Encadrement réglementaire: quelle direction prendre?

Offert par Les Affaires


Édition du 25 Août 2018

Encadrement réglementaire: quelle direction prendre?

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Édition du 25 Août 2018

Par Richard Cloutier

Une «ferme» de cryptomonnaies [Photo: 123RF]

La réglementation constitue une barrière à l’entrée des fintechs sur le marché et à leur réussite, a conclu le Bureau de la concurrence au terme d’une étude de marché sur l’innovation axée sur les technologies dans le secteur canadien des services financiers, publiée en décembre 2017.

« Bien que les cadres réglementaires en vigueur soient indubitablement importants pour protéger les consommateurs et atténuer les risques internes et externes associés à l’ensemble du système financier, ils risquent de freiner involontairement l’innovation et les avantages concurrentiels qui en découlent », indique le rapport. 

Ian C. W. Russell, président et chef de la direction de l’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières (ACCVM), déplore d’ailleurs que les organismes de réglementation se soient jusqu’ici surtout attachés « à réglementer les nouvelles entreprises de technologie financière au détriment de se demander si la réglementation actuelle devrait être changée pour tenir compte des nouvelles technologies et de l’innovation en cours », a-t-il écrit dans son billet mensuel de mai 2018. 

Il est d’avis que les régulateurs doivent chercher à mieux comprendre les innovations technologiques du secteur et leurs conséquences sur les activités et le fonctionnement des sociétés, tout en accordant la priorité à la découverte et à l’élimination des obstacles aux pratiques efficientes.

À cet égard, l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) a ajouté à ses priorités 2019, en juillet 2018, une dixième stratégie intitulée « Soutenir la transformation de l’industrie ». Elle concerne l’essor de la fintech, de la blockchain et des actifs numériques, dans le contexte de leurs implications transformationnelles pour les parties prenantes.

Accompagner, étudier, anticiper 

Au Québec, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a créé un groupe de travail sur les fintechs dès juin 2016. Aujourd’hui, ce groupe qui réunit plus de 60 personnes contre une quinzaine au départ, est organisé autour de six chantiers consacrés à différents aspects de la technologie financière : les registres distribués ou la blockchain ; les cryptomonnaies et les solutions de paiement mobile ; les plateformes de financement ; les outils automatisés comme les robots-conseillers ; les mégadonnées, l’intelligence artificielle et les objets connectés et enfin, les regtechs.

Il faut dire que l’évolution d’un écosystème numérique dans le secteur financier soulève une variété d’enjeux.

Par exemple, la manière dont l’intelligence artificielle va influencer la construction d’outils automatisés de gestion de portefeuille et l’analyse du comportement du consommateur, le fait que la technologie blockchain va s’intégrer ou se substituer aux systèmes actuels de transactions financières ou de compensation centralisés, que la voiture autonome va faire évoluer l’analyse du risque en assurance, sans oublier l’essor des cryptomonnaies et la protection des renseignements personnels.

Un comité consultatif composé de douze membres issus de la communauté fintech maintient aussi un dialogue entre le secteur et le régulateur. 

Comprendre les nouveaux modèles d’affaires

Pour Moad Fahmi, directeur, fintech et innovation à l’AMF, il est impératif que le régulateur comprenne bien les nouveaux modèles d’affaires proposés dans l’industrie, ainsi que les technologies qui les appuient, afin d’acquérir une vision en amont de la manière dont l’encadrement devra être adapté pour répondre aux besoins des consommateurs et du marché.

Dans cet esprit, l’AMF s’est engagée en février 2017 dans un projet réglementaire aux côtés des régulateurs des autres provinces et territoires canadiens réunis au sein des Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM).

Ce projet, dit de bac à sable, permet à des fintechs de s’inscrire ou d’obtenir une dispense des obligations prévues par la législation en valeurs mobilières, afin de tester sur le marché canadien des applications, des produits ou des services, au cours d’un laps de temps déterminé.

Plus de 120 demandes ont été acheminées à l’AMF au cours des 12 derniers mois. « La très grande majorité concernait les monnaies virtuelles », en provenance de gestionnaires de portefeuille ou de fonds d’investissement désirant « investir dans des crypto fonds ou des cryptomonnaies, ou pouvoir conseiller leurs clients intéressés à le faire », indique Patrick Théorêt, directeur du financement des sociétés à l’AMF et responsable du projet de bac à sable réglementaire pour le régulateur québécois.

De ce nombre, environ 25 demandes se sont qualifiées pour traitement. La première — et la seule — dispense de prospectus et d’inscription à titre de courtier accordée par l’AMF jusqu’ici, l’a été le 15 août 2017 à Impak Finance de Montréal, afin de lui permettre de procéder à un premier appel public de cryptomonnaie (Initial Coin Offering ou ICO en anglais) pour financer la création de mpk.impak.eco, un réseau social collaboratif. Toutefois, ayant constaté l’engouement propre aux émissions publiques de cryptomonnaies et de jetons, les ACVM ont publié en juin 2018 un avis fournissant des indications supplémentaires sur l’applicabilité de la législation en valeurs mobilières relative à ces émissions.

« Ils sont nombreux à lancer des roches aux autorités de réglementation canadiennes, parce qu’elles sont peut-être un peu plus lentes à agir qu’ailleurs », constate Philippe Daoust, vice-président, directeur général, capital de risque, à la Banque Nationale.

Celui qui est chargé des investissements auprès des fintechs pour la Banque estime que les régulateurs canadiens sont effectivement peut-être « un peu plus prudents qu’ailleurs, mais quand on regarde ce qui s’est passé en 2008, ce n’est peut-être pas la mauvaise approche ». 

Lors de cette crise financière, des banques américaines et européennes ont fait faillite ou ont dû être sauvées, alors que le marché canadien avait été bien protégé, rappelle Philippe Daoust.

Il ajoute : « Laissons les régulateurs arriver à leurs fins, car ils ont de l’expérience et auront la bonne solution pour protéger non pas les banques, mais le client. C’est pourquoi je suis très à l’aise avec ce qu’ils font et la manière dont ils le font. »

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