L'assurtech à l'ère de la COVID-19

Offert par Les Affaires

Publié le 21/09/2020 à 10:39

L'assurtech à l'ère de la COVID-19

Offert par Les Affaires

Publié le 21/09/2020 à 10:39

Par Richard Cloutier

Geosapiens a développé E-NUNDATION, une plateforme web qui permet une cartographie dynamique et prévisionnelle des risques d’inondation. (Photo: 123RF)

COVID-19 : la réponse de l’industrie
Richard Cloutier
La réponse des assureurs de dommages à la situation inédite engendrée par la COVID-19 depuis la mi-mars s’est déployée sur trois axes. Leurs priorités ont été d’assurer la sécurité des employés, de maintenir un service continu aux clients et de soutenir la communauté. 
Chez belairdirect, la capacité des systèmes informatiques a rapidement été augmentée pour permettre au plus grand nombre d’employés de travailler depuis la maison. « En quelques jours à peine, 98 % des employés étaient installés en télétravail », signale Émilie Dutil-Bruneau, directrice principale, communications, responsabilité sociale et marque employeur chez belairdirect.
L’assureur fondé à Montréal en 1955 a aussi mis en place des mesures d’allégement pour aider ses clients aux prises avec des difficultés financières. En plus de soutenir des organismes, incluant le Club des petits déjeuners, « pour cibler les besoins immédiats des personnes et des familles les plus vulnérables aux répercussions sociales, sanitaires et économiques de la pandémie », témoigne Mme Dutil-Bruneau.
Le 8 avril, les sociétés membres du Bureau d’assurance du Canada (BAC) – soit 90 % du marché de l’assurance de dommages au Canada – ont confirmé une série de mesures d’aide aux consommateurs, incluant des options de paiement souples, et le renoncement aux frais pour insuffisance de fonds.
Le confinement a aussi eu un impact sur le comportement des assurés. En travaillant de la maison et en limitant leurs déplacements à l’essentiel, ceux-ci ont moins utilisé leur véhicule et fait moins de kilométrage.
La baisse de l’utilisation des véhicules a été corroborée par les données du programme Ajusto, confirme Valérie Lavoie, présidente et chef de l’exploitation, Desjardins Groupe d’assurances générales. « En avril, les utilisateurs d’Ajusto avaient parcouru seulement 50 % de leur kilométrage habituel. En juin, on est revenu à 90 % donc légèrement en baisse par rapport à l’avant Covid-19 ».
Dès avril, Desjardins a mis de l’avant des mesures d’allégement selon différents termes, incluant une remise sur les primes d’assurance auto aux personnes confinées et une remise entre 25 % à 40 % du montant de la prime d’assurance auto payée pour un mois, pour un total de 100 millions de dollars (M$).
Le BAC évaluait en avril que pour la période de 90 jours suivant le début de sa mise en place chez les assureurs, la mesure de réduction de primes d’assurance automobile découlant des changements dans les habitudes de conduite apportés par la pandémie « pourrait permettre aux consommateurs de réaliser des économies de 600 M$ ».
En assurance habitation, de nombreux assureurs ont temporairement haussé la limite de couverture prévue aux contrats d’assurance habitation pour les biens utilisés pour exercer un travail à domicile. Desjardins Assurances a par exemple haussé à 10 000 $ la limite de cette couverture, et a appliquée automatiquement cette protection supplémentaire à l’ensemble des détenteurs d’une assurance habitation.
Impacts financiers
Le vaste redéploiement des équipes en télétravail, accompagné d’une réorganisation en matière de solutions numériques, ainsi que la flexibilité démontrée à l’égard des clients relativement aux options de paiement et aux mesures d’ajustement de primes ont toutefois eu des conséquences pour les entreprises du secteur de l’assurance de dommages.
Au Mouvement Desjardins, on confirme que les résultats ont été affectés par les « incidences financières de la pandémie de COVID-19 ». Les résultats du premier trimestre et du deuxième trimestre 2020 font respectivement état d’excédents avant ristournes aux membres s’établissant à 285 M$, en baisse de 116 M$ (ou 28,9 %), et d’excédents avant ristournes aux membres de 529 M$, en baisse de 163 M$ (ou 23,6 %), par rapport à ceux des trimestres correspondants de 2019.
Même son de cloche à la Compagnie d’assurance générale Co-operators. Pour le trimestre clos le 30 juin, le bénéfice net consolidé s’est établi à 47,9 M$, comparativement à un bénéfice net de 79,1 M$ pour le trimestre correspondant l’an dernier. Quant aux primes directes souscrites (PDS), elles ont diminué de 3,2 % (ou 33,5 M$) au deuxième trimestre de 2020, comparativement au trimestre correspondant de 2019, pour s’établir à 1 016,3 M$. Une situation principalement attribuée au « remboursement pour déplacements réduits de 35,5 M$ dans le secteur de l’assurance automobile et à d’autres changements de couverture demandés par les clients ».
« Dans le contexte des défis liés à la COVID-19, nous nous concentrons sur le soutien à nos clients, à nos membres et à nos collectivités », a déclaré Rob Wesseling, président et chef de la direction de Groupe Co-operators dans une communication. Il constate toutefois que « les politiques budgétaires et monétaires accommodantes ont entraîné une forte remontée des marchés financiers après leur correction en mars ».
De même, chez Desjardins, on signale que « malgré les incidences de la pandémie de COVID-19 sur les résultats financiers pour le deuxième trimestre de 2020, le Mouvement Desjardins demeure une institution financière aux assises très solides capable d’absorber les contrecoups d’un ralentissement économique ».
Chez La Capitale/SSQ Assurances, le conseiller en relation avec les médias et affaires publiques Jean-Pascal Lavoie évoque aussi une « bonne santé financière », qui permet de « traverser la crise avec confiance ». 
 
