Dans ma dernière chronique, j'ai maintenu qu'il était possible de limiter la portion consacrée aux actions dans son portefeuille à deux fonds, soit un fonds d'actions canadiennes et un fonds d'actions mondiales.
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Or, parmi les fonds d'actions canadiennes, une catégorie connaît un intérêt soutenu parmi les investisseurs : il s'agit des fonds d'actions canadiennes de revenu, souvent appelés fonds de dividendes. Peut-on utiliser de tels fonds comme fonds de base en actions canadiennes ? Il faut en étudier le contenu pour répondre à la question.
Parmi ces fonds de dividendes, certains ciblent des actions dont le rendement de dividende est élevé ; un bon exemple est le fonds négocié en Bourse (FNB) iShares Canadian Select Dividend Index (XDV), qui est composé des 30 sociétés rapportant le meilleur rendement et versant le plus de dividendes faisant partie de l'indice Dow Jones Canada Total Market.
D'autres ciblent des entreprises qui accroissent leur dividende de manière régulière, des études ayant montré l'importance des dividendes comme indice précurseur de la croissance future des entreprises : le FNB iShares S&P/TSX Canadian Dividend Aristocrats Index ETF (CDZ) en est l'archétype. Les gestionnaires de fonds de dividendes gérés activement ne se gênent pas pour combiner de diverses manières ces deux approches dans leur sélection de titres.
Ces deux types de fonds dits de dividendes ne visent pas le même objectif. Les fonds axés sur le revenu élevé de dividendes sont conçus pour les investisseurs, de plus en plus nombreux, qui veulent augmenter leurs revenus, dans un contexte où les intérêts obtenus sur les obligations et les certificats de placement garantis connaissent une baisse importante : «La distribution est une partie du salaire mensuel de nos clients qui sont en majorité des baby-boomers prenant de l'âge», nous confiait récemment John Priestman, cogestionnaire du Fonds de croissance et de revenu BMO.
Pourtant, dans le contexte du marché boursier canadien, cette quête de revenu peut mener à une concentration dans un ou deux secteurs boursiers que plusieurs ne soupçonnent pas et que certains jugeraient excessive. Le marché boursier canadien est déjà très concentré : les titres du secteur financier, de l'énergie et des matières y comptent déjà pour environ 36 %, 25 % et 11 %, respectivement, pour un total de 72 %.
Mais les critères de sélection de certains fonds de dividendes font en sorte qu'ils sont encore plus concentrés que le marché ! Ainsi, les titres financiers représentent environ 54,4 % de l'iShares Canadian Select Dividend Index et 59,1 % du PowerShares Canadian Dividend Index ETF (PDC).
De plus, les titres du secteur de l'énergie correspondent à 25,1 % de ce dernier, de sorte que deux secteurs représentent 81,7 % de l'actif de ce fonds. De même, l'énergie et la finance comptent respectivement pour 33,1 % et 42,4 % du FNB quantitatif leaders de dividendes canadiens RBC (RCD), pour un total de 75,5 %.
Et même lorsque la proportion des titres financiers d'un fonds est plus faible, il n'est pas rare de voir le taux combiné des secteurs de l'énergie et de la finance approcher les 65 %. Ainsi, les secteurs de l'énergie et de la finance représentent respectivement 33,6 % et 31,3 % du FNB BMO canadien de dividendes, pour un total de 64,9 %.
Cette concentration sectorielle des fonds de dividendes axés sur la génération de revenu élevé m'empêcherait de les substituer à un fonds de base d'actions canadiennes.
Par contre, les fonds axés sur le dividende en croissance se rapprochent davantage des fonds d'actions canadiennes «classiques», auxquels on a greffé des exigences de croissance du dividende dans le processus de sélection des actions. Puisque leur contenu varie, seule une étude au cas par cas peut déterminer s'ils peuvent être substitués à un fonds de base d'actions canadiennes.
Une évaluation élevée
Mais étant donné la nature du marché canadien, il ne sera pas facile de trouver de tels fonds ayant de faibles pondérations en titres du secteur de la finance ou de l'énergie. Tout de même, le FNB iShares S&P/TSX Canadian Dividend Aristocrats Index ETF cité précédemment affiche une pondération plus diversifiée, selon laquelle les titres financiers ne comptaient que pour 23,8 % et ceux de l'énergie pour 13,4 % au 16 octobre dernier.
Par ailleurs, l'évaluation des actions versant des dividendes est actuellement élevée. John Priestman nous confiait que son fonds se négociait récemment, avant la correction qui a débuté en septembre, à plus de 20 fois les bénéfices, soit son plus haut niveau jamais enregistré.
La baisse du rendement des obligations canadiennes de 10 ans explique en bonne partie cette performance : le rendement est passé de 2,78 % le 27 décembre 2013 à 1,94 % le 17 octobre 2014.
L'évolution des taux d'intérêt reste le plus important point d'interrogation d'un gestionnaire d'actions à revenu, selon Jennifer McClelland, cogestionnaire du Fonds de revenu d'actions canadiennes RBC.
Yves Bourget a fait carrière dans l'industrie des valeurs mobilières pendant une vingtaine d'années, notamment à titre de vice-président pour le Québec de Placements Altamira, de 1990 à 1997. Il collabore depuis 2001 à la publication Finance et Investissement, notamment en matière de fonds communs.
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