Un client ou un fournisseur qui fait défaut ou un marché qui change de cap peut rapidement mettre à mal la santé financière de l'entreprise. Quels sont les meilleurs conseils pour renforcer sa trésorerie et quels indicateurs doit-on surveiller de près ?
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«Les PME ont tendance à gérer leurs liquidités de façon quotidienne plutôt que d'anticiper, constate Benoît Mignacco, directeur général, capital de croissance et transfert d'entreprise à la Banque de développement du Canada (BDC). Il est toujours mieux de prévenir que de guérir en développant des réflexes de saine gestion.
Gérer ses liquidités peut en effet devenir rapidement une problématique clé pour un chef d'entreprise : «Si le fonds de roulement est serré, l'entreprise ne pourra pas s'approvisionner de manière adéquate et bénéficier d'escomptes», rappelle Nicolas Marcoux, associé et leader du groupe Conseils et Transactions chez PwC.
Sans compter que l'insuffisance de liquidités peut aussi limiter la capacité à investir ou à surmonter les effets d'un revirement économique. «Ces dernières années, on a vu plusieurs entreprises tomber au combat lors des difficultés du secteur manufacturier, de 2009 à 2011. Celles qui s'en sont sorties avaient su bien gérer leurs profits», rappelle Lynda Coache, FCPA et FCA à Raymond Chabot Grant Thornton.
Bien gérer son fonds de roulement implique de vérifier l'habileté de la société à remplir ses engagements dans les 12 prochains mois, en s'assurant notamment qu'elle possède suffisamment d'actifs à court terme pour supporter les passifs à court terme.
En plus d'avoir assez d'argent en caisse afin de couvrir les salaires et les déductions à la source, elle doit conserver assez de liquidités pour parer à une dépense imprévue, telle que le départ d'un employé clé ou le versement d'une indemnité de départ.
«La règle, c'est que ce ratio doit être supérieur à un point en fonction du secteur. Sinon, l'entreprise sera en situation précaire et incapable de couvrir sa dette à court terme», souligne Mario Fiorino, vice-président, services aux entreprises à la BMO.
Plusieurs experts estiment que les sommes dégagées doivent permettre de tenir de 3 à 6 mois, parfois jusqu'à 12 mois, en fonction du secteur. «On n'aura pas besoin du même fonds de roulement dans l'industrie agroalimentaire, où l'on paie ses fournisseurs sous 7 jours, que dans l'industrie aérospatiale, où cela peut aller jusqu'à 120 jours», constate Nicolas Marcoux.
Ainsi, il n'est pas rare de voir des entreprises fonctionner avec un fonds de roulement de 25 à 100 millions de dollars, et d'avoir des liquidités de 4 à 5 M$ qui traînent en continu, estime Michel Doucet, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Valeurs mobilières Desjardins. «Si une entreprise termine tout le temps au maximum de sa marge de crédit, c'est qu'il y a un problème», tranche Benoît Mignacco, de la BDC.
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Jouer sur les comptes clients et les stocks
Pour réduire la pression sur le fonds de roulement, les deux principaux leviers peuvent être d'améliorer la gestion des comptes à recevoir et des stocks, ce qui aura pour effet immédiat d'améliorer le niveau de liquidités. «Les entreprises ont tendance à n'y prêter attention qu'une fois qu'elles sont en difficulté. Mais une bonne politique sur les comptes à recevoir peut éviter de mauvaises surprises», estime Patrick Thibault, associé en conseils financiers chez Deloitte.
D'autant plus que personne n'est à l'abri d'un revirement du marché. «On peut demander à ses équipes de collecter plus rapidement les comptes clients, tout en négociant en parallèle un délai de 45 ou 60 à 80 jours pour les comptes à payer, sans pour autant briser la confiance avec les fournisseurs. L'objectif est de pouvoir convertir rapidement les stocks en comptes clients», conseille Mario Fiorino.
Il rappelle qu'il est parfois mieux de dire non à un client que d'aller au-devant de grosses difficultés pour collecter ensuite l'argent. «De même, plutôt que de demander une marge de crédit parce que les ventes sont en croissance, il peut être suffisant de réduire les délais de perception de ses comptes clients de 2 à 5 jours», ajoute-t-il.
Pour cela, les entreprises peuvent utiliser les virements électroniques ou les solutions de numérisation de chèques, qui permettent de réduire le délai d'encaissement.
Enfin, la gestion des stocks se révèlera déterminante pour assurer une bonne gestion des actifs au sein de l'entreprise, afin d'éviter d'avoir des équipements de valeur inactifs qui handicapent la capacité d'investissement et le pouvoir d'achat de l'entreprise. «Il faut s'assurer que toutes les immobilisations sont encore utiles à l'entreprise. Si un équipement dort dans l'usine, il est peut-être préférable de le revendre pour augmenter tout de suite le niveau de vos liquidités», rappelle Lynda Coache.
Des outils de surveillance
«La grande majorité des PME que je croise ont un tableau de bord faible, voire inexistant. Il a souvent été monté lors de la création de l'entreprise plusieurs années auparavant, et n'est plus à jour ou pas suivi», constate Patrick Thibault.
Dans les secteurs soumis à une économie saisonnière, comme les sports d'hiver, tributaires de la qualité de l'enneigement, une entreprise peut anticiper l'avenir en se basant sur son passif, en regardant les flux et le niveau de liquidités qu'elle possédait lors des épisodes les plus difficiles.
«Il est aussi important de revoir régulièrement sa politique en matière de trésorerie et de gestion des liquidités. Car le marché évolue tellement vite qu'on doit savoir s'il faut choisir la préservation ou le déploiement de ses liquidités en fonction du contexte», suggère Nicolas Marcoux.
Attention également à ne pas miser uniquement sur ses liquidités pour investir... «Beaucoup d'entrepreneurs commencent des projets avant d'avoir sécurisé les fonds additionnels et les financements nécessaires. Ils s'en tiennent à leur capital ou à leurs liquidités, ce qui porte une pression énorme sur leurs projets et le fonds de roulement de l'entreprise», conclut Patrick Thibault.
Gestion des liquidités
Série 3 de 4. Des conseils d'experts pour ne pas laisser dormir son bas de laine, mais s'en servir plutôt comme d'un levier en vue de croître et de prospérer.
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