« Somme toute, les conséquences de la pandémie ne sont pas aussi aigües que ce que nous aurions pu craindre il y a quelques mois. Nous sommes en excellente santé financière et, grosso modo, nos résultats sont au rendez-vous », analyse-t-il.
Si le secteur de l’assurance de dommages résiste relativement bien jusqu’ici, l’évolution de la pandémie pourrait avoir une incidence sur les placements, et les demandes de règlement des assureurs et se répercuter à plus long terme sur les résultats de leurs activités et leur situation financière. 
L’efficacité des mesures prises par les assureurs pour faire face à la situation est le facteur qui fera la différence, estime PwC. « La manière donc vous allez servir vos clients sera la clé », indique la firme-conseil dans une analyse portant sur les défis du secteur en matière de gestion face à la COVID-19. 
PwC est d’avis que pour renforcer la fidélité de leurs assurés et montrer sa valeur à long terme, les assureurs doivent non seulement agir avec compassion, mais démontrer qu’ils peuvent évoluer dans cet environnement précaire avec rapidité, flexibilité et en s’appuyant sur une grande expertise technique.
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ASSURANCES DOMMAGES. La période d’incertitude engendrée par la COVID-19 a constitué un véritable test de « réalité numérique » pour de nombreuses entreprises. Le passage au travail à distance a par exemple contraint des institutions du secteur financier à accélérer leurs programmes d’innovation et à accroître leurs partenariats avec des start-ups de technologie financière.

Cela ne signifie pas pour autant que les fintechs sont automatiquement devenues florissantes. Certaines, qui collaborent avec de grandes institutions financières, « ont dû composer avec des changements de priorités temporaires de leurs clients, pendant que d’autres, qui s’adressent directement au grand public, ont dû jongler avec une demande accrue via leurs canaux numériques », a observé Dominique Ferst, gestionnaire associé chez Ferst Capital Partners, un fournisseur de capital de risque pour les fintechs.

Les mesures imposées par les gouvernements et l’ampleur des perturbations économiques et financières causées par la pandémie ont entraîné des effets très variables sur l’écosystème fintech québécois. Parmi eux, soulignons la fermeture temporaire des bureaux de la Station FinTech Montréal dès la mi-mars. 

Créée par Finance Montréal à la demande du gouvernement du Québec, la Station FinTech est le pôle d’excellence du secteur. Installée à la Place Ville-Marie, au cœur de la métropole, elle offre en temps normal un milieu d’échanges et de travail adapté aux start-ups financières, ainsi que des services d’accompagnement et de soutien. Depuis le 6 juillet, seuls les locataires et employés y ont un accès limité, conformément aux directives de la santé publique. 

L’annulation du Forum FinTech 2020, le plus important événement du domaine des technologies financières au Canada, est une autre conséquence de la pandémie. Des Rencontres Off du Forum sont toutefois organisées mensuellement « et se feront de manière virtuelle jusqu’à nouvel ordre, et la tenue d’autres activités en fintech à l’automne est actuellement considérée », signale Julie Perrone, directrice des communications et du marketing à Finance Montréal.

