lesaffaires

Le CELI de Marc Bélanger: miser gros sur Tesla

Par Jean Décary


Édition du 21 Septembre 2022

PLEINS FEUX SUR MON CELI est une rubrique où des investisseurs individuels partagent avec nous leurs bons et mauvais coups en investissement tout en soumettant leur portefeuille à l’analyse d’un pro.



(Illustration: Camille Charbonneau)


 


Âge : 49 ans | Occupation : fonctionnaire et blogueur


Valeur du CELI : 140 000 $ | Stratégie : Titres individuels


Bon coup : conserver longtemps des titres gagnants


Mauvais coup : mauvaise utilisation de la fonction « vente stop »


Objectif : laisser la magie des intérêts opérer longtemps


Son conseil à l’investisseur qui commence : commencez tôt et soyez patient


 


Quand son avoir net (l’actif moins le passif) a franchi la barre des sept chiffres à l’âge vénérable de 45 ans, cet ancien résident d’un HLM de la Petite-Bourgogne a célébré l’événement modestement, à l’image du train de vie qu’il a mené depuis sa jeunesse. Sortir de la pauvreté avait été un puissant motivateur pour lui, mais une fois ce statut de millionnaire atteint, il a pris le tout avec détachement. « Oui, ça me donnait une indépendance d’action. Mais sinon, bof… », dit celui qui n’accorde aucune importance au bling-bling et avoue n’avoir pas de goûts luxueux. « Pour marquer le coup, je me suis acheté une vieille moto Honda 2003. Voilà tout. » 


N’empêche, être millionnaire était un but pour lui. « À la maison, mes parents géraient à la petite semaine de l’argent emprunté. J’ai vite réalisé que j’étais au bas de l’échelle et que je voulais en sortir. » En grandissant, il va enchaîner les petits boulots (camelot, courriériste, etc.) et donner à un coup de main à sa mère avec le loyer. « Je n’économisais pas encore. J’achetais des choses qui me permettaient de m’évader, comme mon Commodore VIC-20. »


Doué en mathématiques, il va obtenir des prêts et bourses et faire son entrée à HEC Montréal. « L’idée c’était d’augmenter mes perspectives d’avenir. » 


Une fois son diplôme en poche, il va faire son entrée dans une banque. « Ç’a été le déclic sur le plan de l’enrichissement. » Il va occuper divers postes (caissier, commis, etc.) et rapidement devenir conseiller financier après avoir appris tout le b.a.-ba de l’univers des fonds communs de placement et des prêts hypothécaires. Il y croise beaucoup de clients avec de gros salaires, mais peu d’actifs. « Ce n’est pas tant combien tu fais, mais combien tu réussis à garder. » Un peu comme Tanguy, il va demeurer chez sa mère jusqu’au début de la trentaine et appuyer à fond sur la pédale de l’épargne. « J’ai pu acheter mon premier triplex à 30 ans. » Aujourd’hui, il possède également un duplex et deux condos (dont un en location). 


Et l’investissement dans les valeurs mobilières? « Mon REER est maximisé et j’ai un compte sur marge non enregistré. Quant au CELI, disons que ça a été une révolution : j’aurais adoré avoir cet outil à 18 ans. » Jusqu’au krach pandémique, il détenait dans son CELI autogéré des actions de la Banque Nationale (BN.TO , 91,90 $), des fonds négociés en Bourse (FNB) des principaux indices (le TSX de Toronto et le S&P 500 de New York) ainsi que des fonds communs de placement ciblant des titres de petite capitalisation et le marché de l’Asie-Pacifique.


Il décide de tout vendre au plus fort de la pandémie. « J’ai laissé un peu d’argent sur la table en vendant, mais je me suis refait et même plus. » L’entreprise d’Elon Musk, Tesla (TSLA, 283,70 $ US), constitue 98 % de son CELI, la balance est dans SOFI (SOFI, 5,92 $ US), une banque américaine en ligne, et Lion électrique (LEV.TO, 6,94 $). Il est conscient que son CELI est très concentré, mais il a d’autres planches de salut en cas de débâcle. « C’est un risque que j’assume et qui est relatif par rapport au poids de l’ensemble de mes actifs (immobilier et financiers), sans oublier ma caisse de retraite. »


 



 


Dans l’œil d’un pro


Martin Lalonde, président et gestionnaire de portefeuille à Rivemont, loue le parcours de l’investisseur et le félicite de l’atteinte de ses objectifs financiers. « C’est l’fun de voir ça. Il s’est instruit, il a appliqué sa méthode, il a été rigoureux et il récolte maintenant les fruits de son travail. » 


Le gestionnaire de portefeuille voit deux volets dans l’outil financier et fiscal que représente le CELI. « C’est un autre panier où des catégories d’actifs peuvent croître à l’abri de l’impôt. Mais c’est aussi l’endroit parfait pour réaliser des gains extraordinaires. » Il est d’avis que l’investisseur autonome a fait le pari du coup de circuit en concentrant grosso modo tout son pécule dans un titre.


« C’est un individu à valeur élevée et je comprends son raisonnement. Il a d’autres cartes dans son jeu et peut se permettre une possible perte sèche en cas de déroute de l’action qui, à la suite d’une vente, entraînerait également une perte d’espace CELI. » Le fait qu’il a vendu ses actions dans son CELI pendant la crise pandémique l’incite toutefois à penser qu’il est peut-être plus à l’aise avec des actifs moins liquides, tel que l’immobilier. « Je ne connais pas toute l’histoire, mais ça soulève des questions. » 


Quant à la concentration du CELI dans l’entreprise d’Elon Musk? « Est-ce que les beaux jours de Tesla sont devant où derrière l’entreprise ? » s’interroge-t-il. Il doute que cela soit visionnaire d’investir dans l’entreprise basée au Texas à ce stade-ci. Le gestionnaire de portefeuille serait plus à l’aise de détenir quelques entreprises fort innovantes au potentiel élevé. « Ça lui donnerait un peu plus de diversification dans un registre plus spéculatif. » Enfin, Martin Lalonde ne voit pas d’intérêt à conserver les deux autres positions dans son portefeuille vu leur petite taille. « Ce n’est pas significatif. Soit tu augmentes tes positions, car cela est conforme à ta thèse d’investissement, soit tu les vends. »


 


Si vous souhaitez vous aussi partager avec les lecteurs de Les Affaires votre stratégie d’investissement dans votre CELI et faire analyser votre portefeuille par un pro, écrivez-nous à denis.lalonde@groupecontex.ca