BLOGUE. Tout change tout le temps, à nous de nous adapter. Un nouveau boss arrive, il faut se plier à sa personnalité et sa façon de voir les choses. Un concurrent direct sort tout à coup du lot, il faut redoubler d'efforts pour ne pas se faire supplanter. Un nouveau produit surgit de nulle part, meilleur que le sien, il faut vite réagir avant de mourir. Bref, pas d'avenir sans résilience. Mais voilà, comment se montrer véritablement résilient, aujourd'hui?
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La réponse à cette interrogation existentielle se trouve, à mon avis, dans une étude passionnante intitulée Seven characteristics of highly resilient people: Insights from Navy Seals to the "greatest generation". Celle-ci est signée par trois personnes aux horizons complètement différents, mais complémentaires : George Everly, professeur de psychiatrie à l'Université de médecine Johns-Hopkins ; Dennis McCormack, retraité des forces spéciales de la Marine américaine, les Seal ("Sea, Air, and Land") ; et Douglas Strouse, le PDG de la firme Global Data, qui a crée avec sa femme une fondation de prévention du suicide, peu après que sa fille de 17 ans Kristin Rita ait mis fin à ses jours, en 2001, et qui est donc vivement intéressé par le phénomène de la résilience.
Les trois chercheurs se sont tout simplement demandé quelle était la meilleure définition de la résilience, plus précisément ce qui caractérisait le mieux les personnes très résilientes. Et pour cela, ils ont eu la riche idée de s'intéresser aux Seal.
Les Seal? Ce sont des soldats d'élite, chargés de remplir les missions les plus risquées qui soient : les opérations de reconnaissance derrière les lignes ennemies, la capture de chefs de guerre, les interventions en cas de prise d'otages à l'étranger, etc. Ce sont eux, par exemple, qui ont trouvé et tué Oussama Ben Laden au Pakistan, le 2 mai 2011.
L'origine des Seal remonte à la Seconde Guerre mondiale, quand les Américains ont considéré qu'il leur fallait absolument envoyer à l'avance des hommes sur le terrain pour préparer le débarquement de Normandie, des hommes capables de s'adapter à n'importe quel type de situation. C'est ainsi que l'Amphibious Scout and Raider School a vu le jour en 1942, à Fort Pierce, en Floride. Au programme pour les recrues : des mois d'entrainement intense, pour ne pas dire extrême. Aujourd'hui, chaque Seal Qualification Training enregistre un taux de recalés variant entre 70 et 80%. C'est qu'il faut, pendant 18 semaines, montré des talents exceptionnels dans toutes sortes de domaines : résistance aux conditions extrêmes, tant physiques que psychologiques ; maniement d'armes et tir de précision ; pilotage de différents véhicules (terre, air, mer) ; escalade ; déminage ; exploration de zones dangereuses ; etc. On le voit bien, les Seal sont des champions de la résilience.
MM. Everly, McCormack et Strouse se sont ensuite plongés dans différentes études et ouvrages sur la résilience, histoire de voir si des caractéristiques propres aux personnes résilientes en ressortaient. Par exemple, George Bonnano, professeur de psychologie clinique à l'Université Columbia, a considéré dans une étude datant de 2004 que la résilience était la faculté de maintenir de manière relativement stable ses fonctions physiques et psychiques, à la suite d'un traumatisme. Il considérait dès lors que pour être résilient, il fallait, entre autres, être solide, capable d'auto-amélioration et être globalement positif.
Autre exemple : une étude sur les enfants fugueurs. Celle-ci montrait que ceux qui réussissaient à fuguer longtemps étaient dotés d'une grande détermination, d'un certain optimisme face à l'imprévu, d'une capacité à donner un sens à leur vie et d'un grand souci de leur propre personne.
Idem, les chercheurs Haglund, Cooper, Southwick et Charney ont identifié dans une étude parue en 2007 six points communs aux personnes se remettant d'un traumatisme : elles font face à leurs peurs ; elle font régulièrement de l'exercice ; elles sont optimistes ; elles suivent une règle de conduite stricte ; elles recherchent un soutien (mentor, ami, etc.) ; et elles sont ouvertes d'esprit.