Un stress test

L’activité de financement en capital-risque a aussi ralenti au cours du deuxième trimestre, ce qui a forcé de nombreuses start-ups à revoir leurs dépenses. 

Certaines ont choisi de réduire temporairement leur personnel afin de préserver leur capital, ainsi que « pour prévenir des cycles de vente B2B plus longs » en raison de la COVID-19, estiment David Nault et Laviva Mazhar, respectivement associé directeur et associée en investissements chez Luge Capital, un fonds de capital de risque pour les sociétés de technologie financière en démarrage.

Les start-ups déjà financées n’ont toutefois pas vu les investisseurs retirer leurs billes, selon eux. « Les assurtechs qui étaient déjà bien financées en ont même profité pour embaucher les meilleurs talents issus d’entreprises qui ont dû les laisser partir », ajoutent-ils.

« Au cours des premiers mois de la pandémie, moins d’investisseurs cherchaient à faire de nouveaux investissements, car ils se concentraient sur le soutien aux entreprises déjà présentes dans leur portfolio. Luge Capital a réalisé deux nouveaux investissements au cours de cette période », indiquent David Nault et Laviva Mazhar. Ils précisent continuer de rencontrer activement des entreprises avec leurs co-investisseurs, en vue d’« en faire d’autres ». 

Ils sont d’avis que la pandémie a accéléré et continuera d’accélérer l’adoption de solutions numériques par les opérateurs historiques tels que les assureurs et les courtiers, ce qui activera directement la demande pour les solutions proposées par les assurtechs. 

Selon eux, la crise découlant de la COVID-19 a aussi permis de « tester et continuera de tester la force et la viabilité des solutions développées par les assurtechs, et aidera à séparer les gagnants des perdants ». Pour cette raison, ils croient que la situation entraînera des conséquences « globalement positives pour l’écosystème assurtech et pour des fonds comme Luge Capital qui financent ces entreprises ».

Cinq assurtechs proposant des solutions au Québec 

Baseline Télématique, de Laval, a été fondée en 1994 par Paul-André Savoie, qui en dirige toujours la destinée. L’une des pionnières des assurtechs au Canada, elle a introduit la télématique dans le secteur des assurances en 2009 en développant le premier produit d’assurance UBI (basé sur les habitudes de conduite) au Canada pour l’Industrielle Alliance, Mobiliz.ca.

Geosapiens, de Québec, a développé E-NUNDATION, une plateforme web qui permet une cartographie dynamique et prévisionnelle des risques d’inondation. Elle produit un rapport détaillé sur le niveau de risque d’inondation et les dommages financiers associés. Constituée en 2017, Geosapiens a remporté le premier prix à la compétition technologique Aquahacking 2018. Hachem Agili, le cofondateur et PDG, s’est mérité le Prix Mitac Entrepreneur social 2019.

IMETRIK Global, de Montréal, est un fournisseur de services télématiques et un guichet unique de solutions M2M (communication machine à machine) spécialisé dans l’industrie automobile. Sa gamme de services inclus notamment la solution UBI pour l’assurance basée sur le comportement de conduite lancée en 2013 avec le programme Ajusto de Desjardins Groupe d’assurances générales, et le programme Intelauto de La Personnelle. C’est en 2003 que Guy Chevrette, fondateur et président d’IMETRIK, a créé dans son sous-sol Connectif Solutions, une première ébauche de ce qu’allait devenir l’entreprise.

Technologie Keal est l’un des principaux fournisseurs de systèmes de gestion d’assurance et de solutions de courtage au Canada. Il est issu de l’acquisition en 2000 de BMS, une division de système de gestion de courtage, par Pat Durepos, un courtier de profession. En 2016, Keal a joint l’Américaine Vertafore, un leader nord-américain en technologie d’assurance — celle-ci a été acquise le 13 août dernier par Roper Technologies. Elle possède des bureaux à Montréal, Toronto et Grand-Sault.

En février dernier, Zesty.ai, une assurtech fondée à Oakland, en Californie, a annoncé l’ouverture du laboratoire Zesty.ai Lab à Montréal. Ses activités seront axées sur la recherche et le développement d’applications concrètes en intelligence artificielle (IA) pour le secteur de l’assurance. L’objectif du laboratoire installé à la Place Ville-Marie est de mieux comprendre les risques liés aux catastrophes naturelles.

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