Alors que le partenariat public-privé (PPP) du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) croupit sous des allégations de malversations et un litige de 200 millions de dollars entre l'hôpital et le partenaire privé (un consortium dirigé par SNC-Lavalin), celui du nouveau Centre de recherche du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CRCHUM) reçoit de nouveaux éloges.
Le CRCHUM vient d'être nommé «projet de l'année» au Gala Elixir de l'organisme PMI Montréal, qui récompense les meilleures pratiques en gestion de projet. Ce prix décerné à un projet de partenariat public-privé survient alors que le principe même du mode PPP est remis en cause.
Les deux autres finalistes au Gala Elixir de PMI Montréal étaient le projet de salle d'urgence de l'Hôpital général juif et l'atelier de costumes du Cirque du Soleil.
Le jury a qualifié «d'exploit» la conception et la construction de ce complexe de près de 500 M$ dans les délais et le budget prévus et à la pleine satisfaction des besoins du client. Et ce, malgré un niveau extrêmement élevé de complexité.
Une complexité à la fois technique, organisationnelle et logistique. Le CRCHUM, qui comprend deux bâtiments - l'un de 15 étages, et l'autre de six étages, reliés par une passerelle - a été construit au-dessus de l'autoroute Ville-Marie et d'une station de métro, dans une zone densément peuplée. Des contraintes majeures, surtout lorsqu'il s'agit d'ériger un bâtiment hébergeant des équipements hypersensibles. Par ailleurs, il regroupe sous un même toit des activités jusqu'ici réparties dans six endroits différents et permet l'intégration complète de différentes phases de recherche médicale.
Le directeur général du Centre, Jacques Turgeon (récemment nommé directeur du CHUM) attribue la réussite de l'opération à une chose : «l'engagement fort et véritable des équipes de haut niveau, et ce, depuis la définition du projet jusqu'à sa réalisation».
Les deux équipes, celle du public et celle du privé (le consortium Accès Recherche Montréal) ont collaboré étroitement à la résolution de tous les problèmes, au fur et à mesure qu'ils se posaient. Et c'est ainsi que le projet n'a pas coûté la moitié du budget prévu pour les contingences, chose rare.
Le meilleur des idées des deux soumissionnaires
Le fait que le Centre de recherche ait été réalisé en mode PPP plutôt qu'en mode traditionnel a exigé du client qu'il établisse, non pas des plans et devis, mais des critères de performance, ce qu'il n'avait jamais fait. Selon M. Turgeon, la préparation a pris deux fois plus de temps. «Mais cela nous a permis de définir encore mieux nos besoins.» Plutôt que de choisir le partenaire privé en fonction du plus bas prix, l'équipe du futur centre a pu travailler avec les deux soumissionnaires et prendre le meilleur de chacune des deux propositions, en demandant au candidat retenu d'intégrer les meilleures idées de l'autre candidat (ce dernier a reçu un dédommagement financier). Selon le chargé de projet Jean-Marie Adam, l'établissement des critères de performance a été le plus grand défi, mais le recours à un outil appelé «projet de référence» a beaucoup aidé. Sur le plan de la réalisation, la réussite a été également favorisée par les liens constants entre les équipes et la régularité des rencontres. «Plus tu es proche de ton projet, mieux tu peux prévoir les mauvais coups», signale M. Turgeon. Malgré quelques différends, les relations avec le partenaire privé ont été excellentes, ajoute-t-il.
Un autre défi a été de bien faciliter et bien gérer les communications. À cet effet, on a adopté une plateforme de gestion documentaire appelée Aconex, que tous les utilisateurs (au nombre de 800) devaient utiliser pour échanger.
Est-ce qu'une telle réussite est attribuable au mode PPP ? «Le succès est dû à la collaboration étroite. Alors qu'en mode traditionnel, on peut la réaliser ou non, en mode PPP, on n'a pas le choix, estime M. Turgeon, qui connaît le mode traditionnel pour avoir oeuvré à la construction du Pavillon scientifique Jean-Coutu. C'est peut-être plus cher pour le client, mais c'est une assurance.»
En avril, cette année, le CRCHUM recevait un Prix d'excellence en immobilier. Et en 2012, c'est le montage financier de la construction du nouveau CHUM dans son entier qui avait été primé dans plusieurs concours nord-américains.
Un projet colossal...
35 000 pièces d'équipement
1 000 pages de critères de performance
72 réunions avec chacun des deux soumissionnaires pour raffiner les critères de performance
130 livrables
120 professionnels de toutes les disciplines
60 professionnels pour évaluer les propositions
25 professionnels dans chaque équipe maître
800 utilisateurs du système de communications du projet
7 ans de travail
... pour un bâtiment complexe
600 caméras de surveillance
500 portes contrôlées
75 laboratoires multifonctionnels
41 salles de formation
36 salles d'examens cliniques
15 lits pour essais cliniques
6 salles de simulation
Source : Centre de recherche du CHUM