Je viens de mettre la main sur l’édition 50e anniversaire du McKinsey Quaterly. Près de 200 pages portant sur un seul thème: le futur de la gestion.
On y explore sept thèmes : la nouvelle intuition managériale, les nouvelles frontières de la stratégie, l’intelligence artificielle et le leadership, l’organisation évolutive, la longévité des organisations, la productivité et la croissance, l’avenir du capitalisme.
« La prospérité ne se limite pas à l’accumulation d’argent. Elle se mesure à la qualité des solutions pol/écon/soc. dont une société dispose. »
J’ai retenu quelques idées pour chacun des sept thèmes. Les voici.
1- La nouvelle intuition managériale
Les trois forces qui teintent désormais toutes les décisions des gestionnaires (les marchés émergents, la technologie et le vieillissement de la population) changent d’allure.
Les nouveaux marchés émergents: entre 2010 et 2025, 440 villes généreront la moitié de la croissance du PIB mondial. Parmi ces villes, 95% sont des villes de taille moyenne dont la plupart des gestionnaires n’ont jamais entendu parler. Tel Tianjin, en Chine, et Kumasi, au Ghana.
La technologie disruptive: de très petites sociétés peuvent désormais – en peu de temps et avec très peu de capital – menacer la suprématie de grandes organisations. Ceci force les dirigeants à prendre des décisions rapidement dans un climat d’incertitude élevé.
Le vieillissement de la population : pour la première fois de l’histoire de l’humanité, la population pourrait atteindre un plateau dans la plupart des régions du monde. Dans certaines régions, la population a même commencé à décliner. Depuis 2013, 60% des humains habitent une région où le taux de fertilité ne suffit pas à assurer la création d’une nouvelle génération équivalente à la précédente.
Les deux tiers de la croissance d’une entreprise dépendent des conditions extérieures, comme celles énoncées plus haut. L’autre tiers dépend de la capacité de l’entreprise à tirer profit de ces conditions. Au cours des prochaines décennies, le plus grand défi des dirigeants sera la lutte à l’inertie corporative pour tirer profit rapidement des occasions d'affaires.
2- Les nouvelles frontières de la stratégieOubliez les cygnes noirs de Nassim Taleb. Méfiez-vous plutôt des rhinocéros gris. Isolés dans un zoo, ceux-ci sont impossibles à rater. Mais dans la forêt, les rhinocéros gris se confondent à la végétation. On ne les remarque que lorsqu’ils foncent sur nous… Comment les distinguer?
En prenant conscience de nos biais et de nos idées préconçues au moment de la prise de décision. Plus d’objectivité, de recherche et de discipline, moins d’intuition.
En revisitant le notion de victoire : aujourd’hui, l’entreprise gagnante n’est pas celle qui remporte la première place. C’est plutôt celle qui redéfinit les règles du jeu.
En migrant de la notion de capacité vers celle de compétence : plutôt que de dresser une liste morcelée de ce que votre organisation sait faire, tentez de voir ce qu’elle maîtrise.
3- L’intelligence artificielle et le leadership
Un ordinateur peut-il prendre de meilleures décisions qu’un manager? Parfois. Lors de la Révolution industrielle, les machines ont supplanté la force humaine. Cette fois, elles surpassent les capacités cérébrales. Parfois, cette puissance complétera celle du cerveau humain. Parfois, la machine rendra le cerveau humain obsolète.
Où le manager ajoutera-t-il encore de la valeur? Dans la compréhension des enjeux humains et sociaux complexes : la motivation du personnel (en misant davantage sur l’intelligence émotionnelle des employés et leurs « soft skills »), la compréhension du contexte politique d’un marché instable ou d’une nouvelle mode.
Un ordinateur répond aux questions qu’on lui pose. Le rôle du dirigeant sera donc de poser les bonnes questions. Et de s’attaquer aux anomalies que détectera la machine.
4- L’organisation évolutive
Voici quelques questions utiles pour s’assurer qu’une organisation ne stagne pas : -nos dirigeants possèdent-ils les compétences et les habilités requises pour atteindre nos objectifs de croissance?
-posons-nous les gestes nécessaires pour permettre à nos employés de développer des compétences et des habilités différentes de celles des machines?
-comment pouvons-nous utiliser les réseaux sociaux pour accélérer l’échange d’idées et de processus?
-quels procédés voulons-nous standardiser (calquer sur ceux de notre secteur, par exemple) et quels procédés souhaitons-nous uniques ?
-quelles sections de notre structure pourraient être virtuelles ?
-comment la technologie pourrait-elle nous aider à relocaliser certaines fonctions afin d’optimiser le talent, la relation-client ainsi que les coûts dans les pays émergents?
5- La longévité des organisations
Le concept de longévité se définit désormais en termes de cycles et non d’années. Une organisation survit à des cycles de produits et d’innovation, pas au passage des ans. Une clé à essayer : la rotation des managers, d’un poste à l’autre, d’un département à l’autre, d’une division à l’autre.
6-La productivité et les sources de croissance
On peut citer la réduction des barrières tarifaires, l’ouverture des marchés et les percées technologiques. Mais au cours des années à venir, la qualité de la gestion deviendra une des principales sources de gain – ou de recul – de la productivité. L’étude de secteurs comme l’acier et l’automobile a démontré que ce qui différencie une entreprise productive d’une autre qui l’est moins ce ne sont pas les moyens dont elle dispose ni la taille de ses investissements. C'est la qualité des décisions de ses gestionnaires. Les managers eux-mêmes mentionnent rarement le style de gestion comme un facteur de productivité. Pourtant, le développement des compétences des employés, par exemple, est associé à une plus grande productivité. Et l’investissement dans la formation est une décision de gestion.
7- Le futur du capitalismeOn a cru que le rôle du capitalisme était l’allocation de ressources et sa force, l’autorégulation. La crise de 2008 a démontré qu’on avait tout faux. Le rôle du capitalisme se limite à la création. Le capitalisme est doué pour créer des occasions d’affaires. Pour la répartition de la richesse et la régulation, il faut une intervention humaine, pas une main invisible! Revoir le rôle du capitalisme c’est aussi redéfinir la prospérité. Celle-ci ne se limite pas à l’accumulation d’argent. Un individu, et une société, sont prospères lorsqu’ils ont trouvé des solutions aux nombreux défis de leur quotidien. Plus nous disposons de solutions économiques, politiques et sociales, plus nous sommes prospères, individuellement et collectivement. Du coup, cela redéfinit la mesure de la croissance au-delà de la croissance du PIB.
Et quel est le rôle des entreprises dans l’économie capitaliste post-crise financière?
Une société prospère est celle où l’on a trouvé un maximum de solutions aux défis quotidiens des citoyens. Les entreprises ont donc pour mission de concevoir des produits et des services qui contribuent à résoudre, de façon efficace, les problèmes concrets des clients auxquels ceux-ci sont destinés.
En espérant que ce qui précède contribue à enrichir votre réflexion de gestionnaire.
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