BLOGUE. ''Chérie, j'ai besoin d'argent. Je dois arrêter chez l'arnaqueur avant de rentrer à la maison''
''J'ai un fonds mutuels chez les bandits. Ça ne rapporte rien, puisqu'ils prennent tous mes profits''
''Les escrocs m'ont consenti une hypothèque! À 3,5% d'intérêts, ils vont pouvoir m'exploiter à fond!''
Ce genre de phrase revêt un aspect farfelu, mais à entendre parler les gens en général, nous avons bien l'impression qu'elles pourraient être populaires dans les conversations! Nous vivons à une époque où tous les maux de la planète semblent découler d'un secteur en particulier : le domaine bancaire.
Au Canada, on peut déceler deux discours. D'un côté, on blâme les banques de faire trop d'argent. De l'autre côté, on vante leur solidité et leur prudence pour avoir évité une crise aussi sévère que celle de nos voisins du sud (nous avons une vision différente de la situation, mais supposons qu'il s'agit de la réalité).
Chaque fois que nos chères banques publient des résultats, on cherche à les critiquer, simplement parce qu'elles ''semblent'' engendrer trop de profits. Dans un bulletin de nouvelles, pour lequel nous ne mentionnerons pas la chaîne de télévision visée, on annonça il y a quelques semaines qu'au 2e trimestre, les banques ont cumulé 7,8G$ de profits. La réaction de l'animatrice s'avéra évidente. On sentait une certaine indignation. Mais son collègue révéla qu'il en ressortait une bonne nouvelle, puisque la hausse des dividendes de nos banques aideront les rentiers et investisseurs à obtenir de meilleurs revenus. L'animatrice a donc renchéri en concluant qu'il y avait tout de même un bon côté à la situation!En quoi est-ce négatif que nos banques engendrent des profits à la hausse? Tout d'abord, les banques génèrent-elles de si bons bénéfices?
Si nous vous lançons un chiffre, sans rien ajouter, comme ''un milliard de dollars'', à quoi songez-vous? La majorité des gens penseraient au fait qu'il s'agit de beaucoup d'argent. Mais si ce chiffre correspondait au produit national brut d'un pays, on en viendrait vite à la conclusion que nous avons affaire à une très petite nation. À l'instar de la perte de JP Morgan & Chase (voir blogue), on doit mettre en perspective les bénéfices publiés. Nous avons reproduit ici les profits de l'année 2011 et la valeur marchande boursière d'aujourd'hui respectivement pour chaque banque :
Banque Royale : 4,9G$ et 82G$
Banque de Montréal : 3,3G$ et 38G$
CIBC : 3,1G$ et 32G$
La banque TD : 5,9G$ et 76G$
Banque de la Nouvelle-Écosse : 5,2G$ et 63G$
Banque Nationale : 1,2G$ et 12G$
Au total, les profits de 2011 s'élèvent à 23,6G$. Voilà beaucoup d'argent. Mais combien faut-il de capital pour avoir droit à ces profits? La coquette somme de 303G$. Pour dédommager les détenteurs de ces actions dans le cas d'une prise de contrôle, il faudrait débourser plus de 300G$. Nous pensons que les banques bénéficient d'un environnement favorable au Canada. Et la situation risque de changer drastiquement. Si les profits chutaient, les fonds de pension en souffriraient. L'évaluation des titres bancaires dépendent largement des dividendes versés. Une mauvaise économie forcerait ces banques à réviser ces paiements à la baisse, et les titres boursiers chuteraient en conséquence.
Nous sommes convaincus que si ce scénario survenait, il deviendrait une préoccupation importante au sein de la population. Les gestionnaires de retraite comptent ardemment sur ces titres pour rehausser leurs performances. Ces mêmes banques, avares, monstrueuses et sans compassion seraient montrées du doigt pour leurs piètres performances envers leurs actionnaires. Quelle ironie!
En attendant, alors qu'elles jouissent d'un marché immobilier en pleine ébullition, certaines personnes affirment que pour permettre à notre gouvernement d'augmenter les services et de boucler le déficit, il suffit de piger dans les profits bancaires.
Or, on ne peut obtenir le beurre et l'argent du beurre. Impossible de piger dans les profits de nos meilleures sociétés sans affecter sévèrement les épargnants. On a même émis l'idée de nationaliser les banques pour redresser nos finances publiques. Ainsi, l'état pourrait décider de réinvestir les profits dans des services publics, plutôt que dans le développement de ces institutions financières. On oublie pourtant que les profits sont déjà attribués aux actionnaires. Ces profits servent déjà à financer des retraites. Or, il existe une perception bien ancrée au sein de la population, à l'effet que ces profits reviennent à quelques individus ou corporations aux intentions malsaines, plutôt qu'à d'honnêtes gens qui épargnent ou qui sont à la retraite.