morningstar Ryan Jackson, les règles régissant la construction de l’Indice Nasdaq-100 sont nées du désir qu’avait le Nasdaq de promouvoir la place boursière elle-même, et pas de justifier des placements. «L’indice prend les 100 plus grosses firmes non financières de sa liste et les pondère selon leur capitalisation boursière. Il exclut automatiquement les actions cotées sur d’autres places boursières, ce qui restreint l’ensemble d’occasions offertes au fonds sans aucune raison économique. Certains des titres à grande capitalisation les plus performants ces derniers temps, comme AbbVie ABBV et Eli Lilly LLY, sont exclus parce qu’ils sont cotés à Wall Street», explique-t-il.

Et il poursuit en disant que le modèle qu’applique le Nasdaq-100 n’est pas enraciné dans une logique de placement rationnelle. L’indice fonde l’admissibilité des actions sur l’endroit principal où elles s’échangent, ce qui limite leurs opportunités et nuit à leur diversification.

«La pondération selon la capitalisation boursière tombe sous le sens, mais pas un mandat exclusif au Nasdaq. Le Nasdaq-100 est un indice qui penche fortement vers la technologie, mais même des sociétés technologiques de premier plan comme Salesforce.com CRM, Oracle ORCL, et Visa V en sont exclues parce qu’elles sont cotées à la Bourse de New York. Créer un indice à partir d’une place boursière n’est pas justifié par une intuition économique solide et conduit à des exclusions arbitraires comme celle-ci», ajoute-t-il.

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