La vie n'est pas facile ces jours-ci pour l'investisseur qui cherche des revenus de placement.
Les taux d'intérêt sont faibles. La tentation, pour ne pas dire l'obligation, est de se réfugier dans des titres de sociétés établies telles que Telus ou BCE, qui offrent des dividendes dont le rendement varie de 3,75 à 4,5 %.
Le risque de ces investissements est que les taux d'intérêt remontent, et que pour maintenir des rendements supérieurs à ceux des obligations garanties, les titres ne reculent. Ainsi, si les taux grimpaient de 1 % et que le marché décidait qu'il maintient le différentiel actuel pour offrir du 5,5 % plutôt que du 4,5 %, le titre de BCE devrait reculer de plus de 16 %.
On ne dit surtout pas que c'est ce qui arrivera. Il peut y avoir de l'anticipation dans l'écart actuel de taux, et le mouvement peut être plus faible. BCE peut aussi être en mesure de créer davantage de valeur sur quelques années, ce qui lui permettra de hausser son dividende (et de protéger la valeur du capital investi aujourd'hui).
Le risque n'en demeure pas moins présent et on doit en tenir compte.
C'est dans ce contexte qu'avec le collègue François Normand, qui suit le secteur de l'énergie, nous sommes allés il y a quelques jours rencontrer le chef de la direction financière de Valener, Pierre Despars.
Un entretien fort intéressant. Particulièrement sous trois aspects : le souci de la direction de protéger l'investisseur, les résultats obtenus dans le passé, et le potentiel qui semble se dessiner.
Le souci de l'investisseur
L'histoire est méconnue, mais elle illustre comment la culture de l'entreprise montréalaise est favorable à l'investisseur.
Flash-back au 31 octobre 2006. Le ministre fédéral des Finances Jim Flaherty annonce la mise en oeuvre de son plan d'équité fiscale. Essentiellement, il s'agit de dire aux fiducies de revenus que dorénavant, elles devront payer de l'impôt. La mesure est juste, et vient rétablir l'équilibre fiscal (et concurrentiel) entre toutes les formes de sociétés au Canada.
Elle représente cependant aussi un dur coup pour la société en commandite Gaz Métro, qui ne payait pas non plus d'impôt. La nouvelle implique qu'à compter du 1er octobre 2010, une partie de la distribution sera amputée. En raison d'un soutien de dividende moindre, il est clair que le prix de l'action reculera fortement.
C'est dans ce contexte que Gaz Métro est restructurée et que Valener voit le jour (véhicule pour les investisseurs du grand public), aujourd'hui actionnaire à 29 % de Gaz Métro.
On n'entrera pas dans le détail de l'histoire, mais il est convenu avec les régimes de retraite déjà actionnaires qu'ils injecteront 20 M $ dans Gaz Métro. L'enveloppe sera utilisée sur trois ans, afin de maintenir la distribution au même niveau et de soutenir ainsi la valeur des investissements initiaux.
Pendant ce temps, Valener élabore un plan de match qui vise à générer suffisamment de bénéfices pour qu'après trois ans, ses propres activités puissent toujours soutenir la distribution, en remplaçant graduellement les sous qui sortent de l'enveloppe des fonds de pension.
Ce plan table notamment sur l'éolien et le développement avec Boralex (50 %, Gaz Métro 25 % et Valener 25 %) du complexe de la Seigneurie de Beaupré.
Théoriquement, l'éolien doit faire le pont. Il y aura cependant un peu de retard de ce côté, et c'est plutôt l'augmentation de rentabilité de Gaz Métro, grâce à son acquisition de Central Vermont Public Service, qui viendra finalement garantir le niveau de dividende.
Les résultats et le potentiel
La beauté de l'affaire est que le retard pris avec l'éolien amène aujourd'hui un potentiel intéressant pour Valener. Les bénéfices de la Seigneurie de Beaupré ne font en effet que commencer d'entrer dans les résultats.
Voyons le dividende. Il est actuellement à 1,04 $ par action. Au cours actuel de l'action, c'est un rendement de 6 %. Pas mal ce qu'il y a de mieux dans notre univers de titres à faible risque.
La direction de Valener prévoit que grâce à l'éolien, le dividende devrait se situer autour de 1,16 $ par action en 2018 (6,5 % de rendement par rapport au cours d'aujourd'hui).
Il y a mieux encore. Ces prévisions ne tiennent pas compte du projet de gaz naturel liquéfié que poursuit Gaz Métro (58 %) avec Investissement Québec. Avec Stornoway, Transport Robert et la STQ, on n'en est qu'aux balbutiements. La capacité de liquéfaction de l'entreprise a été triplée, et le but n'est pas de vendre qu'au Québec, mais aussi aux États-Unis.
Les prévisions ne tiennent pas non plus compte d'un projet de 154 M $ de prolongement d'une ligne de gaz naturel au Vermont.
Elles ne tiennent enfin pas compte d'acquisitions qui pourraient survenir.
Il y a des risques dans tout projet d'expansion ou dans toute acquisition. Mais Gaz Métro a de bons antécédents à titre d'acquéreur. Nous sommes aussi ressortis de l'entretien avec l'impression que les choses allaient assez bien dans le liquéfié.
Conclusion ?
Rien d'explosif, mais Valener semble l'un des titres à revenus les plus intéressants du pays. La société a une culture qui se soucie du rendement et du risque auxquels elle expose ses actionnaires. Le dividende offre un rendement relativement élevé. Et il semble y avoir suffisamment de projets porteurs à moyen terme pour protéger la valeur du titre en cas de hausse des taux d'intérêt.