Le monde du génie embrasse la diversité


Édition du 26 Octobre 2022

Le monde du génie embrasse la diversité


Édition du 26 Octobre 2022

Par Philippe Jean Poirier

Marie St-Gelais a fondé la firme Ashini Consultants en 2016. Depuis, l’ingénieure innue fait la démonstration qu’il existe bel et bien une manière « autochtone » de pratiquer le génie. (Photo: courtoisie)

GÉNIE-CONSEIL. Le monde du génie souscrit à l’objectif d’amener le pourcentage de femmes nouvellement diplômées en génie à 30 % d’ici 2030 (l’initiative 30 en 30 d’Ingénieurs Canada). Au Québec, ce pourcentage était de 19,6 % pour l’année 2020. Suzanne Demeules, ingénieure et cheffe de la direction des pratiques d’affaires de la firme de génie-conseil Cima+, est convaincue que cet objectif est réalisable.

« Je suis peut-être une éternelle optimiste, mais je crois qu’un déclic est en train de se faire. Après le droit et la médecine, c’est au tour du génie de se féminiser », lance-t-elle avec enthousiasme. Pour y parvenir, ajoute-t-elle, il faut continuer d’exposer les jeunes filles aux sciences, tout en leur proposant des modèles inspirants. « Plus les modèles seront visibles, plus il y a aura de femmes attirées par le génie. »

La responsable des pratiques d’affaires cite sa firme en exemple : Cima+ affiche la parité sur son conseil d’administration, puis plusieurs divisions — dont celle de la mécanique du bâtiment, fortement masculine — sont dirigées par des femmes. « Notre président de l’époque, François Plourde, a eu l’ouverture de nommer des femmes associées, puis dans des rôles différentiateurs ayant de grandes responsabilités. »

La firme lavalloise en récolte les fruits aujourd’hui. Selon les données compilées pour son rapport de responsabilité sociale 2021, ses équipes d’ingénieurs sont constituées à 20 % de femmes. Dans la Division de génie des eaux, le pourcentage s’élève à 54 %.

Pour Suzanne Desmeules, l’occasion d’« innover, de faire la différence et de créer un monde meilleur » constitue un facteur attractif pour bien des femmes ingénieures. « Mes équipes en environnement et en génie des eaux sont majoritairement féminines, explique-t-elle. Quand je vois la passion qui les anime, ça fait tout mon bonheur. »

 

Génie autochtone : comprendre les valeurs

Marie St-Gelais a fondé la firme Ashini Consultants en 2016. Depuis, l’ingénieure innue fait la démonstration qu’il existe bel et bien une manière « autochtone » de pratiquer le génie.

Après dix ans de pratique en génie civil chez différents employeurs, Marie St-Gelais a racheté une petite firme de génie-conseil de Saguenay en 2016, avec l’intention d’en faire une entreprise authentiquement « autochtone ». Liée à la communauté innue de Pessamit par sa grand-mère « Ashini », la dirigeante choisit ce nom d’entreprise pour accomplir la mission de desservir les Premières Nations.

La même année, la firme de consultation démontre la valeur ajoutée d’avoir un partenaire autochtone dans un projet d’ingénierie. Nommée gestionnaire de chantier de construction du nouveau Centre de santé et de services sociaux de Pessamit, Ashini Consultants parvient à attribuer 60 % des heures en construction à des travailleurs locaux. « Nous avons travaillé très fort pour obtenir des accréditations syndicales aux gens de la communauté », explique l’ingénieure-entrepreneuse.

Pour un mandat de conception d’un centre culturel, Ashini Consultants choisit le bois comme matériau principal. « À Pessamit, il n’y en a pas, de monteurs d’acier, mais il y a des menuisiers. Si je veux faire travailler mon monde, je dois penser à faire ma structure en bois. » Et les exemples s’enchaînent ainsi.

De 2016 à 2022, la firme de Saguenay a établi des bureaux dans les communautés de Pessamit, de Mashteuiatsh et de Uashat, passant de 4 à 20 employés, dont trois sont Autochtones. « En tant que Premières Nations, nous avons beaucoup à gagner de développer une expertise en génie-conseil. Lorsque nous négocions avec Hydro-Québec ou avec des compagnies minières, nous devons avoir notre mot à dire sur le plan technique. »

Enthousiaste quant à l’avenir, l’actuelle étudiante au MBA en leadership autochtone à l’Université Simon-Fraser fait remarquer que la culture autochtone — axée sur les valeurs communautaires et le bien-être des individus — a déjà commencé à avoir une influence sur le génie et la société dans son ensemble.

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