Enfin, les trois chercheurs ont procédé à des entrevues individuelles et à des focus groups avec des membres des Seal. De tout cela, il ressort, d'après eux, sept caractéristiques très particulières…
1. Présence d'esprit. C'est la faculté de rester calme dans la tourmente, et mieux, de faire preuve d'innovation en plein inconnu. La clé pour y parvenir, c'est de se dire qu'il y a toujours une solution au problème auquel on est confronté, et ce, même si on ne l'entrevoit pas encore.
«Chez les Seal, on demande de la discipline. On attend de l'innovation. On se dit toujours que la vie de ses coéquipiers et le succès de la mission reposent sur nos propres compétences techniques, notre don pour la tactique et notre souci du détail. On se dit en permanence que notre entraînement n'est jamais achevé», dit M. McCormack, dans un livre qui est actuellement sous presse, Innovation: Life blood of Navy Seals.
2. Détermination. La moindre hésitation peut être fatale chez les Seal, surtout aux moments critiques de l'action entreprise. Le corolaire, c'est que chacun se doit d'être responsable de ses faits et gestes, et donc ne pas avoir le bras qui tremble au moment crucial. «Les personnes hautement résilientes sont les premières à assumer leur geste, car elles savent que c'est ainsi que démarre toute véritable résolution de problème», estiment les trois chercheurs.
3. Ténacité. Petite question : savez-vous combien de tests a fait l'Américain Thomas Edison pour mettre au point l'ampoule électrique? Plus de 6 000, d'après lui. Mais le plus intéressant dans tout ça, c'est qu'il n'est pas vraiment l'inventeur de l'ampoule électrique. Le Britannique Humphry Davy l'avait inventée 79 années plus tôt, mais son invention voyait le filament de carbone griller trop vite pour représenter, à ses yeux, le moindre intérêt commercial, si bien qu'il a tout laissé tomber. L'une était tenace, l'autre pas, ce qui a fait toute la différence.
4. Cohésion. La force des Seal, c'est la cohésion du groupe. Sans elle, aucune mission périlleuse ne pourrait être remplie. Charles Darwin l'avait d'ailleurs noté en 1871 dans ses carnets : une tribu dont les membres sont soudés et prêts à se sacrifier individuellement pour les autres est toujours plus forte que les autres. Par conséquent, une personne résiliente sait se servir à bon escient des forces d'autrui.
5. Intégrité. «L'intégrité, c'est savoir faire ce qui est bien. Ce qui est bien pour soi, mais aussi pour les autres. C'est être capable de prendre la juste décision», disent les trois chercheurs.
6. Self-control. Il s'agit là de la marque de commerce des Seal. La faculté de se contrôler s'apprend et se développe, notamment «par la relaxation, l'entraînement physique, l'exercice mental et la nutrition».
7. Optimisme. Une récente étude de M. Everly tend à montrer qu'il existe deux sortes d'optimisme : le passif et l'actif. L'optimisme passif consiste à espérer que les choses iront mieux dans le futur. L'optimisme actif, à agir de telle sorte que l'avenir soit meilleur. Chez les Seal, il n'y a pas de place pour le pessimisme, pas non plus pour l'optimisme passif. «Le succès est un impératif, c'est le mode de vie des Seal. Pas le choix. Car l'échec est souvent synonyme de mort. Tout part donc d'une approche optimiste de n'importe quel situation rencontrée», expliquent-ils.
Voilà. Quiconque devenir vraiment résilient ferait bien de s'inspirer des Seal et de leurs sept caractéristiques fondamentales. En travaillant régulièrement votre intégrité, votre self-control, ou encore votre ténacité, vous pourriez devenir plus serein face à l'adversité, et par suite – qui sait? – obtenir des succès que vous imaginez aujourd'hui hors de votre portée. À vous de jouer!
En passant, Socrate disait déjà : «Ce qui fait l'homme, c'est sa grande faculté d'adaptation».
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