Comment réduire son impôt successoral

Offert par Les Affaires


Édition du 24 Octobre 2015

Comment réduire son impôt successoral

Offert par Les Affaires


Édition du 24 Octobre 2015

Par Véronique Champagne

Raymond Thinel a 66 ans. Il a travaillé fort toute sa vie durant et a réussi à cumuler des actifs de bonne valeur qu'il souhaite, à son décès, léguer à sa femme et à ses deux enfants. Comme toute personne qui prépare sa planification successorale, il espère en donner le plus possible à ses proches. Et surtout le moins possible au fisc.

Bien qu'il n'y ait pas d'impôt sur la valeur de la succession ou de taxes successorales au Canada, il faut tout de même s'attendre à sortir le portefeuille à son décès.

«Il y a une disposition présumée de l'ensemble de nos biens, dit Sylvie Poitras, fiscaliste. Au décès, on est imposé sur la plus-value de nos actifs - le gain en capital qu'on a fait depuis l'achat du placement -, et le taux d'imposition dépend des revenus gagnés à l'année du décès.»

Il n'y a donc pas de raccourci : l'impôt doit être payé et fera à coup sûr baisser la somme léguée.

L'exception clé : l'héritage au conjoint

«En matière d'impôt à payer, il y a toutefois une exception importante, dit Sylvie Poitras. Quand c'est notre conjoint qui hérite de nos biens, il y a un roulement en matière fiscale, c'est-à-dire que le paiement de l'impôt sur le gain en capital est reporté. L'impôt ne devra être payé qu'au décès du conjoint.»

Ce report avantageux n'est pas transférable à quiconque, et ce, même si on est célibataire. Pour cette raison, afin de réduire l'impôt à payer au décès, il est préférable de léguer certains biens à son conjoint. La notaire Josée Dubé apporte toutefois une nuance : «Il s'agit d'un report d'impôt, et non pas d'un cadeau d'impôt...»

Enregistré ou non enregistré ?

En vue d'une préparation à la retraite, les placements enregistrés sont avantageux, puisqu'ils permettent de réduire le montant du revenu imposable année après année en vertu du principe de déduction. On paie moins d'impôt de son vivant... mais on débourse à son décès une partie de la plus-value accumulée. Les placements de type CELI, bien que non déductibles, croissent quant à eux à l'abri de l'impôt.

«C'est une question de choix, dit Mme Poitras. Les produits enregistrés donnent des avantages de son vivant, les autres, à son décès. Il faut considérer que tout ce qui procure un avantage de son vivant influence aussi, au bout du compte, notre valeur à notre décès...»

«Un héritage, c'est un don au décès, explique Mme Poitras. Donner de son vivant a donc les mêmes conséquences du point de vue fiscal, mais on devance alors le paiement de l'impôt.»

Pourquoi payer maintenant au lieu de payer plus tard ? Parce qu'on peut parfois payer moins maintenant... En effet, si on sait que la valeur d'un actif augmentera considérablement dans les prochaines années et qu'on est assujetti à un taux d'imposition favorable aujourd'hui, le don de son vivant peut être une option payante.

Par contre, jamais il ne faut considérer vendre ses biens à un prix de faveur. «C'est une erreur, dit Sylvie Poitras, car on paie alors beaucoup plus d'impôt. À la vente, on verse de l'impôt sur la valeur marchande. Notre proche paiera les impôts sur un gain en capital énorme, puisqu'il sera évalué entre la valeur marchande à la revente et le prix d'acquisition qui a été minime.»

La fiducie, une solution intéressante

Pour les gens bien nantis qui ont cumulé beaucoup d'actifs, comme M. Thinel, la fiducie peut être une solution pour réduire l'impôt à payer.

«Par la création d'une fiducie, on transfère en fait nos biens à un patrimoine distinct, explique Mme Poitras. À notre décès, il n'y a aucun impact fiscal, puisque nos biens ne sont plus entre nos mains. Bien sûr, l'impôt a été versé au moment du virement des biens à la fiducie, mais leur plus-value s'y accumulera pendant des années sans que leur valeur soit diminuée par l'impôt. Les héritiers pourront quant à eux profiter de cette valeur dès aujourd'hui [ou selon les termes précisés dans l'acte testamentaire] et pour "toujours", d'une certaine façon.»

Cette option était très avantageuse pour Raymond Thinel, qui souhaitait que ses entreprises de location continuent d'exister et de prospérer après son décès, et que sa famille en profite sans pour autant qu'elle ait à s'en préoccuper.

«Mes enfants ne souhaitaient pas reprendre les rênes des entreprises, dit-il, mais je voulais qu'ils puissent profiter de sa valeur. Par la fiducie, un notaire et un comptable s'occuperont de toute la gestion de mes entreprises, et mes enfants et ma femme recevront une rente mensuelle qui prendra compte de l'équité accumulée dans les entreprises.»

«L'impôt a déjà été payé, ajoute le futur retraité. Ma famille n'aura pas à se soucier de ça.» Ce n'est que tous les 21 ans que l'impôt devra être versé selon la juste valeur marchande des actifs, à la suite d'une nouvelle règle fiscale.

L'homme a donc l'esprit tranquille, il a trouvé une solution qui maximise l'argent que ses proches récolteront à son décès.

Consultez nos vidéos sur les enjeux relatifs à la succession sur notre site Web, à lesaffaires.com/dossier/preparer-sa-succession.

Préparer sa succession

Série 3 de 6. Plus de 50 % de la population n'a pas de testament, dont près de 25 % des 55 ans et plus. Ce qui est susceptible d'entraîner certaines complications pour les proches au décès. Dans une série de six reportages, nous explorons les enjeux liés à la transmission du patrimoine lors du décès et des pistes de solution qui peuvent être empruntées.

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